Dictionnaire de la Littérature 2001Éd. 2001
G

Gournay (Marie Le Jars de)

Femme de lettres française (Paris 1566 – id. 1645).

Enthousiasmée par les Essais de Montaigne, elle rencontre l'auteur à Paris (1588) et devient sa « fille d'alliance ». Elle procura, avec P. de Brach, la première édition posthume, dite de Bordeaux, des Essais (1595) et en publia onze autres de 1595 à 1635. Raillée pour son pédantisme mais bien en cour et protégée de Richelieu, elle rassembla son œuvre personnelle dans l'Ombre de la demoiselle de Gournay (1626). Du côté des Anciens, contre les premiers Modernes, elle entra dans toutes les polémiques qui présidèrent à la formation du style classique, contre le naturel malherbien et les efforts des premiers puristes.

Goussein (Mekhti Ali-Ogly Gousseïnov, dit)

Écrivain azerbaïdjanais (Chykhly 1909 – Bakou 1965).

Évoquant dans ses premiers récits les luttes sociales du village (la Tonte, 1927 ; Tarlan, 1940), il aborde ensuite, autour de la figure de M. Azizbekov (l'un des 26 commissaires de Bakou), une réflexion sur les origines du mouvement révolutionnaire (la Montée des eaux, 1933-1936 ; le Commissaire, 1942 ; l'Aube, 1950-1953). Auteur durant la guerre de drames historico-patriotiques (Nizami, 1940 ; Djavanchir, 1945), il consacre enfin aux prospecteurs de pétrole un diptyque, où il analyse la transmission des traditions ouvrières aux jeunes cadres (Apchéron, 1947 ; les Rochers noirs, 1957).

Goux (Jean-Paul)

Écrivain français (né en 1948).

Après un livre sur la mémoire ouvrière (Mémoires de l'Enclave, 1986), la trilogie romanesque des Champs de fouilles, interroge successivement l'expérience de la beauté (Les Jardins de Morgante, 1989), celle de la parole amoureuse, amicale ou politique (La Commémoration, 1995), et celle de l'héritage (La Maison forte, 1999). L'écriture lyrique et dense laisse reconnaître l'influence de Proust, J. Gracq et Cl. Simon. Critique, Goux a publié un essai sur la prose, la Fabrique du continu (2001).

Gower (John)

Poète anglais (dans le Kent v. 1330 – Southwark 1408).

Ami de Chaucer, auteur de trois longs poèmes : Speculum meditantis (ou Miroir de l'homme) célèbre, en trente mille vers français, le mariage et dénonce l'immoralité ; Vox clamantis, en latin, est inspiré par la révolte des paysans de 1381 ; la Confessio amantis, en anglais, compilation de contes allégoriques en quarante mille octosyllabes rimés, reprend le florilège courtois.

Goytisolo (José Agustín)

Poète espagnol (Barcelone 1928 – id. 1999).

Son inspiration de poète engagé s'accompagne d'une ironie qui teinte tous ses recueils (El Retorno, 1954 ; Psaumes dans le vent, 1956 ; Sous tolérance, 1973 ; Paroles pour Julie, 1980 ; Dans les circonstances, 1983). Frère aîné de Juan Goytisolo, il a publié des anthologies de poètes catalans et cubains contemporains. Il est l'écrivain du groupe « Taller » de l'architecte R. Bofill.

Goytisolo (Juan)

Écrivain espagnol (Barcelone 1931).

Le plus marquant des membres de la « génération du demi-siècle », il est hanté par le destin de son pays. Ses romans (Jeux de mains, 1954 ; Deuil au paradis, 1955 ; Chronique d'une île, 1961 ; Juan sans terre, 1975), ses nouvelles, ses récits de voyage (Terres de Níjar, 1960) évoquent le désarroi d'une génération aux prises avec les multiples formes d'oppression qu'il définit dans ses essais (Dissidences, 1977) et qui le font accuser d'« hispanicide ». Il poursuit une quête pathétique de sa personnalité et de celle de l'Espagne dans des œuvres qui font de lui le maître du « nouveau roman » dans son pays. Inspirée par le roman américain des années 1950 (notamment Truman Capote) et le Nouveau Roman français, sa technique narrative, ambitieuse, marque un tournant capital dans l'histoire du genre romanesque en Espagne (Pièces d'identité, 1966 ; Don Julián, 1970 ; Makbara, 1980 ; Paysages après la bataille, 1982 ; Chasse gardée, 1985 ; les Royaumes déchirés, 1986 ; les Vertus de l'oiseau solitaire, 1988 ; l'Arbre de la littérature, 1977-1990). Il a récemment publié Trois Semaines en ce jardin (1997) et un récit de guerre, Paysage sur fond de Tchétchénie (1996).

Gozlan (Léon)

Écrivain français (Marseille 1803 – Paris 1866).

Journaliste au Vert-Vert, au Figaro et au Corsaire, il est remarqué pour sa verve caustique et ses qualités d'observation. Il connaît le succès avec des nouvelles et des romans. Barbey d'Aurevilly voit en lui le troisième romancier de l'époque (après Balzac et Stendhal) ; la postérité immédiate sera plus sévère en l'appelant « suiveur » de Balzac, dont il fut le secrétaire et sur qui il laisse des souvenirs encore lus aujourd'hui (Balzac en pantoufles, 1856 ; Balzac chez lui, 1862).

Gozzano (Guido)

Écrivain italien (Agliè Canavese, Turin, 1883 – id. 1916).

À l'opposé des impressions de voyage (Vers le berceau du monde, 1917) que lui inspira un court séjour en Inde et à Ceylan (1912-1913), sa poésie est toute de grisaille et en demi-teintes, proche de la parole quotidienne (les Colloques, 1911). On lui doit aussi des nouvelles ; (l'Ultime Trace, 1919).

Gozzi (Carlo)

Écrivain italien (Venise 1720 – id. 1806).

Esprit fantasque et réactionnaire, il s'attaqua férocement à la société et à la culture de son temps, prenant pour cibles le théâtre larmoyant de Pietro Chiari et la comédie réaliste de Goldoni. Les dix « fables » polémiques, représentées de 1761 à 1765, connaîtront un grand succès : l'Amour des trois oranges ; Turandot (1762) où la princesse chinoise Turandot fait exécuter ses prétendants mais accorde son amour à Calaf, prince des Tartares (Turandot inspirera les livrets des opéras homonymes de Ferruccio Busoni et Giacomo Puccini) ; l'Oiseau vert. Le théâtre de Gozzi manifeste une irrésistible verve caricaturale que l'on retrouve dans ses Mémoires inutiles (1797-1798).

Gozzi (Gasparo)

Écrivain italien (Venise 1713 – Padoue 1786).

Fondateur et rédacteur de 1760 à 1762 de la Gazzetta veneta et de l'Osservatore veneto, il y dévoile une grande curiosité pour le quotidien et un goût de la chronique humoristique, qui l'apparente à Goldoni. On lui doit aussi une Défense de Dante (1788) qui contribua à réveiller en Italie le culte du poète.