Dictionnaire de la Littérature 2001Éd. 2001
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Tcheremchyina (Ivan Iourievytch Semaniouk, dit Marko)

Écrivain ukrainien (Kobaki 1874 – Sniatyn 1927).

Avocat galicien, il fut lié au parti radical de Franko et Pavlyk, et travailla avec Stefanyk à l'éveil culturel des paysans d'Ukraine occidentale. Auteur de poèmes en prose d'inspiration moderniste (Feuillets, 1898), il consacre des nouvelles au village goutsoule, dont il déplore la misère et le déclin, consécutifs à l'intrusion du capitalisme (Repères, 1901) et à la Première Guerre mondiale (Le village qui meurt, 1925 ; Verkhovyna, 1929).

Tchernikhovsky (Saül)

Poète d'origine russe et de langue hébraïque (Mikhaïlovka, Crimée méridionale, 1875 – Jérusalem 1943).

Il passa sa jeunesse à la campagne où sa famille vivait en bonne intelligence avec ses voisins, les Tatars. Très tôt, il s'intéressa à la fois à la Bible, aux œuvres de la Haskalah et à la littérature mondiale. De 1890 à 1899, il vécut à Odessa où il fréquenta une école de commerce et étudia des langues anciennes et modernes. C'est là qu'il publia ses premiers poèmes en hébreu, et, en 1899, parut son recueil Visions et Mélodies. La même année, il entreprit à Heidelberg des études de médecine qu'il acheva à Lausanne en 1905. Il y composa son Livre des idylles, publié en 1922. Le second volume des Visions et Mélodies parut en 1901. De 1907 à 1910, il fut médecin de campagne en Russie, puis médecin au front durant la Première Guerre mondiale, enfin externe dans un hôpital militaire. En 1922, il s'installa à Berlin, tenta d'aller vivre en Palestine en 1925, mais revint à Berlin où il demeura jusqu'en 1931, date de son retour en terre d'Israël. Il y fut nommé médecin des écoles de Tel-Aviv. Son œuvre présente une grande variété de thèmes et un certain nombre de contradictions, notamment dans l'attitude ambiguë face à l'héritage juif. Les thèmes de la nature et de l'amour tiennent également une place importante. Mais sa contribution originale réside dans les poèmes d'inspiration grecque dont un des plus célèbres, Devant la statue d'Apollon, fit scandale.

   Dans ce poème comme dans d'autres œuvres qui témoignent de son admiration pour la culture grecque, il attaque violemment le peuple juif de l'exil et critique la culture et la religion juives auxquelles il oppose l'idéal grec de la beauté. Il glorifie néanmoins les héros juifs antiques qu'il rapproche des héros grecs. C'est dans cette optique qu'il se fait le chantre de la renaissance dans le pays ancestral. À ces poésies s'opposent les œuvres inspirées par la vie juive de son village natal, qu'il décrit avec tendresse et nostalgie. En outre, de nombreux poèmes puisent leurs thèmes dans le martyrologe juif. Après son installation en Palestine, sa poésie prend un caractère nouveau et chante la jeunesse qui régénère le pays. Tchernikhovsky ne se contente pas d'enrichir la poésie hébraïque de nouveaux thèmes, mais introduit des formes nouvelles telles que l'idylle, développe le genre du long poème dramatique et porte le sonnet à un degré de perfection jamais atteint. On lui doit d'importantes traductions d'œuvres classiques parmi lesquelles : l'Iliade et l'Odyssée, le poème finnois du Kalevala, le Banquet de Platon, l'Épopée de Gilgamesh, le Chant de Hiawatha de Longfellow, le Malade imaginaire de Molière. Il a aussi laissé un drame (Bar Kokhba) et de nombreuses nouvelles relatant ses souvenirs de médecin.

Tchernovtsy (conférence de)

Rassemblant en août-septembre 1908 les grands noms de la littérature yiddish (Peretz, Zhytlovsky, Asch, Reisen) ainsi que des représentants du mouvement culturel hébreu et des courants politiques, elle devait définir un programme pour le développement de la culture en yiddish. En proclamant le yiddish comme l'une des langues nationales du peuple juif, la conférence contribua à donner une nouvelle impulsion à sa littérature.

Tchicaya U Tam'si (Gérald)

Écrivain congolais (Mpili 1931 – Bazancourt, Oise, 1988).

Fils d'un parlementaire, il poursuit ses études à Paris (1946). Lors de la sécession du Katanga (1960), il prend la direction du journal Congo, aux côtés de Patrice Lumumba, et devient chef de la délégation du Congo auprès de l'Unesco. Poète exigeant (le Mauvais Sang, 1955 ; Feu de brousse, 1957 ; À triche-cœur, 1960 ; Épitomé, 1962 ; l'Arc musical, 1970 ; le Ventre, 1964 ; la Veste d'intérieur, 1977), il reste très réservé à l'égard de la négritude. Dramaturge acerbe (le Zoulou, 1977 ; le Destin glorieux du maréchal Nnikon Nniku Prince qu'on sort, 1979), il est aussi l'auteur de romans (les Cancrelats, 1980 ; la Main sèche, 1980 ; Ces fruits si doux de l'arbre à pain, 1987) et de nouvelles (les Méduses ou les Orties de la mer, 1982 ; les Phalènes, 1984), qui présentent une saisissante fresque du Congo à l'époque coloniale.

Tchikovani (Simon Ivanes dze)

Poète géorgien (Naesak'ao, rég. de Gegetch'k'ori, 1902 – Tbilisi 1966).

Futuriste, il rejette le vieux monde (Pensées au bord du Mt'k'vari, 1925) et convoque les grands ancêtres pour exalter tour à tour la nature de son pays natal, la Géorgie nouvelle, la résistance et l'Internationale socialiste (Soirs d'automne en Colchide, 1933-1939 ; À l'ombre de Nik'oloz Baratachvili, 1938 ; Chant sur Davit Guramichvili, 1942-1946).

Tchiloyan (Slavik)

Poète arménien (Erevan 1940 – 1975).

Traducteur de Racine et des poètes français, il fut le modèle même du poète maudit broyé par le régime soviétique, dont son œuvre (Nous avons été des hommes, posthume, 1992) dénonce l'absurdité, l'arbitraire et la violence.

Tchiornyi (Aleksandr Mikhaïlovitch Glikberg, dit Sacha)

Poète russe (Odessa 1880 – Le Lavandou 1932).

Né dans une famille juive, il passe son enfance à Jitomir, occupe un poste de petit fonctionnaire, puis s'installe à Saint-Pétersbourg en 1905, et collabore activement (1908-1911) à la revue le Satiricon. Il se révèle dans des poèmes satiriques très populaires, réunis par la suite en volumes (Satires, 1910 ; Satires et vers lyriques, 1913), comme un misanthrope angoissé, ennemi de la réaction et des intellectuels « libéraux », mais d'abord des « pauvres en esprit » et des médiocrités de l'existence bourgeoise. La richesse d'imagination et la force comique de ses textes cachent une vision du monde extrêmement sombre (« Au paradis, je m'ennuirai beaucoup,/ Et l'enfer, je l'ai déjà vu sur terre »). Émigré, il composa des vers pour enfants, des contes en prose et exhala dans sa poésie sa nostalgie de déraciné (la Soif, 1923).