Dictionnaire de la Littérature 2001Éd. 2001
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Daive (Jean)

Écrivain français (Bonsecours, Nord, 1941).

Enfant marqué par des replis autistiques, il n'aura de cesse de retrouver la parole. Lecteur précoce (Artaud, Bataille, Michaux, Kafka, Joyce, Rimbaud) et passionné par les dictionnaires, il devient rédacteur encyclopédiste puis producteur à France Culture. Sa poésie est l'exploration difficile, retorse, d'une langue mineure et essentielle, celle de l'« expérience intérieure » prise dans les « arcanes d'une fascination » pour l'Origine et la Loi. Le roman familial est le lieu d'un combat contre la parole apprise et pour une impossible constitution du sujet. La narration mentale (le Cri-cerveau, 1977) est hantée par le nombre, seul repère face à l'effondrement du sens : Décimale blanche (1967), Monde à quatre verbes (1970), 1 7 10 16 (1974), 1, 2, de la série non aperçue (1975). La parité est une donnée idéale (le 4, obsédant, insiste sur la géométrie, l'achèvement et la perfection : « Former : ajouter un quatrième côté, et fermer »), mais contrariée par l'impair, signe d'infinitude, de manque ou de ratage, qui est aussi l'absolu de l'écriture affrontant la mort des mots hérités et elle-même vecteur de mort. Cette expérience unique dans la poésie moderne « va de la castration à quelque chose de la mort : page après page, cadavre après cadavre. Une liturgie. » (Fut bâti, 1973 ; l'Absolu reptilien, 1975 ; Narration d'équilibre, 1982-1990, long poème en quatre volumes à propos d'un roman qu'il est en train d'écrire et qui deviendra la Condition d'infini, 1995-1998). Créateur et animateur de revues (Fragment, fig., FIN), Jean Daive est également traducteur (Celan, Creeley).

Dakeyo (Paul)

Poète camerounais (Bafoussam 1948).

Il vit à Paris. Ses poèmes manifestent un engagement passionné en faveur des opprimés et des exploités de l'Afrique contemporaine (Soweto : Soleils fusillés, 1977 ; la Femme où j'ai mal, 1989 ; les Ombres de la nuit, 1994).

Dalcev (Atanas)

Poète, écrivain et traducteur bulgare (Salonique 1904 – Sofia 1978).

Son œuvre, d'une forte résonance philosophique, se révèle un admirable moyen d'exploration de l'âme. Sa poésie, de haute élévation spirituelle, pleine de vitalité, traduit, dans un langage clair et précis, le sens caché de la vie (Poésies, 1928 ; Fragments, 1967 ; Pages, 1980).

dalit sahitya (littérature des opprimés)

Mouvement littéraire indien né au Maharashtra vers 1950.

Leurs auteurs (Namdev Dasal, Daya Pavar, Kesav Mesram, Narayan Survé, Sankarrav Kharat, Anna Bhau Sathé, Baburav Bagul, Arjun Danglé), « intouchables » (dalit) veulent exprimer eux-mêmes leur révolte intérieure, sans souci de style ni de conventions esthétiques.

Daltón (Roque)

Poète salvadorien (San Salvador 1933 – assassiné près de San Salvador 1975).

C'est l'un des membres majeurs de la generación comprometida par l'originalité de sa poésie, où l'ironie tient une grande place (la Fenêtre dans le visage, 1961 ; la Mer, 1962 ; le Tour de l'offensé, 1963 ; Taverne et autres lieux, 1969). Il est aussi l'auteur d'un roman posthume (Pauvre Poète que j'étais, 1976), analyse lucide de la petite bourgeoisie salvadorienne, ainsi que d'un essai (1972) sur la célèbre insurrection paysanne de 1932.

Dama-Ntsoha (Jean-Baptiste Razafintsalama, dit)

Écrivain malgache de langues française et malgache (Tananarive 1885 – id. 1963).

Au cours de sa vie religieuse (il fut jésuite puis prêtre séculier), il chercha dans le sanskrit l'origine du vocabulaire malgache, puis découvrit la théosophie. Après son étude de la Langue malgache et les origines malgaches, son essai sur le Bouddhisme malgache et les origines malgaches (1939) provoqua sa rupture avec l'Église catholique. Prenant alors le nom de Dama-Ntsoha, il entreprit l'analyse des caractères spécifiques de la pensée malgache (la Démocratie malgache, la Technique de la conception de la vie chez les Malgaches révélée par leurs proverbes) et du système des communautés villageoises (le Renouveau malgache). Il a exercé une influence considérable sur l'évolution culturelle de ses compatriotes.

Damas (Léon-Gontran)

Écrivain français (Cayenne 1912 – Washington 1978).

Écrivain, comme Césaire et Senghor, de la négritude, révolté contre son éducation bourgeoise et occidentale (Pigments, 1937), il dénonça dans son Retour de Guyane (1938), où il avait été envoyé en mission, le colonialisme et l'idée d'assimilation, avant de révéler, dans son anthologie des Poètes d'expression française (1957) puis dans la Nouvelle Somme de poésie du monde noir (1966), l'ampleur de la littérature noire. Son œuvre lyrique (Graffiti, 1952 ; Névralgies, 1966) culmine dans Black Label (1956), où, sur un rythme de tambour, l'amertume de l'exil accompagne le cafard de l'alcool. Il a aussi rassemblé des contes populaires guyanais (Veillées noires, 1942).

Damase (saint) , en lat. Damasus

Homme d'Église et poète latin (mort en 384).

Probablement d'origine espagnole, il fut élu évêque de Rome en 366. Il réunit plusieurs conciles et chargea son secrétaire, saint Jérôme, de la traduction latine de la Bible. Il composa de nombreuses inscriptions funéraires, d'une langue très classique, qu'il fit graver par son ami le calligraphe Filocalus sur les tombeaux des martyrs.

Dammaj (Zayd Muti)

Romancier yéménite (Dhû l-Muhammar 1943 – 2000).

Il est le romancier yéménite le plus connu dans le monde arabe. Après une enfance dans la ville de Taëz, il étudia en Égypte et mena une carrière de haut fonctionnaire, fut député (1970-1974) et ministre plénipotentiaire au Koweït (1980-1981). Outre de nombreux recueils de nouvelles témoignant de l'univers culturel yéménite avec humour et souci du pittoresque (Tâhich al-Hawbân, 1973 ; le Scorpion, 1982 ; le Pont, 1986 ; les Peines de Mayyâsa, 1990 ; le Canon jaune, 2001), il écrivit un roman (l'Otage, 1984) et un récit sur la mémoire de Taëz (Éblouissement et Étonnement, 2000).

Damrong Rajanuphap (prince)

Homme politique et écrivain thaïlandais (Bangkok 1862 – id. 1943).

Fils du roi Mongkut, il fut ministre de l'Instruction publique. Avec une équipe de savants il rechercha, commenta et édita les documents manuscrits concernant l'histoire, la religion, la littérature, les coutumes de son pays. Grâce à ses travaux, le patrimoine culturel de la Thaïlande a été largement préservé. On lui doit de très nombreux essais (les Guerres birmano-thaï, Biographie de Sunthon Phu, Au sujet d'Inao et du théâtre) et des articles en anglais parus dans le Journal of the Siam Society.