Dictionnaire de la Littérature 2001Éd. 2001
A

Amrouche (Jean)

Écrivain algérien, né dans une famille française par naturalisation (Ighil Ali, Petite Kabylie, 1906 – Paris 1962).

Fils de Fadhma Aït Mansour (1882-1967), qui, élevée dans une des premières écoles de filles d'Algérie, puis mariée à un Kabyle chrétien, a laissé des Mémoires (Histoire de ma vie, 1968), il est célèbre pour ses entretiens radiophoniques avec des écrivains (Gide, Mauriac, Claudel, Ungaretti). Il fut l'un des fondateurs de la revue l'Arche. C'est aussi un poète (Cendres, 1934 ; Étoile secrète, 1937), un traducteur (Chants berbères de Kabylie, 1939) et un essayiste : l'Éternel Jugurtha (1946), « propositions sur le génie africain », fait du roi numide « le Berbère sous sa forme la plus accomplie » et représente le contre-mythe de « l'éternel Méditerranéen » de L. Bertrand, et même de G. Audisio et de Camus.

Amrouche (Marie-Louise, dite Taos)

Femme de lettres algérienne, née dans une famille chrétienne de Kabylie (Tunis 1913 – Saint-Michel-l'Observatoire, Provence, 1976).

Sœur de Jean Amrouche et fille de Fadhma Aït Mansour Amrouche, dont elle a publié l'Histoire de ma vie (1968), cantatrice et interprète de la tradition orale berbère – en grande partie recueillie de la bouche de sa mère (le Grain magique, 1966 ; Chants berbères de la meule et du berceau, 1975) – elle a exprimé dans ses romans le drame de la marginalité (Jacinthe noire, 1947 ; Rue des tambourins, 1960 ; l'Amant imaginaire, 1975).

Amyot (Jacques)

Écrivain français (Melun 1513 – Auxerre 1593).

Amyot est le seul écrivain français qui doive l'essentiel de sa réputation à son activité de traducteur. Issu d'une famille de bourgeois et d'artisans, le jeune Amyot fit ses études à Paris, au collège fondé par le cardinal Lemoine. Reçu maître ès arts en 1532, il suit au Collège royal les cours de Vatable, Danès, Toussain et Oronce Finé. En 1535, Jacques Colin, lecteur du roi François Ier, lui confie le préceptorat de ses enfants. Amyot s'installe alors à Bourges, où il fonde une école, avant d'obtenir, en 1536, dans la même ville, un poste de lecteur de grec à l'université, qu'il conservera jusqu'en 1546. En 1547, il présente sa traduction de l'Histoire éthiopique d'Héliodore à François Ier, qui lui confie celle de Plutarque. Cette mission le conduit, de 1547 à 1552, à parcourir les bibliothèques italiennes pour s'y livrer à de longs et minutieux travaux destinés à établir le texte des Vies. À son retour, il donne, en 1554, une traduction de Sept Livres des Histoires de Diodore, à laquelle succèdent les honneurs : chargé, en 1557, de l'éducation des ducs d'Orléans et d'Anjou (les futurs Charles IX et Henri III), il est, en 1560, nommé grand aumônier de France, puis, en 1570, évêque d'Auxerre. C'est l'époque où il donne, outre la traduction, en 1559, des Amours pastorales de Daphnis et Chloé de Longus, ses fameuses traductions des Vies des hommes illustres (1559) et des Œuvres morales et mêlées (1572) de Plutarque.

   Les traductions d'Amyot sont un des chefs-d'œuvre de l'humanisme érudit. Elles occupent aussi une place importante dans l'histoire des lettres françaises : signalons, entre autres, l'influence déterminante que ses traductions de Plutarque exercèrent sur Montaigne (« c'est notre bréviaire », Essais, II, IV) et les moralistes classiques, et celle, plus durable encore, que ses traductions des romans grecs eurent, par les modèles narratifs qu'elles fournirent, sur les romans de la seconde moitié du XVIe et du XVIIe s.

   Son Projet d'éloquence royale, composé entre 1570 et 1580 (il ne sera publié qu'en 1805) à l'intention d'Henri III et en liaison avec les travaux de l'Académie du Palais, transpose le De elocutione de Démétrios de Phalère, à travers les commentaires de Pietro Vettori, en l'associant à la tradition pétrarquiste de la Cour : Amyot a par là contribué à fonder l'humanisme de cour français et à fixer la ligne d'évolution du langage de cour au XVIIe s.

An-Ski (Shloyme Zaïnvl Rapoport, dit)

Écrivain et folkloriste de langue yiddish (Tchachnik, Biélorussie, 1863 – Varsovie 1920).

Il participa au mouvement populiste russe, vécut à Paris (1894-1905) et fut l'initiateur d'une expédition ethnographique (1911-1914) dans les bourgades juives de Volhynie et de Podolie. Sa connaissance du folklore anime sa légende dramatique en 4 actes, le Dibbouk, mise en scène par la Vilner Troupe en 1920.

Anacréon

Poète grec (Téos, VIe s. av. J.-C.).

Il vécut à la cour des tyrans Polycrate de Samos et Hipparque d'Athènes. Poète de l'amour, du vin et des banquets, il est l'auteur d'épigrammes ainsi que d'odes et de chansons de circonstance, au style gracieux, ironique, parfois mélancolique. Le recueil des Odes anacréontiques, que lui attribuait la tradition, contient une soixantaine de poèmes d'époque romaine, à l'influence importante.

anacréontiennes (Odes)
ou Odes anacréontiques

Recueil d'une soixantaine de poèmes d'époque romaine, conservés dans l'Anthologie Palatine, imitant les Odes d'Anacréon.

Les poètes de la Pléiade, en particulier Ronsard, se sont inspirés de cette poésie érudite et légère, à partir de l'édition et de la traduction latine d'Henri Estienne (Anacreonteis Teii Odae, 1554) et de l'adaptation française de Rémi Belleau (Odes d'Anacréon Teien, 1556).

anacréontisme

Le mot, formé à partir du nom du poète grec Anacréon de Téos, désigne non un genre mais une manière et un style poétiques fondés sur une philosophie de la vie, qui retient ses aspects et ses moments les plus agréables, en connaissant ce qu'ils ont d'éphémère. Cette poésie fleurit dans les cours hellénistiques (les Alexandrins), puis à Rome (Catulle). La Renaissance française, à la suite de l'édition d'Anacréon par H. Estienne (1554), remit en vogue l'œuvre grecque, qu'adapta Rémi Belleau et dont Ronsard s'inspira (le Bocage de 1554). Après les Italiens (Guarini) et les Espagnols (Gutierre de Cetina, Cadalso, Meléndez Valdés), l'anacréontisme est cultivé par les poètes français du XVIIIe  s. (Chaulieu, Parny) ou, en Allemagne, par le cercle de Halle (Gleim, Uz, Götz), jusqu'à ce que Chénier (Bucoliques) ait restitué l'esprit du modèle grec. Délaissé depuis la traduction des Odes anacréontiques (1861) par Leconte de Lisle, l'anacréontisme est encore sensible dans l'œuvre poétique de Pierre Louys (Astarté, 1893).