Dictionnaire de la Littérature 2001Éd. 2001
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Dantec (Maurice G.)

Écrivain français (Grenoble 1959).

Abandonnant des études de lettres, il travaille dans la publicité et participe à un groupe de rock. Après un premier roman de science-fiction refusé par les éditeurs, il publie à la Série noire la Sirène rouge (1998) et les Racines du mal (1999), où le noir se mêle à la science-fiction et au fantastique. Avec les deux volumes de son journal au ton volontiers provocateur et réactionnaire, le Théâtre des opérations (1999, deuxième volume en 2000), il compte « réveiller les consciences endormies ».

Danticat (Edwidge)

Romancière haïtienne de langue anglaise (Haïti 1969).

Élevée par sa tante à Haïti, elle ne rejoint ses parents installés aux États-Unis qu'à l'âge de 12 ans, et c'est alors qu'elle apprend l'anglais qui deviendra sa langue d'écriture. Dans son premier roman, le Cri de l'oiseau rouge (1994), elle aborde les difficiles relations entre une mère et une fille séparées depuis longtemps. Dans Krik ? Krak ! (1996), les nouvelles traitent autant de personnages en perdition dans la violence inouïe de Haïti défigurée par la dictature ou vivant aux États-Unis, terre promise qui peut tourner là aussi en dystopie. Enfin, la Récolte des larmes (1997) s'inspire des massacres de 1937, lorsque les journaliers haïtiens travaillant en République dominicaine sont soudain pris pour cible et exterminés. Jouant sur sa connaissance du créole et du français, Danticat écrit dans un anglais limpide, traversé d'une étrangeté liée à ces emprunts linguistiques ou syntaxiques.

Dard (Frédéric)

Écrivain français (Jallieu, Isère, 1921 – Bonnefontaine, Suisse, 2000).

D'abord auteur de romans noirs, dans la lignée de James Hadley Chase, il s'attache à la parodie du récit policier, fondant la psychologie sur le calembour et donnant à l'intrigue le rythme de la farce, dans la série des romans signé San Antonio, antihéros qu'il a créé à l'image de son nihilisme truculent, de Laissez tomber la fille (1950) à Céréales killer (2001) en passant par les Doigts dans le nez (1957) ou T'es beau tu sais (1972). La série a occulté le reste de l'œuvre de Frédéric Dard, qui, sous son vrai nom, a su mêler le noir, le suspense et la psychologie avec des romans (Les salauds vont en enfer, 1956 ; C'est toi le venin, 1957) qui inspirèrent le cinéma. Après divers pseudonymes (Cornel Milk, Kill Him), il devint l'Ange noir (le Boulevard des allongés, 1952) puis Kaput (Mise à mort, 1956), pour deux courtes séries consacrées à des génies du crime. Il fut aussi Frédéric Charles pour des romans d'épouvante (N'ouvrez pas ce cercueil, 1953) et d'espionnage assez conventionnels (Dernière Mission, 1950 ; les Figurants de la peur, 1960).

Dard (Khawadja Mir)

Poète indien de langues persane et urdu (Delhi 1719 – id. 1785).

Soufi de l'ordre Naqchabendi, musicien passionné, il publia un traité sur la musique religieuse, et est l'un des pères de la littérature urdu. Il a laissé, outre des poèmes, une encyclopédie de la pensée mystique.

Darío (Félix Rubén García Sarmiento, dit Rubén)

Poète nicaraguayen (Metapa 1867 – León 1916).

Précocement doué – on l'appelait l' « enfant-poète » –, il compose ses premiers vers à l'âge de 11 ans. Victor Hugo est alors son maître. À 19 ans, il part pour le Chili, où il découvre les Parnassiens français. Il a déjà publié deux recueils (les Ronces et Rimes, 1887) lorsqu'il connaît son premier grand succès avec Azur (1888), recueil mêlé de prose et de poésie, imprégné de l'influence de Catulle Mendès, de Leconte de Lisle, de Armand Sylvestre et de Coppée, qui s'impose d'emblée comme la bible du jeune mouvement moderniste et révèle déjà les deux grandes tendances de l'œuvre de Darío : la sensibilité et la sensualité raffinées, mais aussi la préoccupation pour les problèmes métaphysiques et sociaux. Après un voyage en Espagne puis à Paris, où il rencontre Verlaine, il fait un séjour à Buenos Aires comme consul de Colombie (1893-1898). C'est là qu'il publie les Bizarres (1896), collection de portraits d'écrivains contemporains, la plupart français, et surtout, la même année, un recueil de vers, Proses profanes, remarquable par le raffinement de ses thèmes et par les audaces de la versification, recueil illustrant la théorie de l'art pour l'art, le culte de la beauté et la recherche de la musique où abondent les lacs, les cygnes, les princesses, la faune et la flore exotiques, composantes obligées du premier modernisme, tentative de recréation de mondes enfuis ou imaginaires et refus du monde contemporain.

   De 1900 à 1914, il vit, presque sans interruption, à Paris, où il mène une vie à la fois élégante et bohème. En 1905, ses Chants de vie et d'espérance affirment sa foi nouvelle « en la vieille Hispanie » et dans le destin de l'Amérique latine face aux États-Unis. Il publiera encore quelques recueils (le Chant errant, 1907 ; Poèmes de l'automne, 1910) et une autobiographie (la Vie de Rubén Darío écrite par lui-même, 1912) ; mais, miné par l'alcool, il retourne au Nicaragua pour y mourir misérablement. Prosateur virtuose, vénéré comme un maître par Juan Ramón Jiménez et Antonio Machado – lui-même un des principaux maîtres de la génération de 1898 –, Rubén Darío est, avant tout, le grand lyrique de son temps. Il a introduit une musique nouvelle dans la poésie de langue espagnole, dont il a rajeuni les formes d'expression. Chef incontesté du mouvement « moderniste », il est le premier écrivain latino-américain vraiment universel.

Darley (George)

Écrivain irlandais (Dublin 1795 – Londres 1846).

Ses romans (Lilian de la vallée, 1826), ses opéras (Sylvia ou la Reine de mai, 1827) et ses œuvres d'érudition (il édite Beaumont et Fletcher en 1840) traduisent une même quête de l'esthétique qu'appellent ses thèmes, nervaliens ou « modernes » (sirènes, noyades, licornes, phénix, déserts). Ses confessions lyriques (les Errements de l'extase, 1822 ; Nepenthe, 1835) ébauchent l'élan vers le merveilleux, face au réalisme croissant de la génération postromantique.

Darmstadt (cercle de)

Cercle littéraire qui, sous l'égide de la landgrave de Hesse-Darmstadt, s'adonnait, autour des années 1770, au culte du sentiment et de l'amitié. Ses principaux membres étaient Caroline Flachsland (« Psyche »), Henriette von Roussillon (« Urania »), Luise von Ziegler (« Lila ») et le baron von Moser. Le cercle admirait Rousseau, Klopstock et les romans de Richardson. Herder, fiancé à C. Flachsland, a échangé avec elle une correspondance caractéristique du ton de cette société. Goethe, qui a fréquenté le cercle de Darmstadt en 1772, a dédié trois poèmes à ses membres, dont le Chant du pèlerin au matin (« À Lila »).