Dictionnaire de la Littérature 2001Éd. 2001
Q

quechua

Langue des anciens Incas, le quechua est avec l'aymara et le guarani le groupe linguistique le plus important de l'Amérique du Sud. Descendants des anciens Incas, les Indiens andins, qui s'expriment encore aujourd'hui en quechua, possèdent tout un folklore qui, bien que fortement entaché d'influences européennes et chrétiennes, pérennise encore des traditions et des croyances précolombiennes. C'est ainsi que Viracocha, grand dieu des Incas, est souvent identifié au dieu chrétien et Pacha Mama, la terre mère, à la Vierge. De nombreuses fables sont des versions altérées de mythes antérieurs à la Conquête : ainsi celle qui raconte comment le renard désirant se rendre au banquet que l'on célébrait au ciel s'y fit conduire par le vautour. Bien rassasié, il voulut redescendre sur terre à l'aide d'une corde qui fut sectionnée par le perroquet, le renard s'écrasa au sol et de son ventre se répandirent sur terre toutes les nourritures célestes. C'est ainsi que les hommes purent manger toutes sortes d'êtres surnaturels peuplant les montagnes, les cavernes, les vergers, etc., et les phénomènes naturels, comme la foudre, sont toujours considérés comme des manifestations de la colère des divinités. Toutes les étapes importantes de la vie, naissance, maladie, mort, ainsi que les événements majeurs de la vie sociale comme la construction d'une maison, sont célébrés par un rituel complexe où se mêlent prières, libations, sacrifices.

Queen (Ellery)

Pseudonyme commun de Manfred B. Lee, alias Daniel Nathan (Brooklyn 1905 – Waterbury, Connecticut, 1971), et de Frédéric Dannay, alias Manford Lepofsky (Brooklyn 1905 – White Plains, New York, 1982).

Ces deux cousins, fils d'immigrés polonais, ont porté le roman-problème à sa perfection, avec un art de maîtriser l'attente, de construire la surprise et d'organiser la déroute du lecteur (le Mystère du chapeau soie, 1929 ; le Mystère de l'éléphant, 1930 ; le Mystère de la cape espagnole, 1935 ; la Ville maudite, 1942 ; la Décade prodigieuse, 1948 ; Coup double, 1950 ; Et le huitième jour, 1964). Ils furent les fondateurs, en 1941, du Ellery Queen's Mystery Magazine (revue indispensable, devenue en France Mystère Magazine, sous la houlette de Maurice Renault). En 1932-1933, ils écrivirent une série de quatre romans sous le pseudonyme de Barnaby Ross (la Tragédie de X, la Tragédie de Y, la Tragédie de Z, la Dernière Affaire de Drury Lane).

Queffélec (Henri)

Écrivain français (Brest 1910 – Paris 1992).

Bien que son père fût bretonnant, il ne parle pas le breton. Reçu à l'École normale supérieure, il obtient l'agrégation en 1934 et enseigne un an à Mont-de-Marsan avant de devenir lecteur en Suède, jusqu'en 1939. Professeur à Paris, il abandonne l'enseignement en 1942, et se consacre à l'écriture. Après un recueil de poèmes (Sur la lisière, 1937), ses premiers romans sont d'inspiration sartrienne : Journal d'un salaud (1944), la Culbute (1946), Un recteur de l'île de Sein (1944), adapté au cinéma sous le titre Dieu a besoin des hommes, et la Fin d'un manoir (1944), mais s'inscrivent dans une perspective spirituelle. Disciple d'Emmanuel Mounier (il entre en 1945 à la revue Esprit), cet humaniste chrétien consacre une grande partie de son œuvre, où le pittoresque n'évite pas toujours le didactisme et une certaine emphase, à la Bretagne et à la mer à travers romans (Chemins de terre, 1948 ; Un feu s'allume sous la mer, 1956 ; Frères de la brume, 1960 ; Tempête sur la ville d'Ys, 1962 ; la Mouette et la Croix, 1969 ; les Îles de la Miséricorde, 1974), nouvelles (la Cache éternelle, 1973 ; De par les sept mers, 1982) et essais (Je te salue vieil océan, 1968 ; le Folgoët, 1972). Ses souvenirs ont été publiés en 1978, sous le titre Un Breton bien tranquille.

Queffélec (Yann)

Écrivain français (Paris 1949).

Fils d'Henri Queffélec, critique musical (il a publié un essai sur Béla Bartók), il écrit un premier roman, le Charme noir (1983), puis obtient le prix Goncourt pour les Noces barbares (1985), histoire d'un enfant martyrisé, né d'une mère violée par trois soldats américains. L'univers souvent sombre de ses romans (la Femme sous l'horizon, 1988 ; le Maître des chimères, 1990 ; Prends garde au loup, 1992 ; Disparue dans la nuit, 1994) est marqué par le traumatisme psychologique et la violence sociale, laissant sa part au rêve autant qu'à la réalité. Osmose (2000) évoque le monde pénitencier à travers un adolescent meurtrier de son père. Critique littéraire, il apprécie la littérature américaine pour sa « liberté qui bannit les fioritures, les arabesques, le nombrilisme béat, et tout ce qui [...] guinde le style d'un auteur ».

Queiros (Dinah Silveira de)

Femme de lettres brésilienne (São Paulo 1910 – Rio de Janeiro 1982).

Sa carrière passe du récit fantastique (Margarida La Rocque, 1950) à la science-fiction (Comba Malina, 1969), pour aboutir à des romans d'inspiration religieuse.

Queiros (José Maria Eça de)

Écrivain portugais (Póvoa de Varzim 1845 – Paris 1900).

Diplomate, grand voyageur, adversaire du romantisme, il participa à Lisbonne aux conférences du Casino (1871) et définit le réalisme comme refus du conventionnel, de l'emphase et de la mièvrerie. Le tempérament romantique, nourri de Heine, de Hoffmann et de Poe, perce encore dans ses premières œuvres, mais Singularités d'une jeune fille blonde (1874) s'impose comme le premier récit réaliste écrit en portugais. Sa critique humoristique de la société portugaise s'intensifie dans des romans, visant à la fois le clergé (le Crime du Père Amaro, 1875), les milieux littéraires et journalistiques (la Capitale, 1905), la petite et la haute bourgeoisie (le Cousin Basílio, 1878 ; les Maia, 1888). Ce ton change dans ses œuvres postérieures : l'Illustre Maison Ramires (1897) est une évocation du Moyen Âge et de l'aristocratie héréditaire, la Ville et les montagnes (1901), un chant idyllique de la vie rustique, mais aussi une réflexion de l'auteur sur son parcours intellectuel.

Queiros (Raquel de)

Femme de lettres brésilienne (Fortaleza, Ceará, 1910 – Rio de Janeiro 2003).

Auteur de romans, de pièces de théâtre (Lampião, 1950) et de chroniques, elle fut la première femme à entrer à l'Académie brésilienne des lettres, en 1978. Sa production est liée au roman social du Nord-Est (la seconde phase du modernisme), sans pour autant s'écarter des problèmes de la femme dans ce contexte socio-géographique, d'où découle une sorte d'autobiographie romancée (João Miguel, 1932 ; Dora, Doralina, 1975). Son roman le Quinze (1930) évoque, sur le fond de la sécheresse de l'année 1915, l'amour naïf entre Vicente et Conceição, qui finit par rompre la liaison pour ne pas accepter le rôle de soumission destiné à la femme dans cette société patriarcale.