Dictionnaire de la Littérature 2001Éd. 2001
B

Brissot de Warville (Jean-Pierre Brissot, dit)

Écrivain français (Chartres, 1754 - Paris 1793).

Ses travaux juridiques (Recherches philosophiques sur le droit de propriété et sur le vol, 1780) sont marqués par l'esprit des Lumières. C'est aux États-Unis qu'il découvrit l'esclavage et qu'il devint défenseur des Noirs dans la Société des amis des Noirs. La Révolution fit de lui une figure marquante de la Gironde. Journaliste au Patriote français, il fut attaqué par Camille Desmoulins dans le pamphlet Brissot démasqué (1792), poursuivi par la Montagne et exécuté.

Brisville (Jean-Claude)

Écrivain français (né en 1922).

Journaliste littéraire, directeur littéraire chez de grands éditeurs, il commence par écrire des essais (la Présence réelle, 1954 ; Camus, 1959), puis des romans : Prologue (1948), la Fuite au Danemark (1962), la Révélation d'une voix et d'un nom (1982). Mais c'est son écriture théâtrale qui l'a vraiment révélé. Après le Fauteuil à bascules (1982), mise en scène amère du monde de l'édition, il connut le succès avec trois pièces aux personnages historiques : l'Entretien de M. Descartes avec M. Pascal le jeune (1985), affrontement de deux philosophies, le Souper (1989), qui fait dialoguer Talleyrand et Fouché, et enfin l'Antichambre (1991), face à face de Mme du Deffand et de Julie de Lespinasse.

Brizeux (Auguste)

Poète français (Lorient 1803 – Montpellier 1858).

Attaché à sa terre natale, il l'a chantée sur tous les tons, de l'épique (les Bretons, 1843) au lyrique (Marie, 1831-1840), en français et en breton (Telenn Arvor [la Harpe d'Armorique], 1839 ; Furnez Breiz [la Sagesse de Bretagne], 1844). Brumes marines, forêts enchantées, landes ventées sont en effet, chez lui, plus qu'un décor : un personnage mythique, berceau de traditions et de légendes dont le poète se veut tout à la fois le chantre et le descendant, marqué par une mystique du nombre (les Ternaires, 1841).

Brizzi (Enrico)

Écrivain italien (Nice 1974).

Son roman Jack Frusciante a largué le groupe (1994), best-seller en Italie, est une fresque de la jeunesse bolonaise au tournant du siècle. Il a également publié Bastogne (1996) et Trois Garçons imaginaires (1998).

Broadway

Artère new-yorkaise qui devient, en 1920, le centre de la création théâtrale américaine. En 1927, 250 pièces sont montées ; en 1967, moins de 50. Ce déclin correspond au renouveau théâtral sur des bases artisanales et marginales : Broadway et Off Broadway, puis Off Off Broadway. Vieille tradition de rupture attestée dès 1910 par les Little Theatres (Provincetown Players, Washington Square Players, Guild Theatre), et commandée par la nécessité, au lendemain de la Première Guerre mondiale, de diversifier les types de représentation. En même temps que s'impose le star system, et que s'établissent revues musicales et comédies traditionnelles, se constitue ainsi un théâtre d'art influencé par l'Europe. Ce partage s'inscrit dans les conditions de représentation (les belles salles de Broadway ; les petites salles de la périphérie) et de production (à Broadway, primauté du show business, à Off Broadway, petit budget, continuité de travail, autour de l'œuvre et des acteurs). Ainsi naquirent, entre autres, le Living Theatre, le Bread and Puppet Theatre, l'Open Theatre.

Broch (Hermann)

Écrivain autrichien (Vienne 1886 – New Haven, Connecticut, 1951).

Fils d'un industriel du textile, Broch dut d'abord renoncer à sa vocation littéraire et philosophique pour obéir aux vœux de sa famille. En 1927, il vend l'héritage paternel pour se consacrer à une carrière d'écrivain. En 1938, il réussit à quitter l'Autriche pour l'exil américain. L'œuvre de Broch est marquée par la conscience de la « perte des valeurs » (Wertverlust), par son admiration pour l'éthique de Kant et pour l'œuvre de Karl Kraus. Ses essais multiples mais inachevés sur la Psychologie des masses le rapprochent de Freud et de Canetti. Cette œuvre, qui débute dans les années 1928-1931 par la trilogie les Somnambules, portrait féroce de l'époque wilhelminienne (1888, Pasenow ou le Romantisme, 1931 ; 1903, Esch ou l'Anarchie, 1931 ; 1918, Huguenau ou le Réalisme, 1932), souffre de ses propres exigences. Ni les Somnambules, mélange stylistique qui englobe Fontane et Joyce, « l'essayisme » de Musil et un lyrisme mal contrôlé, ni le Tentateur (commencé en 1935), ni l'énorme flot lyrique de la Mort de Virgile (1945), ne répondent réellement aux exigences du « roman polyhistorique » formulées par l'auteur. En revanche, avec Hofmannsthal et son époque, il a composé le grand requiem de l'Autriche-Hongrie.

   La Mort de Virgile, roman commencé en 1937 sous la forme d'une nouvelle (le Retour de Virgile) et achevé en exil en 1944 : il sera publié en 1945 à New York, simultanément en allemand et en anglais. Virgile, mourant à Brindes au retour d'un voyage, veut brûler l'Énéide parce qu'il craint l'abus politique que l'empereur Auguste pourrait faire de l'œuvre artistique. Kafka se dessine en filigrane derrière Virgile ainsi que le problème de la responsabilité de l'artiste devant le monde. Les quatre parties du livre (l'Eau, le Feu, la Terre, l'Éther) se caractérisent par un mysticisme croissant. L'« involution » finale fait entrevoir au poète le « verbe pur » au-delà de tout langage.

Brod (Max)

Écrivain israélien d'origine tchèque et d'expression allemande (Prague 1884 – Tel-Aviv 1968).

Juif pragois, il s'établit en Palestine en 1939 et devint directeur du théâtre Habimah à Tel-Aviv. Journaliste, metteur en scène, compositeur, il fut surtout romancier, essayiste, poète, traducteur. De cette œuvre inégale, il reste surtout les grands romans historiques à problématique religieuse et philosophique (l'Astronome qui trouva Dieu, 1916 ; Reubeni, prince des juifs, 1925 ; la Captivité de Galilée, 1948) et, surtout, le souvenir de son amitié avec Franz Kafka, dont il publia l'œuvre et auquel il consacra une biographie (1937).

Broderzon (Moyshe)

Poète et dramaturge de langue yiddish (Moscou 1890 – Varsovie 1956).

Installé à Lodz (Pologne) en 1918, il y fut pendant vingt ans l'inspirateur de la vie théâtrale et littéraire yiddish. Fondateur de la revue Yung Yidish, il créa et anima, entre 1926 et 1939, le théâtre yiddish Ararat, avec Shimen Dzigan (1904-1980) et Yisroel Schumacher (1908-1961). Broderzon écrivit lui-même la plupart des textes du répertoire.