Dictionnaire de la Littérature 2001Éd. 2001
E

Exbrayat (Charles)

Écrivain français (Saint-Étienne 1906 – id. 1989).

Reporter, auteur dramatique (la Fille du jardinier), romancier (Jules Matrat, 1942), scénariste, il entre au Masque en 1957 avec Elle avait trop de mémoire et produira une centaine de romans de suspense (Dors tranquille, Katherine, 1962 ; Ole, torero !, 1963) et humoristiques (Aimez-vous la pizza ?, 1960 ; Une ravissante idiote, 1961 ; Encore vous, Imogène ?, 1962).

excentriques

Si le terme n'a jamais servi à désigner une école ou un courant constitué, il revient à Nodier d'avoir le premier lancé l'idée de « livre excentrique » ou « livre qui est fait hors de toutes les règles communes de la composition et du style, et dont il est impossible ou très difficile de deviner le but, quand il est arrivé par hasard que l'auteur eût un but en l'écrivant » (« Bibliographie des fous. De quelques livres excentriques », 1835). Quelques ancêtres : Rabelais, Béroalde de Verville (le Moyen de parvenir, 1610), Swift et Sterne, dont le Tristram Shandy (1767) ou le Voyage sentimental (1769) constituent des manifestes de l'excentricité – Diderot s'en inspire librement dans Jacques le fataliste (1796) –, Xavier de Maistre dans son Voyage autour de ma chambre (1795), avant nombre de folies dont se détachent l'Histoire du roi de Bohême et de ses sept châteaux de Nodier (1830) et les Faux Saulniers de Nerval (1850). Parodie continue, refus des conventions romanesques, mise à mal de la logique narrative, multiplication des intrusions d'auteur, remise en cause des contraintes formelles (typographie, organisation en chapitres), affirmation de la fantaisie comme principe d'enchaînement sont les caractéristiques principales de ces antiromans qui semblent avoir longtemps attendu les héritiers évidents que sont Queneau, Perec, Ducharme ou Chevillard, mais ont de fait exercé une influence déterminante sur la littérature dite sérieuse : les dénouements abrupts de nombreux textes de Balzac ou Stendhal, certaines inventions hugoliennes, les dispositifs paradoxaux de Lautréamont, les collages flaubertiens ne seraient sans doute pas ce qu'ils sont sans l'antimodèle excentrique.

Exode (livre de l')

Le second livre du Pentateuque, appelé en hébreu Chemôt « Noms ».

La version grecque (Septante), l'appelle « Exodos » et, à sa suite, la Vulgate (Exodus). C'est le livre de la  « Sortie » d'Égypte qui aboutit à la formation du peuple hébreu en une nation. Avec l'alliance, le don de la Torah et les dix commandements sur le mon Sinaï, l'Exode est un livre clé du Pentateuque. Les exégètes distinguent plusieurs parties en Exode : 1. la sortie d'Égypte (I, 1-XV, 21) ; 2. la marche de l'Egypte au Sinaï (XV, 22-XVIII, 27) ; 3. l'alliance au Sinaï (XIX-XXIV) ; 4. la rupture de l'alliance et son renouvellement (XXXII-XXXIV) ; 5. les instructions sur la construction du sanctuaire portatif, prototype du Temple de Jérusalem. Selon l'histoire des traditions, ce livre enferme une épopée créée pour expliquer l'origine historique de la fête de la Pâque juive, Pessah. Les chapitres I-XV, contenant le récit de Pessah, représentent le noyau du livre. Les traditions qui traitent du don de la Torah, les différentes lois (XXI-XXIV) et les détails portant sur le sanctuaire seraient d'une origine plus tardive.

expérimentalisme

Mouvement littéraire néerlandais. Les expérimentalistes apparaissent dans la mouvance des recherches plastiques du groupe Cobra ou du Groupe expérimental hollandais (1948), qui s'exprime dans les visions oniriques de Constant ou le « vandalisme créateur » d'Asger Jorn. Annoncé par la réaction de la revue Het Woord contre le réalisme anecdotique de Criterium, le courant prit forme avec la publication de l'anthologie Atonaal (1951). Primauté des sens visuel et tactile, attrait pour le hasard et l'improvisation, intérêt marqué à la fois pour un certain gnosticisme et l'engagement politique caractérisent un mouvement dont la flambée fut courte (1949-1955) mais décisive : par sa réflexion sur le matériau linguistique de l'expression littéraire, il exerça une influence considérable sur les générations de Podium et de Gard Sivik.

expressionnisme

Que le terme ait été employé pour la première fois par W. Worringer (Abstraction et Empathie, 1911) à propos de Van Gogh, Cézanne et Matisse, il est passé rapidement des arts plastiques à la littérature. L'expressionnisme se définit contre l'impressionnisme comme une tentative de révolution artistique fondée sur un renouveau spirituel. Il s'inscrit dans la période comprise entre 1910 et le début des années 1920. Ses manifestations, principalement concentrées en Europe centrale, concernent la peinture, la gravure, la sculpture, le lyrisme et le théâtre, mais aussi la musique (Schönberg, Berg) et le cinéma (le Cabinet du docteur Caligari, réalisé en 1919 par Robert Wiene). Avec l'expressionnisme, l'Allemagne cesse d'être à la remorque des littératures étrangères. La révolte des écrivains expressionnistes est l'expression de leur opposition à l'esprit wilhelminien et aux contradictions du temps.

L'idéal révolutionnaire

Il est fondé sur une nouvelle attitude face à la vie et trouve ses racines dans la religion, la philosophie, la politique. Il mêle les aspects métaphysiques et éthiques aux espoirs d'une révolution sociale et veut exprimer la « condition humaine ». Les artistes recherchent une expression qui dépasse la solitude de l'individu et serait le véhicule d'un retour sur soi, spirituel et politique. L'idéal expressionniste est un art dont la force est la provocation. La protestation des expressionnistes contre la société bourgeoise vise l'emprise de la technique sur la vie, l'aliénation dans les relations humaines. Leurs conceptions antinaturalistes et anarchiques ont semé la panique parmi les bourgeois de l'époque. La plupart des contemporains n'ont pas compris à quel point le cri extatique dans l'art était le signal des crises à venir. L'expérience de la crise de la civilisation et le pressentiment de la « fin du monde » (J. Van Hoddis) débouchent sur la volonté de changer la situation existante : élan, action, libération et révolution sont les mots-clés de leurs œuvres ; les expressionnistes décrivent un programme philosophique et esthétique et opposent au matérialisme de leur temps, l'évocation d'un avenir meilleur, au culte de la forme (représenté par l'« Art nouveau »), l'expression excessive de leurs visions.

   On peut distinguer trois phases. La première, de 1909 à 1914, est caractérisée par une conscience encore confuse de la crise, mais sur le plan stylistique, l'expressionnisme atteint d'emblée sa plénitude. L'expérience de la guerre et de la révolution marque la deuxième période, de 1914 à 1918 : la tendance à la politisation est renforcée : les liens sont nombreux entre l'expressionnisme et les mouvements socialiste, communiste, anarchiste et pacifiste. Quelques rares expressionnistes seront attirés par le fascisme (G. Benn, H. Johst). Dans la troisième phase de l'expressionnisme, entre 1918 et 1923, l'idée d'un changement révolutionnaire de la société et l'expression des convictions l'emportent. Mais on perçoit de plus en plus clairement le danger que l'expressionnisme portait en lui : la pose et le maniérisme.

   Malgré son refus de la tradition, l'expressionnisme se situe dans une ligne historique, celle du baroque, du Sturm und Drang, et peut se reconnaître des « intercesseurs » (Kleist, Hölderlin, Büchner, Kierkegaard, Baudelaire, Rimbaud, Whitman, Nietzsche). Mais il rejette les formes traditionnelles, aspire à une littérature qui ne reste pas littérature (K. Hiller). Les tendances sont très diverses, on y trouve des rêves d'innocence à côté de visions d'apocalypse, la ferveur religieuse à côté d'appels à la lutte des classes, la satire à côté du désespoir, la provocation dadaïste à côté du dogmatisme pesant. Le seul dénominateur commun est la tendance à l'excès et au renversement des valeurs.

   Les objectifs du mouvement se sont exprimés dans plusieurs revues : Der Sturm (publié par H. Walden, à partir de 1910), Die Aktion (F. Pfemfert, à partir de 1911), Die Weissen Blätter (R. Schickele, à partir de 1913), Der Brenner (L. von Ficker, à partir de 1910). Grâce à ces revues, à l'action d'hommes comme Kurt Hiller (1885-1972), qui fonda en 1910 à Berlin son « Cabaret néo-pathétique », grâce à des anthologies comme celle de Kurt Pinthus (le Crépuscule de l'humanité, 1920) et à quelques éditeurs comme O. Müller, E. Rowohlt et K. Wolff, l'expressionnisme a influencé la vie littéraire en Allemagne. Aux côtés d'écrivains célèbres (E. Barlach, J. R. Becher, G. Benn, A. Bronnen, A. Döblin, K. Edschmid, G. Heym, W. Hasenclever, G. Kaiser, E. Lasker-Schüler, E. Stadler, C. Sternheim, R. J. Sorge, A. Stramm, E. Toller, G. Trakl, F. Werfel, F. Wolf), on peut ajouter des noms moins connus : R. Goering (1887-1936), A. Lichtenstein (1889-1914), E. Blass (1890-1939), L. Rubiner (1881-1920), C. Einstein (1885-1940), J. Van Hoddis (1887-1942), A. Ehrenstein (1886-1950), E. W. Lotz (1890-1914), A. Wolfenstein (1888– 1945), G. Sack (1885-1916), Klabund (1890-1928). Beaucoup sont morts jeunes, notamment au cours de la Première Guerre mondiale. Les survivants ont eu à souffrir sous le IIIe Reich ou ont été contraints à l'exil.