Dictionnaire de la Littérature 2001Éd. 2001
C

Cubières (Michel de)

Écrivain français (Roquemaure 1750 – Paris 1820).

Ses années de séminaire ont nourri un anticléricalisme voltairien qui le suit de sa phase mondaine, où il rime des poésies légères, à sa période révolutionnaire, où il compose des hymnes patriotiques. Une même volonté de libérer la littérature se retrouve dans ses conceptions de la poésie et du théâtre. Au début du XIXe siècle, il resta fidèle à une double tradition du siècle précédent : la littérature légère et la foi philosophique (Hippolyte, 1803 ; Ninon de Lenclos, 1806).

cubisme littéraire

En 1912, Georges Polti voyait dans les nouveaux rapports de la poésie et des arts plastiques la naissance d'un « cubisme littéraire ». En réalité, si les recherches typographiques des poètes futuristes et unanimistes, les calligrammes d'Apollinaire ont pu présenter des points de contact avec la peinture de Gleizes, Léger ou Picasso (cf. la Prose du Transsibérien de Cendrars et Sonia Delaunay), la littérature d'avant-garde, avant 1914, se recommande plutôt du « dramatisme » de Barzun ou de l'« orphisme » d'Apollinaire. La formule, appliquée par Paul Dermée à Max Jacob ou à la Jeune Poésie française (Frédéric Lefèvre, 1917), a été récusée par Reverdy. Elle ne semble pas aujourd'hui relever d'une véritable pertinence critique.

Cudomir (Corbadjiiski Dimitar, dit)

Écrivain bulgare (Turia 1890 – Kazanlak 1967).

D'une écriture particulièrement originale, l'auteur jouit d'une grande popularité. À travers l'anecdote, par l'ironie douce et l'humour, il nous introduit dans un univers typiquement bulgare aux prises avec une européanisation trop rapide et, parfois, mal vécue (les Gens de chez nous, 1937 ; le Consul de Golo-Bardo, 1947).

Cueva (Juan de la)

Poète dramatique espagnol (Séville v. 1550 – id. 1610).

Outre son œuvre lyrique et épique abondante, il est l'auteur de tragédies à sujet antique et de drames tirés de l'histoire nationale, largement puisés dans le romancero (les Sept Infants de Lara, Bernardo del Carpio, le Siège de Zamora). Leucino, le protagoniste du Calomniateur (1581), annonce moins don Juan que les futurs galanes de la comedia. Cueva exposera sa conception du théâtre dans son Art poétique (1609).

Cullen (Countee)

Écrivain américain (New York 1903 – id. 1946).

Figure centrale de la « Harlem Renaissance », attaché à un lyrisme qui objective le moi et le mot, il refuse de lier littérature et révolte. Poète (Couleur, 1925 ; la Ballade de la mulâtresse, 1927 ; Ce sont mes principes, 1947), romancier (Une seule route mène au ciel, 1931), auteur d'une anthologie de poésie noire (Crépuscule lyrique, 1927), il se place hors de la protestation, mais au cœur de l'amertume.

cultisme

Affectation et préciosité du style propre à certains écrivains espagnols du Siècle d'or. Le chef de file du cultisme (ou cultéranisme) fut le poète Gongora, dont le style se caractérise par des métaphores inattendues, des constructions tourmentées, des inversions et des allusions labyrinthiques. Ce maniérisme du style a eu une grande influence sur le développement de la préciosité en France dans la première moitié du XVIIe siècle.

Cumali (Necati)

Écrivain turc (Florina 1921 – Istanbul 2001).

D'abord poète, dans la mouvance du groupe « Garip » animé par Orhan Veli (Notes du mois de mai, 1947 ; Rayons de soleil, 1957), traducteur d'Apollinaire et de Langston Hughes, il se tourna vers le théâtre (le Berceau vide, 1949 ; la Rose des Mers, 1969), le roman et la nouvelle pour peindre la vie quotidienne de la région égéenne (Quand la lune monte, je ne peux dormir, 1969) ou donner des souvenirs de la région d'origine de sa famille, la Macédoine (Macédoine 1900, 1976). Il donne tardivement un grand roman historique sur la période jeune turque : Montagnes dévastées (1995).

Cummings (Edward Estlin)

Poète et peintre américain (Cambridge, Massachusetts, 1894 – North Conway, New Hampshire, 1962).

Condisciple de Dos Passos à Harvard, ambulancier en France pendant la Première Guerre mondiale, emprisonné à La Ferté-Macé à la suite d'erreurs administratives, il fait dans la Chambre* énorme (1922) le récit de sa captivité et, à travers l'évocation de ses gardiens et de ses compagnons de misère, définit les thèmes principaux de son œuvre, identifiant l'écrivain au clown, être dérisoire mais riche d'un pouvoir spirituel. De Tulipes et cheminées (1923) aux Poèmes complets (1962), neuf recueils poétiques associent le lyrisme à des rythmes variables, à des déconstructions sémantiques, à de quasi-calligrammes. La logique stricte est bannie au profit d'images labiles, à la fois fortement physiques et éthérées. Les articles et conférences de Harvard (1953), Eimi (1933), récit d'un voyage à Moscou, son théâtre (Lui, 1927 ; Saint Nicolas, 1946), un ballet (Tom, 1935) confirment le choix de l'humour et la virtuosité des jeux de langage. L'innovation formelle n'empêche pas la référence sous-jacente au transcendantalisme et souligne l'aptitude à saisir et à défaire toute parole, en un geste iconoclaste et fondateur.

Cunha (Euclides Rodrigues Pimenta da)

Journaliste et écrivain brésilien (Cantagalo, Rio de Janeiro, 1866 – assassiné à Rio de Janeiro 1909).

Il accompagna comme reporter de l'Estado de São Paulo la campagne militaire de 1896-1897 contre les révoltés de Canudos, partisans d'Antônio Conselheiro, dans les landes (sertões) de l'État de Bahia. À partir de ces reportages, il conçut une étude célèbre, Terres de Canudos (1902), composée de trois parties : « la Terre » et « l'Homme », tableau gigantesque et précis du paysage physique et humain du Nordeste ; « la Lutte », noyau narratif situé lors de la phase finale de la campagne militaire de Canudos.

Cuoco (Vincenzo)

Homme politique et écrivain italien (Civitacampomarano, Campobasso, 1770 – Naples 1823).

Impliqué dans la révolution napolitaine de 1799, il critique l'expérience jacobine dans son Essai historique sur la révolution napolitaine de 1799 (1801 ; 2e éd., 1806), qui fut considéré comme un modèle du libéralisme modéré italien.

Curtis (Louis Laffitte, dit Jean-Louis)

Écrivain français (Orthez 1917 – Paris 1995).

Ses romans, situés pendant la guerre (les Jeunes Hommes, 1946), l'Occupation (les Forêts de la nuit, 1947), la Libération (les Justes Causes, 1954), les années 1960 (la Quarantaine, 1966 ; Un jeune couple, 1967 ; le Roseau pensant, 1971), peignent des personnages en quête d'un « supplément d'âme ». Recherches techniques, ironie, pastiches se mêlent dans la Parade (1960), Cygne sauvage (1962) et La Chine m'inquiète (1972) ; le Mauvais Choix (1984) compare christianisme et marxisme à leur début. Ses dernières œuvres sont plus satiriques (Questions à la littérature, 1973 ; le Battement de mon cœur, 1981 ; Une éducation d'écrivain, 1985).