Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
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MOGHERINI (Flavio)

décorateur et cinéaste italien (Arezzo 1922).

Il fait des études d'architecture et fréquente les cours du Centro sperimentale de Rome. Dès 1946, il crée les décors pour presque cent films de tout genre, surtout des comédies populaires et des drames historiques, dont : Lucia di Lammermoor (Piero Ballerini, 1946) ; Eleonora Duse (Filippo Ratti, 1950 ;  : 1947) ; Dans les coulisses (Steno et Monicelli, 1950) ; E'arrivato il cavaliere (id.) ; Gendarmes et Voleurs (id., 1951) ; Vacanze col gangster (D. Risi, 1952) ; la Marchande d'amour (M. Soldati, 1953) ; Ulysse (M. Camerini, 1954) ; Attila (P. Francisci, id.) ; le Souffle de la liberté (Andrea Chénier, Clemente Fracassi, 1955) ; les Jeunes Maris (M. Bolognini, 1958). Ses précieuses reconstitutions des villes de Rome et de Florence fin-de-siècle dans Policarpo, ufficiale di scrittura (M. Soldati, 1959) et dans la Viaccia (Bolognini, 1961) sont parmi les plus suggestives de tout le cinéma italien. En 1972, il débute à la mise en scène avec une comédie ironique et picaresque : Anche se volessi lavorare, che faccio ? Ses cinq films comiques successifs possèdent certaines qualités plastiques : Per amare Ofelia (1974) ; Paolo Barca, maestro elementare, praticamente nudista (1975) ; Culastrisce nobile veneziano (1976) ; Le braghe del padrone (1978) ; Per vivere meglio... divertitevi con noi (1978). Il a dirigé aussi un policier très stylisé : La ragazza dal pigiama giallo (1978).

MOGUY (Leonide Moguilevski, dit Léonide)

cinéaste français d'origine russe (Saint-Pétersbourg 1899 - Paris 1976).

Établi en France en 1929, il est d'abord monteur et réalise son premier film en 1936, le Mioche, un mélodrame « édifiant ». Suivront, dans le même registre lacrymo-social : le célèbre Prison sans barreaux (1938), plaidoyer en faveur de l'assouplissement du régime pénitentiaire (primé à Venise) ; le Déserteur (1939, que la censure, sourcilleuse, fit rebaptiser Je t'attendrai) ; l'Empreinte du dieu (1941), d'après le roman « réaliste » de Maxence Van der Meersch, quelques travaux obscurs aux États-Unis, dont un policier qui marque les débuts d'Ava Gardner, Tragique Rendez-Vous (Whistle Stop, 1946), et, enfin, de retour en Europe, une série de films traitant de « grands problèmes » : Demain il sera trop tard (1949, l'éducation sexuelle) ; le Long des trottoirs (1956, la prostitution) ; Les hommes veulent vivre (1961, la peur atomique), etc. Une carrière pavée de bonnes intentions, mais dépourvue de la moindre audace stylistique.

MOHOLY-NAGY (László)

artiste hongrois (Bács-Bodrog 1895 - Chicago, Ill., 1946).

Peintre, sculpteur, décorateur de théâtre, éditeur, collaborateur des revues Der Sturm, Ma et De Stijl, enseignant au Bauhaus (1923-1928) avant de diriger le New Bauhaus de Chicago (en 1937), il s'intéresse très tôt aux arts de la lumière. Auteur, dès 1922, peu après Schad et Man Ray, de photos sans appareil (photogrammes) et de photomontages, il construit de 1922 à 1930 une « machine-lumière » mobile en métal et verre, avec 120 ampoules de couleur et 5 projecteurs : il la filme dans Jeu de lumière noir-blanc-gris (Lichtspiel, schwarz-weiss-grau, 1930). Par ailleurs, il rédige en 1921-22 le scénario de ‘ Dynamique de la grande ville ’ (A Nagyvaros Dinamikaja), qui annonce les films de ville des années 20 mais qu'il ne tournera jamais. Faute de moyens, ses documentaires Nature morte berlinoise (Berliner Stilleben, 1926) ou Marseille Vieux Port (1929) restent en deçà de ce projet ou des films de polycinéma qu'il imagine dans son livre Peinture, photographie, film (Malerei, Fotografie, Film, 1925).

MOHR (Hal)

chef opérateur américain (San Francisco, Ca., 1894 - Santa Monica, Ca., 1974).

On lui doit le Chanteur de jazz (A. Crosland, 1927), premier film parlant. Parmi ses meilleures réussites (souvent dans le mélo ou le fantastique, qui ont sa prédilection) : Broadway (P. Féjos, 1929) ; le Songe d'une nuit d'été (W. Dieterle et M. Reinhardt, 1935) et le Fantôme de l'Opéra (A. Lubin, 1943). Ainsi, le charme idyllique de la Foire aux illusions (H. King, 1933, au demeurant assez peu typique du style de l'opérateur, mais qui contient des effets de pluie dignes d'une anthologie) est suivi par l'expressionnisme débridé du Mort qui marche (M. Curtiz, 1936). Il peut parfaitement transcender des couleurs approximatives par la ferveur de son travail (l'Ange des maudits [F. Lang, 1952]). Il collabora à l'Étau (A. Hitchcock, 1969), qui reste sa dernière contribution connue.

MOJA (Helene Gertrud Moyzysczyck dite Hella)

actrice allemande d'origine polonaise (Königsberg 1896 - Berlin 1937).

Hella Moja débute à l'écran en 1915 dans un film dirigé et interprété par Ludwig Trautmann : Der Krieg versöhnt puis obtient un contrat à la Decla, une société naissante dont le patron est Erich Pommer. Ce dernier la fait jouer dans plusieurs films mis en scène par Alvin Neuss puis l'incite à créer au sein même de la Decla une structure de production indépendante : la Hella-Moja Gmbh. Entre 1917 et 1922 cette société lance sur le marché une vingtaine de films souvent réalisés par Otto Ripper (Und wenn Ich lieb' nimm dich in Acht ! (1917), Die Königstochter von Travandore (id.), Gräfin Walewska (1920). Elle tourne Figaros Hochzcit (Max Mack, 1920) et Di Abenteuer der schönen Dorette (O. Rippert, id.) où elle incarne une femme de petite vertu qui participe joyeusement à la Révolution française. Longtemps rivale en popularité à Henny Porten elle espace ensuite le nombre de ses apparitions à l'écran et apparaît désormais davantage au générique comme l'auteur des scénarios de films tournés par son mari Heinz Paul (Die Strasse des Vergessens, 1925). À l'orée du cinéma parlant elle continue son œuvre de scénariste souvent en collaboration avec Alfred Schirokaeur.

MOLANDER (Gustav)

cinéaste suédois (Helsinki, Russie [auj. Finlande], 1888 - Stockholm 1973).

La carrière de ce cinéaste, aux talents aussi multiples que variés, s'étend de l'âge d'or du cinéma suédois jusqu'aux années 60. Il fait ses débuts au Théâtre royal de Stockholm, puis regagne sa Finlande natale pour se produire au théâtre de 1909 à 1911. Il revient en Suède en 1913 où, sans abandonner la scène, il s'essaye à l'écriture de scénarios pour Victor Sjöström et Mauritz Stiller, pour qui il écrit respectivement Terje Vigen (1916) et le Vieux Manoir (1922). Il réalise son premier film en 1920 ‘ le Maître de Boda ’ (Bodakungen). Contrairement à Sjöström et Stiller qui émigrent aux États-Unis, Molander reste fidèle au cinéma suédois, pour lequel il met en scène près de 35 films avant le début de la Seconde Guerre mondiale. En réalisant en 1931 un drame, ‘ Une nuit ’ (En natt), il offrait une contrepartie aux comédies dénuées d'artifices alors à la mode, puis, dans‘ les Swedenhielm ’ (Swedenhielms, 1935), il établit un modus vivendi fructueux avec l'acteur le plus prestigieux de l'époque, Gösta Ekman, que l'on retrouve dans son film le plus célèbre, Intermezzo (1936), avec la toute jeune Ingrid Bergman. Molander ne succombe pas à la sinistrose de rigueur dans la vie intellectuelle suédoise pendant la guerre : ‘ Chevauchée nocturne ’ (Rid i natt, 1942) confère un vif éclat à l'histoire de Vilhelm Moberg, qui, bien que censée se dérouler au Moyen Âge, dénonce implicitement le totalitarisme de l'Allemagne nazie. La Parole (Ordet, 1943) met en scène son confrère Sjöström dans une version naturaliste fort honorable de la pièce de Kaj Munk.