Dictionnaire de la Littérature 2001Éd. 2001
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Romero (Luis)

Écrivain espagnol (Barcelone 1916).

Il publie un recueil de poésies (Corde raide, 1950) puis, émigré à Buenos Aires, un roman (La Noria, 1951) qui décrit la vie à Barcelone à travers les pensées de multiples personnages. Poursuivant son œuvre de romancier (Lettre d'hier, 1953 ; les Voix anciennes, 1955 ; les Autres, 1956 ; le Cacique, 1963), il écrit également des récits historiques (Tudá, 1957 ; Trois Jours de juillet, 1967 ; la Fin de la guerre, 1976).

Romero (Sílvio Vasconcelos da Silveira Ramos)

Écrivain brésilien (Lagarto, Sergipe, 1851 – Rio de Janeiro 1914).

Conteur (Contes populaires du Brésil, 1883), il est aussi l'auteur d'une vaste analyse de la culture brésilienne (Histoire de la littérature brésilienne, 1888).

Romulo (Carlos Pena)

Homme politique et écrivain philippin (Camiling, près de Tarlac, 1899 – Manille, 1985).

Lié à MacArthur, il fut général américain dans la guerre contre le Japon. Membre de la conférence de San Francisco (1945), président (1949) de l'Assemblée de l'O.N.U., ambassadeur aux États-Unis (1952-53 ; 1955-1962), il fonda le parti démocrate (1953). Il est l'auteur de nombreux essais historiques et politiques (l'Esprit de Bandung, 1956 ; Nationalismes contemporains et équilibre mondial, 1964 ; Explication de l'Asie mystique, 1970) et d'ouvrages autobiographiques (J'ai accompagné des héros, 1961).

Ronsard (Pierre de)

Poète français (château de la Possonnière, Couture-sur-Loir 1524 – Saint-Cosme-en-l'Isle, près de Tours, 1585).

La vie et l'œuvre de Ronsard se situent exactement au milieu du XVIe s. Ronsard porte avec lui les espoirs de toute une génération, celle qui parvient à l'âge d'homme aux environs de 1545. Il croit à la renaissance éclatante de la poésie, favorisée par les rois, nourrie par l'immense travail des érudits qui mettent à la disposition des poètes les trésors des littératures grecque et latine. Il s'attelle à cette tâche, lui et cette « Brigade » enthousiaste de Coqueret qui, sous la houlette de Dorat, comprend aussi Du Bellay, Baïf et d'autres futurs grands noms. Cette génération est profondément nationaliste. Elle n'admet pas que l'Italie seule (ou presque) se soit illustrée de son temps dans les arts et les lettres. D'autre part, elle refuse que les querelles religieuses affaiblissent la patrie. Ronsard, sincèrement catholique, possède cependant assez de lucidité pour se rendre compte de la nécessité d'une réforme interne de son Église. Quand l'espoir de celle-ci s'évanouit en France, quand le conflit religieux devient une guerre civile, il choisit de défendre par la plume – à partir de 1562 – et peut-être même par les armes, la foi de ses aïeux. Mais la violence de ses Discours contre les protestants ne doit pas cacher une amertume profonde devant un pays dévasté par la guerre, une « République des lettres » ravagée par le fanatisme.

   Cette trajectoire, d'autres poètes de son temps la parcourent aussi. Le climat de la poésie de Ronsard est toutefois plus complexe. Dès les années 1550, il est à la fois enthousiaste avec Pindare, qui lui donne le goût de la gloire, et sceptique avec Horace, qui enseigne les chemins d'une sagesse moyenne. Il n'y a pas vraiment d'évolution de Ronsard, mais plutôt une alternance perpétuelle d'états d'enthousiasme et d'états d'abattement. C'est ainsi d'ailleurs qu'il se représente avec son temps la psychologie des créateurs et des artistes. Faute de pouvoir le connaître intimement, nous devons nous contenter de ce « moi exemplaire », semblable à celui des grands mélancoliques nés sous un astre qui les destine en même temps à la joie (celle de l'œuvre) et à la tristesse (qui vient de la conscience des limites de l'homme).

Le poète des Odes

Il commence par un coup d'éclat : les Quatre Premiers Livres des Odes, publiés en 1550, suivis d'un cinquième en 1552. Divisé en 4 livres, ce recueil comprend 94 pièces imitées de Pindare et d'Horace. Les premières, constituées d'une alternance de strophes, d'antistrophes et d'épodes, sont consacrées à la célébration de victoires royales ou à l'éloge de grands personnages ou d'amis écrivains. D'inspiration plus familière, les odes horatiennes prennent pour thèmes des événements relatifs à la vie quotidienne du poète ou à la description de spectacles champêtres. Personne n'avait osé « par un sentier inconnu » imiter Pindare et ses chants solennels en l'honneur des vainqueurs des jeux grecs.

   Ces odes hautaines, somptueuses, martelées, écrites pour être mises en musique, ne furent pas du goût de la Cour, qui chercha à leur opposer la manière plus facile des disciples de Marot. Mais Ronsard avait des admirateurs, notamment la sœur du roi, Marguerite de France ; et surtout il savait renouveler sa manière comme le montrent les Amours de 1552, un « canzoniere », un recueil de poèmes amoureux à la manière des Italiens, qui ne se contente pas d'une analyse quintessenciée du sentiment et fait de l'amour le thème inspirateur par excellence du poète, l'occasion d'un jeu savant avec les mythes et les textes de la culture de son temps.

La poésie amoureuse

À partir de 1560, Ronsard regroupera l'ensemble de ses pièces poétiques d'inspiration amoureuse sous le titre inchangé d'Amours : les Amours (1552-1553), qui célèbrent Cassandre Salviati, une partie du Bocage (1554) et des Mélanges (1555), la Continuation des Amours (1555) et la Nouvelle Continuation des Amours (1556), qui chantent Marie Dupin, les sonnets à Sinope du Second Livre des Mélanges (1559), quelques pièces du Recueil des Nouvelles Poésies (1563), des Élégies, Mascarades et Bergeries (1565) et du Septième Livre des Poèmes (1569), les Amours d'Eurymédon et de Callyrée, les sonnets et les stances Sur la mort de Marie, les Sonnets et Madrigals pour Astrée, les Sonnets pour Hélène (1578) dédiés à Hélène de Surgères.

   Il fallait cependant que Ronsard progresse dans le sens de la simplicité, une simplicité savante puisque nourrie de l'exemple de certains modèles grecs qu'il découvre dans les années 1553-1555 : Anacréon et les poètes regroupés dans l'Anthologie. On doit à ces découvertes les recueils du Bocage de 1554 et des Mélanges de 1555. Un poète très personnel s'y découvre qui entrelace dans des odes aux vers brefs le goût de la vie dans ses plus humbles détails (les objets, les animaux familiers) et l'angoisse du temps qui passe. Ronsard avait aussi, en 1553, publié un Livret de Folastries qui manifestait une verve bouffonne et érotique peu prisée des esprits élégants de l'entourage royal et encore moins de ceux, protestants ou non, qui souhaitaient une Muse moins païenne.

Les hymnes philosophiques

Dans les années 1555-1556, il compose deux recueils de poésie amoureuse : la Continuation et la Nouvelle Continuation des Amours, où Ronsard abandonnant Pétrarque (moins d'ailleurs qu'il ne le dit) découvre les plaisirs du « beau style bas », par opposition à celui des odes héroïques. Il produit aussi deux livres d'Hymnes, poésie philosophique presque inconnue en France, chantant l'ordre du monde (hymnes du ciel, des astres) et celui de la terre qui doit le refléter (« Hymne de la Justice »). Les humanistes trouvèrent là un motif de satisfaction et félicitaient le poète d'avoir abandonné une Muse parfois trop gaillarde. Le recueil comporte deux types de pièces (composées soit d'alexandrins, soit de décasyllabes à rimes plates) : des hymnes encomiastiques (Hymne à Henri II, Hymne de la Justice) et des hymnes épiniciens (Hymne de Calaïs et de Zethes, Hymne de Pollux et de Castor) d'une part (ces derniers constituant de petites épopées, sortes de préludes à la Franciade), des hymnes « philosophiques » d'autre part, inspirés des Hymni naturales (1497) du néolatin Marulle et consacrés aux grands phénomènes de la nature (les Daimons, Hymne du ciel, Hymne des astres), à la condition humaine (Hymne de la mort) et à l'esprit humain (Hymne de la philosophie). Cette dernière sorte d'hymnes appartient au genre du poème scientifico-philosophique, largement représenté dans la littérature poétique du XVIe s. Les Hymnes de 1555-1556 furent progressivement augmentés dans les différentes éditions collectives des Œuvres de Ronsard, notamment dans celles de 1560, de 1567 (qui comporte l'Hymne des quatre saisons) et de 1584 (qui y ajouta l'Hymne des étoiles).