Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
A

ALMODÓVAR (Pedro)

cinéaste espagnol (Calzada de Calatrava, Mancha, 1949).

Il pratique divers métiers tout en écrivant des récits qu'il tourne lui-même en Super-8. L'un de ses premiers longs métrages, le Labyrinthe des passions (Laberinto de pasiones 1982), donne la clé de ses films à venir, mélodrames insolites et convulsifs où il met la provocation et l'humour noir au service de la pathologie des sentiments : Dans les ténèbres (Entre tinieblas, 1983), Qu'est-ce que j'ai fait pour mériter ça ! (¿ Que he hecho yo para merecer esto ?, 1984), Matador (1986), son chef-d'œuvre, la Loi du désir (La ley del deseo, id.). Après un détour par la comédie sophistiquée : Femmes au bord de la crise de nerfs (Mujeres al borde de un ataque de nervios, 1988), il est revenu à son inspiration première dans Attache-moi ! (Atame !, 1989), Talons aiguilles (Tacones lejanos, 1991), Kika (1993), la Fleur de mon secret (La flor de mi secreto, 1995), En chair et en os (Carne tremula, 1997), Tout sur ma mère (Todo sobre mi madre, 1999). Il est également le producteur de Acción mutante (Alex de la Iglesia, 1992), de El espinazo del diablo (Guillermo del Toro, 2001).

ALONZO (John A.)

chef opérateur américain (Dallas, Tex., 1934).

C'est l'un des chefs opérateurs les plus représentatifs des années 70 et 80. On a beaucoup vanté et imité la manière dont il a recréé le style photographique des années 40 à l'aide de couleurs raffinées dans Chinatown (R. Polanski, 1974) et dans Adieu ma jolie (D. Richards, 1975). Mais en fait son style est très varié et s'adapte facilement à celui du film ou du réalisateur. Avec Martin Ritt, il a créé un ton élégiaque et sans ostentation, faisant grand usage des extérieurs (Sounder, 1972 ; Conrack, 1974 ; Norma Rae, 1979 ; Cross Creek, 1983). Mais on lui doit aussi des pastels délicats (Harold et Maude, H. Ashby, 1971), des éclats baroques aux couleurs saturées (Scarface, B. De Palma, 1984) ou un hyperréalisme tranchant (Point limite zéro, R. Sarafian, 1971). Ensuite, son style est devenu plus anonyme (Potins de femmes, H. Ross, 1989), même s'il reste de temps à autre capable d'un projet original (la froideur de Affaires privées, Mike Figgis, 1990).

ALOV (Aleksandr) [Aleksandr Aleksandrovič Alov]

cinéaste soviétique (Kharkov, Ukraine, 1923 - Riga 1983).

Élève de l'Institut national de cinéma de Moscou (VGIK) dans la classe d'Igor Savtchenko, il est assistant de ce réalisateur pour Tarass Chevtchenko (1951) et, après la mort de celui-ci (1950), termine le film en compagnie de son camarade d'études Vladimir Naoumov, avec lequel il fera constamment équipe par la suite. Leur première réalisation commune, aux studios de Kiev, Jeunesse inquiète (’Trevožnaja molodost ‘, 1954), est une œuvre typique du dégel consécutif à la mort de Staline, dans la mesure où elle remet en question les clichés optimistes du réalisme socialiste. Pavel Kortchaguine (Pavel Korčagin, 1956), d'après le roman de Nicolas Ostrovski Et l'acier fut trempé, déjà adapté par Donskoï, est une puissante fresque épique sur la guerre civile où l'on peut déceler l'influence de Savtchenko. Après ces brillantes démonstrations de dynamisme juvénile, on note dans le Vent (Veter, 1959) une sensible évolution vers une recherche plastique, où le combat difficile des premiers komsomols se trouve transfiguré en poème visuel par le raffinement des images. Cette tendance au formalisme de la nouvelle vague soviétique (qui va éclater au grand jour dans le premier film de Tarkovski, l'Enfance d'Ivan), met simultanément en œuvre les ressources de l'impressionnisme et de l'expressionnisme ; elle est sensible aussi dans Paix à celui qui vient au monde (Mir vhodjaščemu, 1961), qui évoque le dernier jour de la guerre parmi les soldats russes en Allemagne et obtient le prix spécial du jury à la Mostra de Venise. En 1962, Alov et Naoumov réalisent un téléfilm d'après l'écrivain progressiste américain Albert Maltz, la Pièce de monnaie (Moneta). Leur film suivant, Une anecdote stupide (Skvernyj anekdot, 1966, d'après Dostoïevski), n'ayant pas reçu l'agrément des autorités, vraisemblablement à cause de sa satire de la bureaucratie, n'est pas distribué avant 1987. Dans la Fuite (Beg, 1971), ils adaptent de manière assez académique le roman de Boulgakov, la Garde blanche, sur les heurs et malheurs des émigrés ; puis ils montrent plus de verve dans la Légende de Till l'Espiègle (Legenda o Tile, 1976) d'après Charles De Coster. Enfin, on leur doit une superproduction historique, Téhéran 43 (1980), et l'adaptation d'un roman de Iouri Bondarev, le Rivage (Bereg, 1983).▲

ALTERNATIF.

Tireuse alternative, tireuse dans laquelle les films sont entraînés par un mécanisme d'avance intermittente. ( TIRAGE LABORATOIRE.)

ALTMAN (Robert)

cinéaste américain (Kansas City, Mo., 1925).

Sa très forte personnalité a marqué le cinéma américain des années 70. Mais les vicissitudes de sa carrière ne lui ont permis de s'épanouir pleinement qu'à l'âge de 45 ans. Si son nom a pu être associé à ceux de Scorsese ou Coppola, il n'appartient pas en fait à la même génération, et il a mené sa carrière en solitaire. Fils aîné d'un courtier d'assurances, il est élève chez les jésuites (sa mère est une catholique convertie). Après avoir obtenu son diplôme d'ingénieur mathématicien à l'université du Missouri, il entre à la Wentworth Military Academy et est mobilisé à la fin de la Seconde Guerre mondiale dans l'US Air Force, où il pilote des bombardiers. Rendu à la vie civile, il écrit des scénarios, des articles de journaux, des pièces radiophoniques, mène une vie de bohème à New York et s'occupe même de tatouage de chiens. De retour à Kansas City, il réalise entre 1947 et 1956 une vingtaine de films industriels, puis part pour Hollywood, ce qui lui permet de tourner, en 1957, son premier film, The Delinquents, suivi de The James Dean Story. Leur insuccès le conduit à travailler pour la télévision, où Alfred Hitchcock l'engage ; il tourne deux épisodes d'Alfred Hitchcock presents : The Young One (1957) et Together (1958). Il réalise ensuite de nombreux autres feuilletons jusqu'en 1963, date à laquelle il constitue à Westwood (Los Angeles) sa propre compagnie, Lions Gate Films, qui restera active pendant toute la décennie suivante. Deux films, Countdown (1968) et That Cold Day in the Park (1969) sont à nouveau des échecs commerciaux, bien que le second annonce par son thème et sa forme ses œuvres majeures.