Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
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NORVÈGE. (suite)

Cet appui des pouvoirs publics a probablement permis à une nouvelle vague de cinéastes d'approfondir un certain réalisme critique jusqu'alors voilé par l'abus des conventions narratives. Ainsi Anja Breien* (Wives [Hustruer], 1975 ; l'Héritage [Arven], 1979 ; ‘ la Persécution ’ [Forfølgelsen], 1981), Oddvar Bull Tuhus (‘ Grève ! ’ [Streik !], 1975 ; ‘ la Peur ’ [Angst], 1976 ; 50/50, 1982), Per Blom (‘ la Maison de maman ’ [Mors hus], 1974 ; les Femmes [Kvinnene], 1979 ; ‘ le Palais de glace ’ [Is slottet], 1987), Knut Andersen (‘ J'avais 15 ans ’ [Den sommeren jeg fylte 15], 1976), Laila Mikkelsen (‘ la Moisson ’ [Oss], id. ; la Petite Ida [Liten Ida], 1981 ; ‘ les Enfants de la terre ’ [Søsken på Guds jord], 1983), Svend Wam et Peter Vennerød (‘ Eux et nous ’ [Lasse og geir], 1976 ; la Majorité silencieuse [Det tause flertall], 1978 ; ‘ Vie et mort ’ [Liv og død], 1980 ; ‘ Victoria ’ L. [Leve sitt liv], 1982), Lasse Glomm (‘ Arrêtez ! ’ [At dere tore], 1980 ; ‘ Zeppelin ’, 1981 ; ‘ les Corbeaux ’ [Svarte fugler], 1983 ; les Lumières du Nord [Havlandet], 1985), Vibeke Løkkeberg (la Révélation [Apenbaringen], 1978 ; la Trahison [Løperjenten], 1981 ; ‘ l'Insoumise ’ [Hud], 1986), Sverre Udnaes (le Moment [øyeblikket], 1978) et Erik Solbakken (‘ la Danse ’ [Dansen], 1979), Ola Solum (‘ la Ceinture d'Orion ’ [Orions belte], 1985 ; ‘ Vagabonds ’ [Landstrykere], 1989), Oddvar Einarsson (X [id.], 1986), Martin Asphaug (Une poignée de temps [En Håndfull tid], 1989). Le film de Nils Gaup* le Passeur (1987), dont le titre original est Veiviseren en norvégien et Ofelas en lapon, est le premier film tourné dans cette langue parlée par une minorité de quelques dizaines de milliers de personnes. Ainsi une nouvelle génération de cinéastes émerge depuis la fin des années 80, grâce notamment aux aides publiques et au goût du public et des salles pour les films nationaux, à la coopération avec les pays voisins et à un accroissement notable du nombre de films produits depuis 1991. Après Anja Breien et la très revendicative Vibeke Lokkeberg, Unni Straume est une des représentantes les plus marquantes d'un cinéma qui compte beaucoup de femmes parmi ses plus fortes personnalités. Elle a fait un film très personnel en 1990, Cher inconnu (Til en ukjent), puis un film assez littéraire d'après Strindberg (le Songe [Draumspel], 1994).

L'actrice norvégienne Liv Ullmann*, célèbre pour sa participation à quelques grands films de Bergman, a réalisé en Norvège Kristin Lavransdatter (1995), après Sophie, tournée au Danemark. Berit Nesheim, quant à elle, se consacre principalement au film pour enfants – une production très soutenue ici comme au Danemark –, avec un goût très sûr et une énergie remarquable. Parmi les autres cinéastes apparus au début des années 90, il faut retenir Erik Gustavson (le Télégraphiste [Teleǵrafisten], 1992), Thomas Robsahn Tognazzi, fils de l'acteur Ugo Tognazzi et d'une réalisatrice norvégienne (Rebelles sans cause [Svarte pantere], 1992 ; S.O.S., 1999), Knut Erik Jensen (Stella Polaris, 1992), Hans Petter Blad (Hodiak, 1994), Marius Holst (Croix de bois, croix de fer [Ti kniver i hjertet], 1995), Hans-Petter Moland (le Dernier Lieutenant [Secondloitnanten], 1993 ; Zero Kelvin, (1995), Bent Hamer (les Œufs [Eggs], 1985 ; suivi de En dag til i solen, 1998), Pöl Sletaune (Junk Mail [Budbringeren], 1997), Erik Skjoldbjaerg (Insomnia, 1997). Dans le domaine de l'animation, Ivo Caprino avec son long métrage de poupées animées (‘ le Grand Prix de Flåklypa ’ [Flåklypa Grand Prix], 1975) se situe dans la lignée de Jiři Trnka.

NOUVELLE VAGUE.

Aux environs de 1960, de l'Europe centrale au Brésil, du Canada à l'Italie, le cinéma bouge. Des écoles nationales surgissent d'un quasi-néant, de vieilles cinématographies sont régénérées par une jeunesse irrespectueuse. Pour des raisons techniques (la mise au point de caméras légères, la généralisation de la prise de son synchrone, l'apparition sur le marché de pellicules plus sensibles, utilisables sans qu'il soit nécessaire d'inonder de lumière artificielle un décor construit en studio), le cinéma se libère. Le coût des films est abaissé, la sacralisation des fonctions est contestée. Ce n'est pas encore la caméro-stylo souhaitée par Alexandre Astruc. C'est pourtant une rupture avec les cadres (économiques, corporatifs, voire syndicaux) et avec les codes de l'industrie.

C'est en France que le phénomène universel de la Nouvelle Vague trouve à la fois son nom et son expression la plus achevée, et ce pour des raisons qui tiennent à l'histoire du cinéma français. Depuis le grand choc du passage au parlant qui l'avait secoué entre 1929 et 1932, il s'était figé dans une continuité que les aléas du Front populaire ou de la guerre mondiale avaient à peine entamée : les cinéastes de 1955, en France, sont vieux. Ils ont dans leur majorité fondé les règles d'un cinéma de qualité qui a connu son apogée à la fin des années 30. Un cinéma bâti sur trois piliers : un scénariste-dialoguiste, un studio où travaillent des techniciens, décorateurs ou chefs opérateurs, de très haut niveau, des comédiens enfin, talentueux et populaires. La machine est lourde, le recrutement de cinéastes neufs est rare, soumis à des règles sévères : les jeunes metteurs en scène des années 50 sont souvent des quadragénaires qui ont grandi dans le sérail, assistants pendant des années de cinéastes qui n'avaient plus rien à leur apprendre.

La Nouvelle Vague répond d'abord au besoin pressant d'un renouvellement des cadres. Entre 1958 et 1962, au moins 97 cinéastes réalisent et sortent un premier long métrage. C'est un phénomène de société, que la presse souligne.

À l'automne de 1957, l'Express avait publié une vaste enquête sur la jeunesse sous le titre : « La Nouvelle Vague arrive. » Un an plus tard, par un phénomène de réduction imprévisible, la Nouvelle Vague ne désigne plus que la jeunesse du cinéma. Un colloque organisé à La Napoule, en marge du festival de Cannes (1959), permet de faire le point. La Nouvelle Vague, ambiguë dès l'origine, a alors trois composantes :