Dictionnaire de la Littérature 2001Éd. 2001
V

Veríssimo (Erico)

Romancier brésilien (Cruz Alta, Rio Grande do Sul, 1905 – Porto Alegre 1975).

Sa trilogie historique le Temps et le vent (1949-1961) et ses romans politiques (le Président, 1967) ont contribué à divulguer le régionalisme gaúcho.

Verlaine (Paul Marie)

Poète français (Metz 1844 – Paris 1896).

Fils de militaire – son père est officier du génie –, installé d'abord à Metz, il connaît au hasard des garnisons cette France méridionale pour laquelle il éprouvera si peu de goût : de 1845 à 1849, son père est à Montpellier, à Sète, puis à Nîmes. Un souvenir d'enfance reste attaché au séjour à Montpellier : le spectacle de pénitents en cagoules, dont le retentissement et le pouvoir d'organisation plastique paraissent s'exprimer par exemple dans les « spectres fébriles » des Poèmes saturniens. La famille Verlaine, de retour à Metz pour le début de l'année 1849, s'installe définitivement à Paris deux ans plus tard. Verlaine laisse derrière lui l'image plusieurs fois évoquée de ses amours enfantines – Mathilde – et de leur théâtre bariolé (« L'esplanade les « fois » de musique »), pour prendre contact avec une réalité d'abord décevante (« Ma première impression de Paris fut laideur, boue et jour sale »), mais néanmoins vite rachetée par le spectacle du Boulevard. D'abord externe d'un « modeste pensionnat » rue Hélène, il entre, en octobre 1853, en 9e comme interne à l'Institution Landry, et suit les cours du lycée Condorcet (alors lycée Bonaparte), où il fait « d'assez médiocres études » ; il termine bachelier ès lettres en août 1862. C'est au début de cette adolescence « si critique » qu'il fait remonter son goût pour les lettres (« Le poète naquit en moi »), conjointement à l'éveil de sa sensualité et en même temps qu'il prend conscience de sa laideur (réelle ou supposée).

Premiers textes

En décembre 1858, il a fait parvenir une pièce à V. Hugo, la Mort. Il lit, outre Baudelaire et Banville, Albert Glatigny (les Vignes folles) et Catulle Mendès (Philoméla) – les « camarades » en ferveur et en invention poétique –, Gautier (Émaux et Camées), Sainte-Beuve (Port-Royal)... En octobre 1862, il est inscrit à la faculté de droit, « sous prétexte d'étudier la jurisprudence », mais son intérêt se porte surtout vers certaines « séances ès caboulots de la rue Soufflot ». Il rencontre Banville, Villiers de L'Isle-Adam, Coppée, dans le salon de la marquise et générale de Ricard, la mère de son ami Louis Xavier de Ricard qui a entrepris la publication de l'éphémère Revue du progrès moral, où Verlaine est pour la première fois édité, avec Monsieur Prudhomme, un sonnet, en août 1863. Il a en outre dans ses cartons plusieurs pièces de vers, dont Fadaises et Aspiration. Rompant définitivement avec le trompe-l'œil de son existence estudiantine, il entre dans l'administration, à la mairie du IXe arrondissement. Il rencontre peu après (fin 1864) C. Mendès, le futur promoteur du Parnasse contemporain. La « revue positiviste » de Ricard ayant fait naufrage, ce dernier, appuyé par Lemerre, conçoit le projet d'une « publication à tapage » qui débouche sur le lancement de l'Art, où Verlaine donne en décembre 1865 un article contre Barbey critique, ainsi qu'une étude sur Baudelaire, poète moderne et parisien, dans lequel il prend pour cible les « passionnistes », les « utilitaristes » et autres « inspirés ». C'est vers la fin de la même année (30 décembre) que le père de Verlaine succombe aux attaques d'un mal qui le mine depuis plusieurs années déjà ; Verlaine continue à vivre sous le même toit que sa mère.

Des Poèmes saturniens à la Bonne Chanson

   Au Parnasse contemporain, qui commence à paraître en mars 1866, il donne, en avril, plusieurs poèmes, et en novembre il publie à compte d'auteur les Poèmes saturniens, dont une dizaine de pièces étaient parues dans diverses revues, parmi lesquelles l'Art, le Parnasse et la Revue du XIXe siècle. La critique se méprend unanimement sur ce recueil, à l'exception de Mallarmé qui se montre sensible à l'effort de Verlaine « vers l'Expression, vers la Sensation rendue », à la rupture opérée en sourdine avec l'esthétique du Parnasse. La publication avait été rendue possible grâce à l'intercession financière de sa cousine Élisa, figure authentiquement chérie par Verlaine (« Mieux qu'une sœur », écrira-t-il dans Amour), et son désarroi et sa souffrance n'en sont que plus cruels lorsqu'elle meurt en février 1867 : il se réfugie dans l'alcool, au grand scandale de son entourage. En juillet débute sa collaboration au Hanneton de E. Vermersch ; il paraît dans le salon de Nina de Villard, où se retrouvent Cros, Villiers, Coppée, C. de Sivry ; en juillet 1868, il fait paraître dans l'Artiste six poèmes, Nouvelles Fêtes galantes, repris dans le recueil qui sort en mars 1869 chez Lemerre sous le titre de Fêtes galantes, tiré à plusieurs centaines d'exemplaires et à compte d'auteur. À la croisée d'influences diverses (Le Dentu a fait paraître un peu auparavant l'Art au XVIIIe s. des Goncourt, et les Peintres de fêtes galantes de C. Blanc datent de 1864), les quelque vingt-deux pièces du recueil déploient leur esthétique propre en un décor planté dès la Nuit de Walpurgis classique : spectral, blafard et nostalgique, sur la crête de vertiges amorcés ou flagrants, au cordeau d'un art du vers très sûr et hardi, qui retiendra l'attention de Rimbaud entre autres vers, « Et la tigresse épouvantable d'Hyrcanie », dont l'audace prosodique (c'est la première fois qu'on ose couper un mot à l'hémistiche) stupéfie l'enfant poète. À la même époque, l'ivrognerie de Verlaine s'aggrave : ivre, il tente à deux reprises de tuer sa mère (juillet 1869). Contre les assauts de son penchant et ses séquelles, il invoque l'image d'une très jeune femme rencontrée peu avant chez C. de Sivry, Mathilde Mauté, dont il demande la main à la fin de juillet 1869 ; il met alors en route la Bonne Chanson, le « mince ouvrage », « si purement pensé, si simplement écrit ». Rentré à Paris fin août, il fait sa cour : « La bonne chanson battait son plein. » Imprimé à Paris en juin 1870, le recueil ne paraît pas pour cause d'hostilités, lesquelles menacent par ailleurs le mariage de Verlaine et de Mathilde, qui a lieu toutefois, le 11 août 1870. Le couple s'installe alors rue du Cardinal-Lemoine, où il reçoit entre autres Cros et Villiers. Lors de la proclamation de la République, Verlaine est affecté à la Garde nationale : il recommence à boire, et bientôt c'est « la première claque », suivant la sobre expression des Confessions.

Rimbaud, Romances sans paroles

La proclamation de la Commune trouve un Verlaine à « l'esprit tout imbu d'hébertisme pittoresque » ; il est alors attaché au Bureau de la presse, ce qui lui vaudra d'être révoqué après la victoire des Versaillais. Appréhendant d'éventuelles représailles, les Verlaine s'exilent provisoirement, à Fampoux, près d'Arras, puis à Lécluse ; de retour à Paris, ils sont hébergés par les Mauté. Fin août et début septembre, Verlaine reçoit les premières lettres de Rimbaud : « Venez, chère grande âme », répond-il dès sa seconde missive. L'arrivée de Rimbaud à Paris, son intimité avec Verlaine et la publicité scandaleuse qui accompagne les adeptes des dîners des Vilains Bonshommes achèvent d'envenimer les rapports de Verlaine et de Mathilde, qui a mis au monde leur fils Georges, le 30 octobre 1871, et qui entreprend une procédure de séparation au début de l'année suivante. Quant à Verlaine, l'incertitude de sa conduite le montre là au rouet de ses palinodies, tantôt conciliant envers Mathilde, tantôt éclatant d'un ressentiment qui se cristallisera en une acrimonie définitive. À partir de janvier 1872, il est avec Rimbaud, qui le quitte pour une provisoire retraite sur Charleville en mars, mais le retrouve en mai ; c'est en mai et juin que Verlaine écrit la plus grande partie des Ariettes oubliées. Avec Rimbaud toujours, il se rend en Belgique en juillet – où il écrit les Paysages belges –, puis en Angleterre en septembre, d'où il lance en décembre, abandonné de Rimbaud, un appel au secours à sa mère et à sa femme. Il écrit, en février 1873, plusieurs pièces des Romances sans paroles, dont il a songé un moment à confier l'impression à Vermersch, réfugié en Angleterre. Rejoint par Rimbaud à Londres, il gagne avec lui Namur, puis Jéhonville. À nouveau séparés, les deux poètes se retrouvent en mai et repartent pour l'Angleterre, avant que Verlaine se rende à Bruxelles, où, sollicité, Rimbaud vient le rejoindre. La brouille des deux amis culmine dans l'épisode du 10 juillet 1873 : Verlaine tire deux coups de feu sur son ami, qu'il blesse légèrement à la main ; une velléité de récidive le jour même lui vaut d'être arrêté, écroué à l'Amigo, puis à la prison des Petits-Carmes (où il écrit « Le ciel est, par-dessus le toit... »), condamné enfin à deux ans de prison (août), qu'il purge à la prison de Mons, dont il sortira le 16 janvier 1875. C'est de cette réclusion qu'il dirige l'édition des Romances sans parole, qui se fait à Sens grâce aux bons offices de son ami Lepelletier. Mais, entre-temps, les procédures entreprises par Mathilde aboutissent, et la séparation de corps est prononcée en avril 1874 ; à cette nouvelle, Verlaine montre les signes d'une grande dépression et, très vite, s'opère l'« extraordinaire révolution » : il se convertit (mai-juin) et en septembre, il écrit la suite de sonnets « Jésus m'a dit... ». À sa sortie, il rejoint Rimbaud, alors précepteur à Stuttgart, avec l'intention, semble-t-il, de lui faire partager sa foi ; les retrouvailles tournent court et, dès mars, Verlaine est à Londres, puis s'installe à Stickney, dans le Lincolnshire. À quelques interruptions près, il séjourne en Angleterre (Boston, Bournemouth) de mars 1875 à septembre 1877, où il rencontre Germain Nouveau (été 1875) et compose plusieurs pièces de Sagesse et d'Amour (1876), ainsi que du recueil Cellulairement.