Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
I

INCE (Thomas Harper) (suite)

Son entreprise la plus ambitieuse est certainement Civilization (1916), sans doute sa dernière réalisation effective quoique partielle. Par ce film, Ince comptait mettre un terme, en sa faveur, à la rivalité artistique qui l'opposa longtemps à D. W. Griffith. Ince répondait alors directement à Intolérance, que Griffith tournait à ce moment-là. Les deux films semblent avoir été des échecs financiers qui laissèrent en suspens la concurrence entre les deux cinéastes.

La carrière de Ince, sa personnalité volontaire aidant, ne fut pas des plus simples et il s'opposa à bon nombre de ses employeurs. Si bien qu'en 1919 il fonda, avec (entre autres) Allan Dwan, Mack Sennett, Marshall Neilan, l'Associated Producers Inc., qui disparut en 1922. Dès 1919 il créait les premiers studios de Culver City, au sud-ouest de Hollywood, qui furent achetés après sa mort par Cecil B. de Mille et qui, après plusieurs changements de propriété, s'intégreront en 1930 à la R.K.O. Malgré ses querelles et ses ennemis, Ince continuait, à tour de bras, à mettre des films en chantier. Il était en pleine activité quand, en 1924, il trouva la mort à bord du yacht de W. R. Hearst. On conclut à une mort naturelle, mais les rumeurs disaient que Hearst n'avait pas supporté de le voir flirter avec sa protégée, Marion Davies*.

Bien que toutes les histoires du cinéma parlent de lui, il est maintenant extrêmement difficile de voir les films associés à Thomas H. Ince. Si son nom reste toujours entouré de respect, on est cependant très peu informé de la véritable qualité de son travail. Vu maintenant, Civilization paraît lourd et maladroit, malgré une incontestable qualité technique. Sur la foi de ce film, on ne trouve pas chez Ince l'inspiration d'un Griffith, ni cette direction d'acteurs sensible et sobre. Jusqu'à nouvel ordre, c'est Griffith qui l'a emporté pour la postérité. Cependant, sur la foi de Human Wreckage (John Griffith Wray, 1923) et d'Anna Christie (Wray, 1923), il semble que les productions de Ince recèlent quelques trésors dont la découverte serait passionnante.

Films :

On croit que Thomas H. Ince fut responsable officiellement de la réalisation des films suivants : Little Nell's Tobacco (1910) ; Their First Misunderstanding (CO : George Loane Tucker, 1911) ; The Dream (CO : Tucker, id.) ; Artful Kate (id.) ; Behind the Stockade (CO : Tucker, id.) ; Her Darkest Hour (id.) ; A Manly Man (id.) ; In Old Madrid (id.) ; Sweet Memories (id.) ; The Agressor (CO : Tucker ; id.) ; The Indian Massacre (1912) ; The Deserter (id.) ; The War on the Plains (id.) ; The Crisis (id.) ; The Hidden Trail (id.) ; On the Firing Line (id.) ; Custer's Last Raid (id.) ; The Colonel's Ward (id.) ; The Battle of the Redmen (id.) ; When Lee Surrenders (id.) ; The Invaders (id., CO : Francis Ford, comme probablement tous les films de l'année suivante) ; The Law of the West (id.) ; A Double Reward (id.) ; A Shadow of the Past (1913) ; The Mosaic Law (id.) ; With Lee in Virginia (id.) ; Bread Cast Upon Waters (id.) ; The Drummer of the Eighth (id.) ; The Boomerang (id.) ; The Seal of Silence (id.) ; Days of 49 (id.) ; The Battle of Gettysburg (CO : Charles Giblyn, 1914) ; Love's Sacrifice (CO : William Clifford, id.) ; A Relic of Old Japan (id.) ; The Golden Goose (CO : Clifford, id.) ; One of the Discard (CO : C. Gardner Sullivan ; id.) ; The Last of the Line (1915) ; The Devil (id.) ; The Alien (id.) ; Civilization (1916).

INCIDENT.

Incidents de tournage, problèmes qui surviennent au cours du tournage. Parmi les incidents possibles, certains affectent la pellicule (rayures, déchirement, voile...) et nécessitent le retournage des plans sinistrés ou un sauvetage des éléments par des techniques numériques (analyse et numérisation des images, interventions graphiques et transfert sur pellicule).

INCRUSTATION.

Truquage vidéo, équivalent du cache-contre-cache.

INDE.

À l'hôtel Watson de Bombay, le 7 juillet 1896, a lieu la première représentation du cinématographe Lumière. Une longue aventure commence, qui allait faire de l'Inde d'aujourd'hui le premier pays producteur de films du monde, avec plus de 700 films par an (800 en 1983).

Dès janvier 1897, des films sont importés régulièrement d'Europe. L'année suivante, des Anglais prennent des vues de Bombay et de Calcutta. En 1899 est tourné le premier film indien : H. S. Bhatvadekar filme le combat de deux lutteurs, puis le dressage d'un singe. Plusieurs pionniers s'illustrent pendant cette période : F. B. Thanawalla, J. F. Madan, R. G. Torney. Mais c'est D. G. Phalke* qui, en 1913, avec ‘ le Roi Harishchandra ’ (Raja Harishchandra) réalise le premier film de fiction (quatre bobines), marquant ainsi les vrais débuts du cinéma indien.

Significativement, il s'agit d'un film mythologique. Ce genre, qui se développe aussi à Calcutta à partir de 1917, à Madras à partir de 1919, va caractériser tout un courant du cinéma indien qui, aujourd'hui encore, n'a rien perdu de sa popularité. Les deux épopées nationales, le Ramayaṇa et le Mahabharata fournissent une mine de scénarios pour de nombreux films destinés à satisfaire un public épris de ses divinités ; la production du sud de l'Inde en fait progressivement sa spécialité. De façon similaire, des films sont consacrés à la vie des saints, et même à celle du Bouddha (‘ Lumière d'Asie ’ [Light of Asia / Prem sanyas], 1925), de Franz Osten et Himansu Rai, coproduction germano-indienne.

Dès l'époque du muet, le cinéma indien s'essaie à des genres différents, le film historique, le film contemporain, et s'attache à des thèmes comme ceux de la famille, des castes, de l'opposition ville/village, qui resteront des genres et des thèmes de première importance.

Outre Phalke, plusieurs cinéastes majeurs émergent à cette époque : Dhirendranath Ganguly*, Debaki Bose*, Chandulal J. Shah, tous encore pratiquement inconnus en dehors de l'Inde.

Environ 1 280 films sont réalisés pendant l'ère du muet, dont treize seulement ont pu jusqu'ici être préservés. La cinémathèque indienne de Poona, qui ne désespère pas d'en découvrir d'autres, en assure le dépôt.