Dictionnaire de la Littérature 2001Éd. 2001
N

Nihon Shoki
(Chroniques du Japon)
ou Nihongi
(Chroniques du Japon)

Première des « six histoires nationales » japonaises (rikkokushi). Compilées sur ordre de l'impératrice Genmei par une commission dirigée par le prince Toneri, ces chroniques dynastiques officielles relatent l'histoire japonaise de l'âge des dieux à la fin du règne de l'impératrice Jitô, en 697. Le Nihongi fut achevé en 720, soit huit ans à peine après le Kojiki, mais, à la différence de ce dernier, il fut entièrement rédigé en chinois et accorde une place bien moins grande à l'histoire mythique.

Nijhoff (Martinus)

Écrivain hollandais (La Haye 1894 – id. 1953).

S'il emprunta, à ses débuts poétiques, à l'expressionnisme (le Promeneur, 1916) comme à une fantaisie proche du surréalisme (Pierrot à la lanterne, 1919), il se forgea, dans la crise spirituelle de l'après-guerre, un langage original (Formes, 1924 ; Nouveaux Poèmes, 1934) où la sensation du mystère sensible derrière le plus humble quotidien (Awater, 1934) débouche sur la présence du Christ, saisie à la fois dans l'esprit d'enfance retrouvé et l'illumination poétique (l'Heure H, 1936). Auteur dramatique (l'Étoile de Bethléem, 1942), critique (la Plume sur le papier, 1927), il a laissé de remarquables traductions d'Euripide, Shakespeare, Eliot et Gide.

nikki (notes journalières)

Genre littéraire japonais né des notes journalières rédigées en chinois par des lettrés ou des hauts fonctionnaires. Il connaît une période d'apogée aux Xe et XIe s. sous la forme du journal poétique, rédigé en prose japonaise (uta-nikki ou kana nikki), dont le Tosa nikki offre le plus ancien exemple. À ce genre classique, parfois très proche du « journal de voyage » (kiko), s'est substituée à l'époque moderne une forme plus proche du journal occidental, où se sont illustrés des écrivains comme Mori Ogai ou Natsume Soseki.

Nima Youchidj (Ali Esfandryari, dit)

Écrivain iranien (Youch, Mazandaran, 1897 – Téhéran 1959).

Pionnier de la poésie persane moderne, il trouve dans son village natal bien des images de sa poésie. Il a rompu avec la tradition par l'usage du vers libre et, sous l'influence de la poésie française romantique et parnassienne, par l'invention d'une expression lyrique originale qualifiée par certains d' « égotisme romantique » (le Conte pâle, 1921 ; Afsané, 1922, un équivalent des Fleurs du mal), qui évolua vers une tonalité plus réaliste et sociale (la Famille du soldat, 1925 ; Prison, 1935 ; Une mère et un fils, 1945 ; le Gardien de nuit, 1947). À partir des années 1930, il se tourna vers le surréalisme et le symbolisme (Phénix, 1937) et sa poésie devint intellectuelle et abstraite.

Nimier (Roger)

Écrivain français (Paris 1925 – dans un accident d'automobile 1962).

Sa mort, aux côtés de Sunsiaré de Larcône, fit de lui un James Dean qui serait aussi un moraliste atteint de langueur, dans la lignée de Rigaut et de Drieu La Rochelle. Une qualité de ton et un certain anticonformisme seront la marque des « grognards et hussards », J. Laurent, A. Blondin, R. Nimier et, ensuite, M. Déon. Pour Nimier et Blondin, Kleber Haedens, Stephen Hecquet ou Éric Ollivier, la littérature et l'amitié sont indissociables. Attiré comme d'autres jeunes écrivains de droite par les écrivains maudits au sortir de la Seconde Guerre mondiale, il aura comme intercesseurs Bernanos, Chardonne, Morand, Montherlant et Céline, qu'il contribuera à ressusciter chez Gallimard, où il deviendra conseiller littéraire. S'il s'engage vraiment en 1945 dans le régiment des hussards, c'est par hantise de l'action. Les Épées (1948) sont le livre insolent d'un rebelle sans cause et le rêve des guerres qu'il ne fit pas. Le héros du Hussard bleu (1950) est un bien « mauvais survivant », indifférent aux affaires humaines. Ce livre lui assurera la célébrité. Les Enfants tristes (1951) seraient le portrait sentimental d'une génération en porte-à-faux dans l'histoire, soucieuse de défendre un esprit hexagonal, mélancolique et dandy. Toutefois, Nimier conquiert le milieu littéraire avec méthode, passant de la revue la Table ronde, tenue par François Mauriac, pour contrer l'existentialisme, à Opéra, journal de la vie parisienne, dont il sera rédacteur en chef. Le journalisme comme exercice de vélocité lui sera un antidote contre la tristesse. Mais il semble désenchanté du monde parisien, sans jamais pourtant devenir un voyageur. Au double discours des bourgeois et des révolutionnaires, tous triomphants (le Grand d'Espagne, 1950), Nimier oppose une écoute aristocratique, un scepticisme qui n'interdit pas l'indignation, une lucidité désenchantée (Amour et Néant, 1951 ; Histoire d'un amour, 1953). Après sa mort ont paru deux romans (D'Artagnan amoureux ou Cinq Ans avant, 1962 ; l'Étrangère, 1968), des essais critiques (Journées de lecture, 1965 ; l'Élève d'Aristote, 1981) et, récemment, des chroniques et des nouvelles.

Nin (Anaïs)

Femme de lettres américaine (Neuilly-sur-Seine 1903 – Los Angeles 1977).

Partagée entre des cultures différentes, espagnole et danoise, elle fait de cet écart un moyen d'exploration de la vie intérieure et rapporte son déracinement à la recherche du père et à l'affirmation des pouvoirs de la féminité. Son Journal (1966-1980), composé en français puis en anglais, témoigne de cette quête du moi, qui commande l'écriture et suscite le dessin d'une impersonnalité féminine et psychanalytique. Cette confession quotidienne produit un mythe de l'artiste, héros auquel il est donné de se racheter et d'acquérir une perception syncrétique du monde. Les nouvelles et les romans (la Maison de l'inceste, 1936 ; Sous une cloche de verre, 1944 ; les Miroirs dans le jardin, 1946 ; Une espionne dans la maison de l'amour, 1954 ; Séduction du Minotaure, 1961) définissent une littérature fantasmatique symétrique de celle d'Henry Miller, avec qui Nin écrivit des Contes érotiques. Les essais du Roman de l'avenir (1968) affirment cette pertinence de l'inconscient.

ningyo-joruri

Genre dramatique japonais combinant la manipulation des marionnettes (ningyo) avec le type de récitation connu depuis le XVIe s. sous le nom de joruri. C'est dans les premières années de l'époque d'Edo (1603-1867) que les récitants commencent à s'associer aux marionnettistes et aux musiciens de shamisen (luth à trois cordes d'origine chinoise) pour créer un art qui va connaître dès la fin du XVIIe s. sa plus haute expression, sous l'action conjuguée du récitant Takemoto Gidayu, qui fonde en 1684 à Osaka la salle du Takemoto-za, et de l'auteur dramatique Chikamatsu Monzaemon. Le XVIIIe  siècle est caractérisé par de nombreux perfectionnements techniques. Les poupées deviennent bientôt des mécanismes lourds et complexes dont la manipulation doit être confiée (1734) à trois marionnettistes. L'action coordonnée de ces artistes encapuchonnés de noir, apparaissant à vue derrière la grande poupée, entraîne un mélange unique de réalisme gestuel et de théâtralité. Trois grands spectacles donnés coup sur coup au Takemoto-za sous la direction du dramaturge Takeda Izumo : Yoshitsune et les mille cerisiers (1746), les Secrets de la calligraphie de Sugawara (1747) et, surtout, le Trésor des vassaux fidèles (1748), immédiatement adaptés avec un vif succès au kabuki, marquent pour le théâtre de marionnettes et l'apogée et le commencement de la fin. En 1767, le Takemoto-za cesse de se consacrer exclusivement au théâtre de poupées. Le récitant Uemura Bunrakuken fonde vers 1800 une salle qui finira par prendre en 1872 le nom de Bunraku-za, et constituera, à partir du début du XXe s., le seul théâtre dépositaire de la tradition du ningyo-joruri d'Osaka.