Dictionnaire de la Littérature 2001Éd. 2001
V

Volkslied

Il s'agit de poèmes allemands en vers rimés, accompagnés d'une mélodie. Les premiers Volkslieder se sont développés en Allemagne au Moyen Âge à la suite du Minnesang. Au XVIe s., des recueils imprimés contribuent largement à la diffusion du Volkslied. Après Herder (Voix des peuples dans leurs chants, 1778-1779), les romantiques, en particulier J. Grimm, ont vu dans le Volkslied une création du Volksgeist, tandis qu'Arnim et Brentano donnaient, avec le Cor merveilleux de l'enfant (1806-1808), un célèbre recueil de chants populaires allemands. Les « Archives du chant populaire allemand » rassemblent, à Fribourg-en-Brisgau, environ 320 000 Volkslieder.

Volksmärchen

Terme désignant les contes hérités de la tradition populaire allemande, tels que Musäus au XVIIIe siècle, puis les frères Grimm au XIXe les ont notés. Interprétés par la génération romantique comme un témoignage sur « l'enfance de l'humanité » et comme un produit de l'âme germanique, les Volksmärchen ont longtemps nourri des mythes passéistes et nationalistes ; l'analyse de leurs sources montre aussi des liens avec la propagande de la Contre-Réforme et avec le conte de fées français. Ils ont inspiré à Tieck, à Brentano, à Arnim, à Hauff des contes romantiques classés dans la catégorie du « Kunstmärchen » et continuent à imprégner la mythologie du livre d'enfant.

Volney (Constantin François de Chassebœuf, dit)

Écrivain français (Craon 1757 – Paris 1820).

Héritier des Lumières, il s'efforce dans son Voyage en Égypte et en Syrie (1787) à une analyse scientifique des pays étudiés, méthode qu'il reprendra plus tard en Amérique pour aboutir à un Tableau du climat et du sol des États-Unis (1803). Élu secrétaire de l'Assemblée en 1790, il concourut activement à la réflexion philosophique et pédagogique : c'est de cette époque que date son ouvrage le plus important, les Ruines ou Méditations sur les révolutions des empires (1791), où il montre les liens qui existent entre la tyrannie et la décadence des empires. Un voyageur raconte la rêverie qui lui révéla, devant les ruines de Palmyre, le sens de l'Histoire. Le « génie des tombeaux et des ruines » lui retrace l'itinéraire de l'humanité et de ses croyances pour le pousser à conclure à la nécessité d'un accord universel sur les principes, scientifiques, de l'évidence et, politiques, de l'égalité et de la liberté. Le livre connut immédiatement un vif succès et exerça une influence durable sur le romantisme. Volney entra, après la Terreur, dans les conseils de l'Instruction publique, inaugura la chaire d'histoire de l'École normale (1794), et fit partie du groupe des idéologues qui s'opposèrent vainement à l'instauration de l'Empire et à la liquidation de l'héritage révolutionnaire, tout en se lançant dans d'importantes recherches linguistiques : Discours sur l'étude philosophique des langues (1819), l'Hébreu simplifié (1820).

Volodine (Antoine)

Romancier français (Châlons-sur-Saône 1950).

Après plusieurs romans publiés dans la collection « Présence du futur » chez Denoël (Biographie comparée de Jorian Murgrave, 1985 ; Rituel du mépris, 1986, Grand prix de la science-fiction française 1987), il poursuit, de Lisbonne dernière marge (1990) à Nuit blanche en Balkhyrie (1997) et Vue sur l'ossuaire (1998), une œuvre inclassable, sondant la barbarie et les traumatismes du siècle dans des constructions romanesques vertigineuses, à la fois prouesses formelles et labyrinthes schizophrènes, terrifiants et baroques, hantés par le totalitarisme et l'univers concentrationnaire. Après le Post-exotisme en dix leçons, leçon onze (1998), entre art poétique et récit de fiction, Des anges mineurs (1999, prix du Livre Inter 2000), suite vertigineuse de quarante-neuf fantasmagories ou « narrats », offre un saisissant tableau d'apocalypse.

Volpi (Jorge)

Écrivain mexicain (Mexico 1968).

Malgré sa jeunesse, il est l'auteur de nombreux romans (Malgré l'obscur silence, 1992 ; Jours de fureur, 1994 ; la Paix des sépultures, 1995 ; le Tempérament mélancolique, 1996) ainsi que d'un essai (l'Imagination et le pouvoir, 1998). Il appartient, avec Ignacio Padilla, à la génération dite « du crack », réunissant des écrivains mexicains désireux de dépasser leurs aînés (Cortazar, Vargas Llosa, Fuentes, García Márquez, Roa Bastos et Donoso). Son roman, À la recherche de Klingsor (1999), acclamé par la critique, a pour thème sa passion pour la science et la littérature et lui vaut d'être un des écrivains de langue espagnole les plus prometteurs de sa génération.

Volponi (Paolo)

Écrivain italien (Urbin 1924 – Ancône 1994).

Il a exercé différentes activités dans le secteur industriel (Olivetti et Fiat). Poète (le Lézard vert, 1948 ; l'Ancienne Monnaie, 1955 ; les Portes des Apennins, 1960) et romancier engagé (Pauvre Albino, 1962 ; le Système d'Anteo Crocioni, 1965 ; Corporel, 1974 ; la Planète irritable, 1978 ; le Lanceur de javelot, 1981 ; la Route pour Rome, 1991), il a trouvé dans la société industrielle les ressorts d'une littérature comme analyse de la civilisation néocapitaliste : ses personnages sont broyés par une machine sociale, dont il écrit avec une extrême précision les mécanismes d'aliénation, et finissent par s'évader dans l'utopie et le délire fantasmatique (le Duc et l'Anarchiste, 1975 ; les Mouches du capital, 1989).

Voltaire (François Marie Arouet, dit)

Écrivain français (Paris 1694 – id. 1778).

Par sa longévité, sa productivité et la radicalité de son engagement, Voltaire est devenu le symbole de son siècle. Longtemps considéré comme un génie tragique et épique, il est progressivement perçu comme un philosophe et un conteur, et sa prose a pris le pas sur sa poésie.

D'Arouet à Voltaire

Fils d'un trésorier de la Chambre des comptes, il fit son éducation officielle chez les jésuites du lycée Louis-le-Grand, parmi lesquels se distinguaient les pères Porée et Tournemine, et eut une éducation parallèle dans l'atmosphère mondaine et frivole où vivait son parrain, l'abbé de Chateauneuf, qui lui fit connaître la société du Temple et la fameuse Ninon de Lenclos. Son père, qui le destinait à la magistrature, l'envoya en Hollande comme secrétaire de l'ambassadeur de France. Il se fit connaître par ses premières poésies et ses écrits satiriques contre le Régent, qui l'exila à Tulle, à Sully-sur-Loire, et même l'embastilla onze mois. Sorti de prison, il fit représenter avec succès une tragédie, Œdipe, et prit le pseudonyme de Voltaire, anagramme d'Arouet l(e) j(eune) selon les uns, nom d'une terre selon les autres. Il travaillait parallèlement à un vaste projet épique, la Ligue, critique du fanatisme et éloge de la tolérance d'Henri IV. Ce poème, plusieurs fois remanié, devint la Henriade. Il raconte les guerres de Religion, décrit la Saint-Barthélemy et chante l'avènement d'Henri IV. Cet argument permet à Voltaire de dénoncer le fanatisme et de faire l'apologie du roi tolérant. Un Essai sur la poésie épique servit en 1728 de préface à la Henriade : il plaide pour la relativité du goût mais ne se libère pas du cadre de l'esthétique classique ; le choix même de l'épopée, grand genre poétique dans la hiérarchie traditionnelle, en est la meilleure preuve. Jeune encore, Voltaire s'affirmait donc dans les deux grands genres selon la hiérarchie classique, la tragédie et l'épopée.

Le modèle anglais

Il fut exilé en Angleterre, ce qui mûrit le jeune homme et mua un brillant poète mondain en un philosophe. Voltaire découvrit la littérature anglaise, en particulier Shakespeare, qui bousculait les règles sacro-saintes du classicisme français, et la philosophie anglaise, représentée par Locke et Newton, qui mettait en cause le système cartésien. Le sensualisme de Locke réfutait le dualisme métaphysique de Descartes, et la gravitation universelle selon Newton, sa physique des tourbillons. Voltaire composa, à la gloire du pays qui l'accueillait, des Lettres anglaises, transformées en Lettres philosophiques, manifeste du siècle nouveau qui commence à s'appeler Siècle des lumières. L'Angleterre y apparaît comme le pays du commerce, de la liberté, de l'esprit pratique et de la tolérance. Voltaire démontre l'efficacité d'un système qui repose sur la liberté (religieuse, philosophique, politique, libéralisme économique). La XXVe lettre indique le sens global de l'œuvre : Voltaire y fait une critique de Pascal et se propose d'ouvrir à l'homme le chemin qui le rapproche d'un bonheur pratique et terrestre. Rentré en France, Voltaire mena parallèlement ses activités de poète tragique (Brutus, 1730 ; Zaïre, 1732), d'historien (Histoire de Charles XII, 1731) et de philosophe militant.