Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
C

CARDIFF (Jack)

directeur de la photographie et cinéaste britannique (Yarmouth 1914).

Fils d'acteurs, acteur enfant, Cardiff s'intéresse en grandissant à la technique et à la photo. En 1937, il est responsable des somptueuses couleurs de la Baie du destin (H. Schuster) et en 1939 des Quatre Plumes blanches (Z. Korda), ce qui lui assure une solide réputation de coloriste chatoyant et raffiné, qui ne s'est jamais démentie. La couleur lui inspire des compositions splendides, parfois audacieuses, complément idéal aux talents de Michael Powell et Emeric Pressburger : Question de vie ou de mort (1946), les Chaussons rouges (1948) mais surtout le Narcisse noir (1947) comptent parmi les plus séduisantes réussites du Technicolor. Sa collaboration avec Hitchcock (les Amants du Capricorne, 1949) sera moins flamboyante, mais tout aussi intelligente : la couleur, comme assourdie, devient le symbole d'un drame qui couve. Il a su illuminer Ava Gardner de nuances inoubliables, bleu nuit, vieux rose et mordoré : Pandora (Albert Lewin, 1951), la Comtesse aux pieds nus (J. L. Mankiewicz, 1954). Mentionnons encore sa contribution au documentaire de Pat Jackson : Western Approaches (1944), sa complicité avec John Huston pour African Queen (1952), les coloris sanguins des Vikings (R. Fleisher, 1958) et ceux, ocre, de la Cité disparue (H. Hathaway, 1957). Plus près de nous, la couleur élégante et nette de Mort sur le Nil (J. Guillermin, 1978) prouve que Cardiff reste l'un des premiers de sa profession. Mais il a préféré œuvrer comme cinéaste, avec des fortunes artistiques diverses. Ses films d'aventure (les Drakkars [The Long Ships], 1964) sont impersonnels, et il n'est pas à la hauteur de ses films ambitieux (la Motocyclette [Girl on a Motorcycle], 1968). Il termina cependant consciencieusement le Jeune Cassidy (Young Cassidy, 1965) commencé par John Ford, et il sut se tirer honorablement d'une délicate adaptation de D. H. Lawrence, Amants et Fils (Sons and Lovers, 1960), qui, malgré un affadissement de la matière littéraire, rendait avec une certaine force la réalité du milieu minier.

CARDINALE (Claudia)

actrice italienne (Tunis, Tunisie, 1938).

Élue à moins de dix-huit ans « la plus belle Italienne de Tunis », elle apparaît dans un film français tourné en Tunisie et vient à Rome suivre les cours du Centro sperimentale. Elle va gravir rapidement les échelons du vedettariat, passant des rôles de jeune beauté farouche (la Sicilienne du Pigeon) aux figures sophistiquées des films internationaux. Son corps parfait, ses yeux immenses, sa voix délicatement rauque font l'objet d'un lancement publicitaire intense de la part du producteur Franco Cristaldi. Elle a surtout la chance de mériter l'intérêt de grands cinéastes, tel Visconti, dont le Guépard la consacre. Elle a l'intelligence d'intégrer des traits nouveaux (notamment l'aspiration à la liberté : la Fille à la valise et, plus tard, Liberté mon amour, film méconnu de Bolognini) dans son personnage, au reste traditionnel, de jeune femme à la fois sensuelle et sentimentale. Séduisante dans la candeur comme dans la perversité, dans la dignité des films en costumes comme dans la fantaisie (depuis la Panthère rose), elle a paru longtemps dépourvue de dons dramatiques : faute peut-être d'une intuition juste de la part du metteur en scène. Mais elle n'a cessé de diversifier ses emplois, grâce surtout à ses expériences hollywoodiennes. Son rayonnement typiquement méditerranéen (avec le magnétisme particulier qu'il implique) et l'indépendance tranquille de son caractère font d'elle une des personnalités les plus attachantes du cinéma italien.

Films :

Goha le simple (J. Baratier, 1958) ; le Pigeon (M. Monicelli, 1958) ; Meurtre à l'italienne (P. Germi, 1959) ; Hold-up à la milanaise (N. Loy, id.) ; Austerlitz (A. Gance, 1960) ; Rocco et ses frères (L. Visconti, id.) ; le Bel Antonio (M. Bolognini, id.) ; I delfini (F. Maselli, id.) ; la Viaccia (M. Bolognini, 1961) ; la Fille à la valise (V. Zurlini, id.) ; Les lions sont lâchés (H. Verneuil, id.) ; Cartouche (Ph. de Broca, 1962) ; Quand la chair succombe (Bolognini, id.) ; le Guépard (L. Visconti, 1963) ; Huit et demi (F. Fellini, id.) ; la Ragazza (L. Comencini, id.) ; la Panthère rose (B. Edwards, 1964) ; le Cocu magnifique (A. Pietrangeli, id.) ; Sandra (Visconti, 1965) ; les Professionnels (R. Brooks, 1966) ; Il était une fois dans l'Ouest (S. Leone, 1968) ; La Maffia fait la loi (D. Damiani, id.) ; la Tente rouge (M. Kalatozov, 1971) ; les Pétroleuses (Christian-Jaque, id.) ; l'Audience (M. Ferreri, id.) ; Liberté mon amour (Bolognini, 1975) ; Violence et Passion (Visconti, id.) ; Il commune senso del pudore (A. Sordi, 1976) ; le Préfet de fer (Il prefetto di ferro [P. Squitieri], 1977) ; Bons Baisers d'Athènes (Escape to Athena [Georges Pan Cosmatos], 1979) ; Fitzcarraldo (W. Herzog, 1982) ; le Ruffian (J. Giovanni, 1983) ; Claretta (P. Squitieri, 1984) ; l'Été prochain (N. Trintignant, 1985) ; La storia (id., L. Comencini, 1986) ; Blu elettrico (Elfriede Gaeng, 1988) ; les Tambours de feu (S. Ben Barka, 1990) ; Atto di dolore (Squitieri, 1991) ; Mayrig (H. Verneuil, id.) ; 588 rue du Paradis (id., 1992) ; le Fils de la Panthère Rose (B. Edwards, 1993) ; Elles ne pensent qu'à ça (Charlotte Dubreuil, 1994) ; Un été à La Goulette (F. Boughedir, 1995) ; Sous les pieds des femmes (R. Krim, 1997) ; Riches, belles, etc. (B. Schpoliansky, 1998) ; Mein liebster Feind - Klaus Kinski (W. Herzog, 1999) ; Luchino Visconti (C. Lizzani, id.).

CARDIOÏDE.

Micro cardioïde, microphone dont le diagramme de directivité affecte une forme de cœur. ( PRISE DE SON.)

CARETTE (Julien)

acteur français (Paris 1897 - Le Vésinet 1966).

Il y a des leçons à tirer de la virtuosité de cet artiste qui, en trois répliques, fixe une silhouette, la grave dans les mémoires et s'égale aux plus grands le temps d'une apparition. Ni Prévert ni Renoir ne s'y sont trompés. Alors que Carette hésite sur son emploi, Pierre Prévert le fait surgir de L'affaire est dans le sac (1932) et Renoir lui choisit des rôles avec gourmandise : la Grande Illusion (1937) et la Marseillaise (1938), la Bête humaine (id.), et, admirable point d'orgue, la Règle du jeu (1939). Comédien de prédilection pour Autant-Lara, on le voit dans Lettres d'amour (1942), Occupe-toi d'Amélie (1949), l'Auberge Rouge (1951), le Bon Dieu sans confession (1953), le Joueur (1958), la Jument verte (1959), Vive Henri IV, vive l'amour (1961). Le plaisir vif de jouer la comédie qui émane de ce petit homme à l'œil malicieux et à l'accent gouailleur l'a mené de l'Odéon au Vieux-Colombier et le fait rechercher par Decoin (Battement de cœur, 1940), Carné (les Portes de la nuit, 1946 ; la Marie du port, 1950), Duvivier (la Fête à Henriette, 1952), Grémillon (l'Amour d'une femme, 1954). Pierre Prévert lui confie le rôle principal d'Adieu Léonard (1943). Carette sauve par sa cocasserie maintes comédies banales qui, sans lui, ne seraient que ce qu'elles sont.