Dictionnaire de la Littérature 2001Éd. 2001
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D'Astros (Jean-Géraud)

Écrivain occitan (Saint-Clair-de-Lomagne 1594 – id. 1648).

Curé de village, ami de Goudelin, il composa une poésie relève surtout d'un exercice de style, mais qui ne manque ni d'esprit, ni de verve populaire, ni parfois d'étrangeté baroque (Lou beray e naturau gascou en las quate sasous de l'an [le Véritable et naturel gascon dans les quatre saisons de l'année], 1636 ; Lou trioumfe de la lengua gascouno am playdeiatz deus quate elemens daouant lou pastou de Loumaigne [le Triomphe de la langue gasconne avec les plaidoyers des quatre éléments devant les bergers de Lomagne], 1640 ; La scolo deu chrestian idiot ou petit catachisme gascoun heit en rithme [l'École du simple chrétien ou Petit Catéchisme gascon mis en vers], 1645). Il est aussi l'auteur de Noëls réalistes où il met en scène les gens de son pays.

Däubler (Theodor)

Poète autrichien (Trieste 1876 – Sankt Blasien, Allemagne, 1934).

Précurseur de l'expressionnisme, il s'attacha aux traditions mythologiques à travers les thèmes majeurs de la « métamorphose » et de la « régénération ». Son œuvre lyrique (Hymne à l'Italie, 1916 ; Sonnets attiques, 1920 ; Péan et dithyrambe, 1924) témoigne du renouveau mythologique (Klages, Schuler, Mombert). Son épopée symboliste, l'Aurore boréale, publiée en 1910 et remaniée en 1921, se veut une cosmogonie moderne : la Terre redeviendra un astre lumineux habité de l'esprit, l'aurore boréale annonce la « trans-naissance » (Umgeburt) du moi.

Daudet (Alphonse)

Écrivain français (Nîmes 1840 – Paris 1897).

Ce méridional quitte le Midi très tôt pour Lyon, puis Paris. L'écrivain commence sa carrière par des poésies et des œuvres dramatiques, mais c'est comme chroniqueur au Figaro, à l'Événement qu'il se fait connaître en y publiant les textes recueillis dans les Lettres de mon moulin (1869) ou Contes du lundi (1873) ; il se mêle aux polémiques du temps (en participant par exemple au Parnassiculet contemporain en 1866) avant de définir son projet – décrire « des milieux strictement vrais, copiés d'après nature » – et d'établir un parallèle avec les peintres et leurs carnets de croquis (« Je n'eus jamais d'autre méthode de travail »). Il fréquente Flaubert, Zola, et la veine réaliste se déploie dans des romans comme Fromont jeune et Risler aîné (1874), le Nabab (1877), les Rois en exil (1879), Numa Roumestan (1881) ou l'Immortel (1888), autant d'études sur les industriels, les aristocrates, les politiciens, les hommes de lettres : « Toutes ses œuvres sont prises en pleine vie moderne », dit Zola. On a fait de Daudet des lectures réductrices en voyant en lui un écrivain régionaliste ou un romancier pour enfant. Cet indépendant appartient à l'école des écrivains de la représentation du réel par sa thématique comme par son écriture impressionniste, qui privilégie la sensation et se rapproche de l'écriture artiste des frères Goncourt. Mais son œuvre fait une large place à l'autobiographie, ce qui explique sa tonalité très personnelle ; il apporte une sensibilité à l'éphémère, au discontinu qui est la marque de son scepticisme. On a souvent exagéré la part du pathétique ; sous la compassion qui transparaît dans le Petit Chose (1868) ou les Contes du lundi (1873) perce une ironie caustique. Et le rire éclaire l'œuvre, sourire scintillant des Lettres de mon moulin (1866) ou éclat de rire du cycle de Tartarin de Tarascon (entrepris en 1872), illuminé par le soleil méridional, source d'inspiration de l'auteur qui lui fournit en outre le tragique de l'Arlésienne (1872) ou de son dernier conte, le Trésor d'Artalan (1897), construit autour du thème de la dépravation destructrice. Les conclusions édifiantes et les diverses tonalités du rire tentent de conjurer une angoisse fascinée devant la corruption conçue comme le formidable attrait d'un érotisme polymorphe, d'un sensualisme triomphant. Le faible succombe toujours à la tentation, celle de la femme perverse (Sapho, 1884), celle de la nourriture délectable (« les Trois Messes basses », dans les Lettres de mon moulin), celle du confort moelleux (Tartarin). La légende de Daudet, écrivain pour la jeunesse (alors que Jack, en 1876, trop vite comparé à David Copperfield, stigmatise le pouvoir mortifère de la femme autant qu'il déplore le malheur d'une enfance désemparée) ou privilégiant le chantre de la Provence pittoresque, a probablement contribué à isoler l'écrivain dans son siècle et à faire oublier, à côté des faiblesses du romancier ou du dramaturge (Daudet composa dix-sept pièces, dont plusieurs issues de ses romans), le talent du conteur, et, surtout, sous les galéjades grotesques de Tartarin, l'éclat vivifiant du mythe. On lira également avec intérêt son journal la Doulou (posthume), introspection sans concession de son expérience de la maladie. – Sa femme, Julia Allard (Paris 1844 - Chargé, Indre-et-Loire, 1940), fut une collaboratrice efficace. L'étude des manuscrits montre le rôle important qu'elle a joué dans l'écriture de ses livres.

Daudet (Léon)

Journaliste et écrivain français (Paris 1867 – Saint-Rémy-de-Provence 1942).

Fils d'Alphonse Daudet, il fit des études de médecine qui lui inspirèrent ses premiers romans (les Morticoles, 1894), où il témoigne d'emblée de son irrespect des valeurs établies, de la science officielle et de son tempérament de polémiste. Après un premier mariage avec Jeanne Hugo, la petite-fille du poète (la Mésentente, 1911), il épouse sa cousine Marthe Allard et affirme son engagement nationaliste et monarchiste en devenant (1908) le rédacteur en chef de l'Action française puis, en 1907, son codirecteur avec Maurras : il déploie dans ses colonnes une verve truculente, qui sera aussi la marque de son action politique comme député de Paris (1919-1924). La mort mystérieuse de son fils Philippe (1923) l'entraîne dans un procès en diffamation qui lui vaut un siège en règle dans les locaux de son journal, une incarcération à la Santé et une évasion spectaculaire (1927) : il se réfugiera alors en Belgique jusqu'en 1930. Il combattit pour ses amis littéraires (Valéry, Proust, Bernanos, Céline, Lugné-Poe) avec la même vigueur et la même outrance qu'il déployait contre ses ennemis politiques. Outre d'innombrables récits, articles et pamphlets (le Stupide XIXe Siècle, 1922), il a laissé des essais critiques et des recueils de souvenirs (Études et Milieux littéraires, 1927 ; Écrivains et Artistes, 1929 ; Mes idées esthétiques, 1939).