Dictionnaire de la Littérature 2001Éd. 2001
C

Chauvet (Marie)

Romancière haïtienne (Port-au-Prince 1916 – New York 1973).

Sous son nom de jeune fille, Marie Vieux, puis sous son nom de femme mariée, elle a publié quatre romans : Fille d'Haïti (1954), de tonalité psychologique ; la Danse sur le volcan (1957), roman historique ; Fonds des nègres (1961), roman paysan ; Amour, Colère et Folie (1968), trilogie sur la terreur duvaliériste, qui est son œuvre majeure. Ce puissant roman de dénonciation politique ne sera pas réédité, les droits en ayant été rachetés.

Chavée (Achille)

Poète belge de langue française (Charleroi 1906 – La Hestre 1969).

Il fonde (1934) le groupe « Rupture » sous le signe de la révolution et du surréalisme, dans la ligne de Breton. Après avoir publié ses premiers recueils (le Cendrier de chair, 1936), il s'engage dans les Brigades internationales, puis fonde avec Dumond le « Groupe surréaliste en Hainaut » (1939). Pratiquant l'écriture automatique (la Question de confiance, 1940) ainsi que d'autres jeux surréalistes, il estime cependant que l'expérience intérieure prime. En quête d'une vérité insaisissable, son lyrisme insurrectionnel allie l'humour noir à une métaphysique sauvage. Le « colloque des contraires » convoqué dans ses textes culmine dans ses aphorismes (Décoctions, 1964).

Chávez Alfaro (Lizandro)

Écrivain nicaraguayen (Granada 1929 – Managua 2006).

Fondateur du front révolutionnaire Sandino (1950), ambassadeur du Nicaragua en Hongrie durant plusieurs années, il demeure l'une des figures littéraires les plus importantes de son pays. Il s'est inspiré de la réalité politique et sociale de sa terre natale dans ses nouvelles (les Singes de San Telmo, 1963) et ses contes (Treize Fois jamais, 1977), récits pleins de violence, d'images baroques et d'un humour féroce. Dans son roman Avale-moi, Terre (1969), il traite du conflit des générations.

Chawaf (Chantal)

Écrivain français (Paris 1948).

S'inscrivant dans un féminisme de la différence, elle rompt avec la parole des hommes pour renouer avec le mythe et le conte (elle s'en explique dans le Corps et le Verbe, 1992). Depuis Retable-Rêverie (1974), elle raconte l'histoire de la femme et de l'intimité féminine, soumise à la violence masculine (Rédemption, 1989), donnant la vie à un enfant (la Vallée incarnate, 1989), retrouvant sa plénitude en temps de guerre (le Soleil et la Terre, 1977), jouissant de l'espace domestique (Blé de semences, 1976), luttant contre la maladie (Rougeâtre, 1978), recherchant l'aimé (Landes, 1980 ; Vers la lumière, 1993).

Chawqi (Ahmad)

Poète égyptien (Le Caire 1868 – id. 1932).

Poète de cour, il connut un temps l'exil (1914-1917). À son retour, il acquit une popularité qui lui valut son surnom d'amîr al-chu'arâ' (Prince des poètes) – 'Abd al-Wahhâb a chanté nombre de ses poèmes. Il est considéré comme le chef de file de la mouvance arabe néoclassique en poésie (al-Chawqiyyât). Il écrivit aussi des drames historiques en vers (Ali Bey le Grand, 1894 ; Majnûn Laylâ, 1916 ; la Mort de Cléopâtre, 1917 ; Antara, 1932) et en prose (la Princesse d'Andalousie, 1932).

chayavad

Littéralement « ombrisme », mouvement poétique indien de la première moitié du XXe s., en hindi, inspiré du romantisme anglais. Chaya (ombre, reflet) représente l'image de l'objet vu à travers la subjectivité du poète. Nirala, S. N. Pant, J. S. Prasad, Mahadevi Varma en sont les principaux représentants.

Chazal (Malcolm de)

Écrivain mauricien de langue française (Vacoas 1902 – Curepipe 1981).

Ingénieur sucrier en Louisiane, il publie à Maurice, après un séjour à Cuba et un voyage en France entre 1939 et 1945, sept volumes de Pensées, où il trouve peu à peu le ton fulgurant d'une révélation prophétique. Grâce à A. Breton et à J. Paulhan (qui reconnaissent en lui une sorte de météore poétique), il fait éditer à Paris Sens plastique (1948) et la Vie filtrée (1949). Par la suite, il publiera surtout chez les éditeurs confidentiels de l'île Maurice (Petrusmok, 1951 ; Sens magique, 1956 ; Sens unique, 1974), et parfois à Paris (Poèmes, 1958 ; l'Homme et la Connaissance, 1974), menant parallèlement une carrière de peintre, dont les tableaux de style naïf surprennent ses compatriotes. Influencée par la tradition occultiste (Swedenborg) et les rêveries de R.-E. Hart sur la « Lémurie » mythique, l'œuvre de Chazal peut se lire comme un récit d'initiation. La pratique obstinée de la métaphore et de la synesthésie développe, dans des aphorismes abrupts et insolites, une systématique de l'analogie, pour mettre au jour les correspondances universelles et un processus d'hominisation général de la nature. Dans les cosmogonies inspirées, l'île Maurice se révèle le lieu magique absolu, à la fois paradis retrouvé, monde des fées et de l'enfance maîtresse.

Chedid (Andrée)

Écrivain de langue française (Le Caire 1920).

Elle passe son enfance au Liban et vit à Paris depuis 1946 ; elle écrit des poèmes d'abord en anglais, puis en français. La poésie est pour elle un rempart contre la brutalité du monde, et le lieu d'un équilibre entre le mot et le silence ; il s'agit de voir au-delà du monde (Par delà les mots, 1995) et au-delà du visage (Seul le visage, 1960 ; Visage premier, 1972) pour en soustraire quelque chose à la mort, thème omniprésent dans l'œuvre. Ses romans sont marqués par la recherche des racines (la Maison sans racines, 1985) et le désir de retrouver la compassion dans un monde fragile : le Sixième Jour (1960) raconte le combat d'une vieille femme pour sauver son petit-fils du choléra ; Petite Terre, vaste rêve (2002) rassemble de courts récits qui montrent l'éparpillement des conditions humaines. Le roman est aussi une tentative pour dégager la dimension mythique du quotidien (Nefertiti, 1974 ; la Femme de Job, 1993). Avec l'Enfant multiple (1989), qui illustre la recherche du bonheur d'un enfant d'origine à la fois musulmane et chrétienne, le thème de la violence et de la mort, sur fond de guerre au Moyen-Orient, devient plus obsédant. Message (2000) raconte lyriquement la tragédie de la guerre, à travers la tentative d'une jeune fille blessée dans le dos pour rejoindre un homme. On ne peut cependant parler d'engagement politique ni d'une écriture de l'exil : l'auteur tente de saisir la dimension humaine comme un espace de recueillement toujours menacé par la guerre, la maladie, la mort, mais toujours rempli d'espoir, dans la grande tradition humaniste.