Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
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MELATO (Mariangela)

actrice italienne (Milan 1938).

Comédienne formée par le théâtre où elle a travaillé avec Luchino Visconti, Dario Fo, Luca Ronconi (l'Orlando furioso sur la scène et dans la version télévisée de 1978), Mariangela Melato a mis au service du cinéma une sensibilité aussi à l'aise dans les rôles comiques que dramatiques. Lancée par le film de Lina Wertmuller (Mimi metallo, 1972), elle a été dirigée par des cinéastes aussi divers qu'Elio Petri (la Classe ouvrière va au paradis, 1971 ; Todo modo, 1976), Alberto Bevilacqua (Attenti al buffone, 1975), Mario Monicelli (Caro Michele, 1976), Sergio Citti (Casotto, 1977 ; Mortacci, 1989), Luigi Comencini (Qui a tué le chat ?, 1977), Franco Brusati (Oublier Venise, 1979 ; Il buon soldato, 1983), Giuseppe Bertolucci (Une femme italienne, 1980 ; Segreti segreti, 1985), Pupi Avati (Aide moi à rêver, 1981), Maurizio Nichetti (Domani si balla, 1982). Au cours de ces dernières années, Mariangela Melato a délaissé le cinéma pour le théâtre, alternant pièces classiques et ouvrages contemporains. Elle y revient à la fin des années 90 pour interpréter Un uomo perbene (M. Zaccaro, 1999), I panni sporchi (M. Monicelli, 1999) et L'amore probabilmente (G. Bertolucci, 2000).

MELCHIOR (Georges)

acteur français (né en 1888).

Son abondante filmographie muette entamée avant 1914 étouffe complètement les quelques apparitions qu'il fait dans le parlant. Il débute chez Gaumont, où il joue les jeunes premiers sous la direction de Fescourt, de Ravel et surtout de Feuillade, qui lui confie le rôle de Fandor dans la série des Fantômas (1913-14). Il est le partenaire de Sarah Bernhardt dans Mères françaises (R. Hervil et L. Mercanton, 1917) et la Voyante (Abrams et Mercanton, 1923). Après la guerre, Feyder le distribue dans la Faute d'orthographe (1919) et l'Atlantide (1921). On l'aperçoit encore dans une scène de la Citadelle du silence (M. L'Herbier, 1937).

MÉLIÈS (Georges)

cinéaste français (Paris 1861 - id. 1938).

Ses études secondaires achevées, il entre sans conviction dans la fabrique paternelle de chaussures, où il acquiert une précieuse habileté manuelle. Il se marie en 1885 et part pour Londres confectionner des automates et apprendre la prestidigitation. De retour à Paris, il exerce son art au musée Grévin, tout en s'adonnant à la peinture et au dessin satirique.

1888 : le théâtre Robert-Houdin est à vendre (situé au 8, boulevard des Italiens, il sera démoli en 1923 pour achever le boulevard Haussmann) ; Méliès l'achète et y présente des spectacles de magie, de manipulation et « grandes illusions », petites féeries et acrobaties. Il fabrique des machines pour de nouveaux tours qu'il exécute lui-même sur scène. Les séances se terminent fréquemment par la projection de photographies peintes : Georges Méliès est prêt pour devenir « le père du spectacle cinématographique ».

À l'issue de la célèbre projection cinématographique du Grand Café le 28 décembre 1895, il propose à Antoine Lumière d'acheter l'appareil de ses fils : celui-ci refuse, préférant l'exploiter lui-même. Georges Méliès aurait alors fabriqué un appareil semblable sur les plans de l'opticien anglais William Paul ou en achetant le procédé de l'Isolatograph. Avec son « Kinétograph », il peut tourner ses premiers films sur des pellicules qu'il perfore à la main : l'Arroseur, Arrivée d'un train en gare de Vincennes, Jardinier brûlant des herbes (1896) et de nombreux autres, dénués d'originalité propre, ressemblant fort aux premières réalisations des frères Lumière ou reproduisant ses numéros de prestidigitation. Il se fait la main.

L'apport fondamental de Georges Méliès au cinéma naissant date de l'année 1896, alors qu'il choisit d'exploiter le cinéma-spectacle, « le cinéma dans sa voie théâtrale spectaculaire ». Il crée le film à trucs, ou « vues fantastiques ». « Un blocage de l'appareil dont je me servais au début produisit un effet inattendu un jour que je photographiais prosaïquement la place de l'Opéra ; une minute fut nécessaire pour débloquer la pellicule et remettre l'appareil en marche. Pendant cette minute, les passants, omnibus, voitures avaient changé de place, bien entendu. En projetant la bande, ressoudée au point où s'était produite la rupture, je vis subitement un omnibus Madeleine-Bastille changé en corbillard et des hommes changés en femmes. Le truc par substitution, dit truc à arrêt, était trouvé » (G. Méliès). L'illusion étant la base de son cinéma de divertissement, il invente et mélange en les combinant aussi bien les effets qui relèvent du théâtre (machinerie, déroulants, maquettes, mannequins, pyrotechnie) que les trucages purement cinématographiques, qu'il réalise par arrêt de la caméra ou surimpression (simple, multiple, sur fond noir, avec cache, fondu) ; enfin, le flou et même le travelling sont parfois utilisés.

Pour parvenir totalement à ses fins spectaculaires, Méliès construit à Montreuil-sous-Bois, en 1897, un studio cinématographique. « C'est la réunion de l'atelier photographique (dans des proportions géantes) à la scène de théâtre. » Il mesure 17 mètres sur 66, et sa toiture vitrée installée à 6 mètres du sol domine scène, fosse et machinerie théâtrale. Il ne reste plus à Georges Méliès qu'à donner libre cours à son imagination, ce dont il ne se privera guère : 503 films sont à ce jour recensés !

Le public s'émerveille devant ce cinéma « impossible », drôle, parfois violent, présentant d'ingénieuses machines (Escamotage d'une dame chez Robert-Houdin ; l'Homme à la tête de caoutchouc, 1901 ; le Voyage dans la Lune) ; il est ébloui par les actualités cinématographiques que Méliès reconstitue en studio (Explosion du cuirassé « Maine », 1898 ; Sacre d'Édouard VII, 1902) ; parfois, il est interpellé (Affaire Dreyfus, 1899 ; Civilisation à travers les âges, 1908 ; Incendiaires, 1906). Interpellé, Méliès, lui, l'est par la presse, qui proteste : son « Couronnement d'Edward » est une contrefaçon de théâtre — ce qui, bien sûr, est vrai !

Homme-orchestre, pour alimenter le programme cinématographique du théâtre Robert-Houdin, il remplit toutes les fonctions : producteur (il fonde en 1896 la Star-Film), scénariste, réalisateur, machiniste, acteur principal (Méphisto est son rôle favori), maquilleur, décorateur, monteur, distributeur (il vend ses bandes aux forains), exploitant, exportateur. Cette dernière activité se justifia par la nécessité de s'implanter à l'étranger, et plus particulièrement aux États-Unis (où il est représenté par son frère Gaston), car ses films étaient contretypés et contrefaits. Enfin, il possède son propre laboratoire de développement.