Dictionnaire de la Littérature 2001Éd. 2001
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popularisme (popularismo)

Courant littéraire espagnol désignant une tendance à puiser dans la tradition orale, le folklore, et présent dans les romanceros, dans certains Cancioneros, dans les coplas anonymes et les satires politiques du XVe siècle ; chez Juan del Encina et Gil Vicente au XVIe siècle. Ce fut une source d'inspiration pour Lope de Vega, Góngora, Quevedo et, au XXe siècle, pour certaines œuvres d'Antonio Machado, de García Lorca et, surtout, de Rafael Alberti.

populisme

Le mot populisme a été lancé en France dans le quotidien l'Œuvre, le 27 août 1929, par Léon Lemonnier (1890-1953). Il est emprunté au vocabulaire politique russe où il désigne un mouvement d'intellectuels qui, vers 1870, « allaient au peuple ». Comme courant littéraire et politique (s'y mêlaient des recherches folkloriques), il émigra vers la Hongrie et la Roumanie entre les deux guerres mondiales. Mais le « populisme » français – qui faillit se nommer l'humilisme – se veut sans aucun dessein religieux, politique ou social. Dans l'esprit de son créateur, il s'agit surtout d'en finir avec la comédie parisienne et bourgeoise, avec l'introspection, « l'analyse des âmes » et toute une littérature mondaine encore très prisée. Le populisme tend pour cela à fuir l'intrigue romanesque – ce qui le place à l'opposé de la littérature populaire – au profit de la « tranche de vie » de petites gens – cette tranche fût-elle une vie entière – et cherche plus à montrer qu'à expliquer. Le cinéma (René Clair avec Sous les toits de Paris en 1930 et le Million en 1931, Marcel Carné avec Hôtel du Nord en 1938) a pu joué un rôle dans ce besoin de coller à la réalité quotidienne la plus banale, dans l'intrusion de la rue et de son peuple comme décor privilégié. Le grand précurseur selon Lemonnier lui-même fut Maupassant, tout au moins celui des nouvelles. Prolongement du naturalisme, le populisme condamne toutefois les outrances mélodramatiques inhérentes à la manière de Zola. L'influence de Gorki, surtout de ses œuvres antérieures à la Révolution de 1917, est également sensible, comme celle de Lucien Descaves (1861-1949), d'André Thérive (1891-1967), de Jules Renard (Poil de Carotte, 1894), d'Ernest Pérochon (Nêne, prix Goncourt 1920) et même d'Anatole France (Crainquebille, 1901). Lemonnier reconnaîtra toutefois qu'il n'y a pas d' « école populiste » mais un ensemble de tendances. On parlera ainsi de populisme à propos de la Belle Marinière de Marcel Achard ; Eugène Dabit, pour la parution d'Hôtel du Nord (1929), se trouve annexé quelque peu malgré lui ; le triomphe de Topaze de Marcel Pagnol (1928-1930) est mis de même au compte du populisme. Le comble de la confusion sera atteint lorsque Sartre recevra en 1940 le prix du Roman populiste pour son recueil de nouvelles le Mur, prix qui avait récompensé avec plus de raison à sa création Faubourg Saint-Antoine de Tristan Rémy (1931) – encore que celui-ci se classât alors parmi les écrivains « prolétariens ».

Poradeci (Lazar Gusho Poradeci, dit Lasgush)

Poète albanais (Pogradec 1889 – 1987).

Traducteur de Pouchkine et de Maïakovski, il est l'auteur de recueils d'inspiration patriotique (le Vingt-Huit Novembre) et philosophique (la Danse des étoiles).

Porchères (Honorat de Laugier, sieur de)

Poète français (Forcalquier 1572 – Paris 1653).

Poète maniériste apprécié sous Henri IV, il écrivit un ballet, une tragédie tirée de l'Âne d'or d'Apulée, un volume de Cent Lettres d'amour (1646). Mais, victime du discrédit de la poésie post-Renaissance, il ne passa à la postérité que comme un faiseur de « pointes » ridicules, à cause de son sonnet « Sur les yeux de Madame la marquise de Montceaux », considéré par la génération classique comme un exemple parfait de mauvais goût.

Porta (Paolazzi Leo, dit Antonio)

Écrivain italien (Milan 1935 – Rome 1989).

Membre des avant-gardes italiennes (Novissimi et Groupe 63), il fait dans sa poésie une analyse détaillée des objets (Tout ce que j'ai à vous dire, 1977 ; Pas et passages, 1980 ; Invasions, 1984).

Porta (Carlo)

Écrivain italien (Milan 1775 – id. 1821).

Le réalisme de sa poétique, en dialecte milanais, s'enracine dans une conscience politique progressiste et s'exprime avec un égal bonheur dans la représentation bonhomme du petit peuple (les Malheurs de Giovannin Bongee, 1812 ; la Ninetta du Verger, 1814) et dans la satire anticléricale (la Nomination du chapelain, 1819).

Porter (Katherine Ann)

Romancière américaine (Indian Creek, Texas, 1890 – Silver Spring, Maryland, 1980).

Ses nouvelles (l'Arbre de Judée, 1930 ; la Tour penchée, 1944) et ses romans (Cheval blanc, cavalier blanc, 1939) témoignent d'une inspiration autobiographique alliant mémoire et symbolisme. Son imaginaire, nourri de références sudistes, avoue l'obsession de la beauté et la conscience de la tradition. La Nef des fous (1962) couronne l'œuvre : un voyage transatlantique vers l'Allemagne nazie tisse la fable du monde contemporain, où s'assemblent les hommes déboussolés, les justes et les prolétaires. Cette stratification emblématique suggère un univers déjà concentrationnaire ; la psychologie individuelle dit implicitement l'histoire collective. De cette perception antagoniste du réel, Katherine Ann Porter a tiré, dans ses essais (les Jours d'avant, 1952 ; Essais et écrits, 1970), une esthétique de rigueur et l'affirmation du pouvoir salvateur du mot.

Porto-Riche (Georges de)

Auteur dramatique français (Bordeaux 1849 – Paris 1930).

Il débuta par des poésies (Prima verba, 1872 ; Tout n'est pas rose, 1877) puis se tourna vers le théâtre, où il donna d'abord des pièces romantiques (Un drame sous Philippe II, 1875 ; Vanina, 1878). Il se fit le spécialiste du conflit entre l'homme, réticent et infidèle, et la femme, dont le besoin d'amour et d'absolu fait d'elle sa propre ennemie : l'amour, ici, est charnel, et l'intelligence des situations est en grande partie celle du corps, qu'il s'agisse de la rage ou de l'impuissance d'aimer (la Chance de Françoise, 1889 ; Amoureuse, 1891 ; le Passé, 1897 ; les Malefilâtre, 1904 ; le Vieil Homme, 1911 ; le Marchand d'estampes, 1917).