Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
B

BRECHT (Bertolt) (suite)

Si Brecht se méfiait du cinéma, dont les procédés pouvaient lui paraître en contradiction immédiate avec ses propres théories, visant à instaurer une distance entre les composantes du spectacle (et surtout entre le spectacle et le spectateur), il fut un grand consommateur de films. Il apprécia beaucoup, semble-t-il, la version originale de trois heures de la Madame Bovary de Jean Renoir, et tels épisodes ou procédés dramatiques de Maître Puntila ou d'Arturo Ui paraissent avoir été empruntés aux Lumières de la ville et au Dictateur de Chaplin, en qui il reconnaissait un génie.

Films :

l'Opéra de quat'sous (G. W. Pabst, 1931) ; Kuhle Wampe [Ventres glacés] (S. Düdow, 1932) ; Les Assassins sortent sur la route (V. Poudovkine et Youri Taritch, 1942) ; Les bourreaux meurent aussi (F. Lang, 1943) ; le Chant des fleuves (J. Ivens, 1954) ; Maître Puntila et son valet Matti (A. Cavalcanti, 1955) ; Mère Courage et ses enfants (Mutter Courage und ihre Kinder [Peter Palitzch et Manfred Werkwerth], 1960) ; le Capitaine de Cologne (Düdow, 1961) ; L'Opéra de Quat'sous (W. Staudte, 1963) ; la Vieille Dame indigne (R. Allio, 1964) ; Baal (V. Schlöndorff, 1969) ; Leçons d'histoire (J. M. Straub, 1972 ; adaptation des Affaires de M. Jules César).

BREER (Robert)

artiste et cinéaste expérimental américain (Detroit, Mich., 1926).

Après des études à l'université Stanford (Ca.), il peint à Paris de 1949 à 1959 dans la voie de l'abstraction ouverte par le Bauhaus. Intéressé par « ce qu'il y a entre mouvement et image fixe », il anime ses dessins et peintures (Form Phases, 1952-1954). En 1954, il fait le premier film de l'histoire du cinéma entièrement composé de plans d'un seul photogramme (Images by Images I). Comme dans Images by Images II, III et IV (1955-56), Motion Pictures (1956) ou Recreations (1956-57), toutes sortes de formes et parfois de découpages ou d'objets s'y suivent au galop et ce goût des joyeux mélanges va marquer toute l'œuvre d'un artiste peu soucieux des séparations (entre figuratif et non figuratif, dessin et photo, animation et prise de vues continue). Le résultat n'est pas toujours dépourvu d'intentions polémiques : Un miracle (1954), fait avec Pontus Hulten, est un collage anticlérical, tandis que Jamestown Baloos (1957), synthèse des précédentes techniques, est une pochade antimilitariste, PLB no 2 une sorte de tract antiraciste. Mais, le plus souvent, avec les accompagnements sonores les plus désinvoltes, le travail de Breer est purement plastique. A Man and his Dog out for Air (1957) évoque parfois des formes reconnaissables ; Eyewash (1959) annonce, dans son flux coloré, certains Songs de Brakhage. Blazes (1961) – cent fiches peintes battues et filmées –, Breathing (1963), sorte de film d'Eggeling jazzé, sont suivis par Horse over a Tea Kettle (1962) ou Fist Fight (1964), pots-pourris variés et complexes.

Tournés en extérieurs, Hommage to Jean Tinguely's « Hommage to New York » (1959) et Pat's Birthday (1962) échappent au documentaire par les trucages et la fantaisie. De 1966 à 1970, il revient à l'esthétique abstraite de ses débuts et ce sont 66, 69 et 70, dont les formes richement colorées miment parfois le film d'ordinateur. Après deux voyages au Japon, il met au point un nouveau type d'animation, dessinant le plus souvent d'après les photogrammes d'un film préalable (Gulls and Buoys, 1972 ; Fuji, 1974). Puis vient Etc. (1975). Parallèlement, Breer fait, comme Crockwell, des séries pour mutoscopes et crée des sculptures mobiles (floats).

BREIEN (Anja)

cinéaste norvégienne (Oslo 1940).

Elle a fait ses études à l'IDHEC (Paris). Son premier long métrage, le Viol (Voldtekt, 1971), critique acerbe du système pénal norvégien, affirme son implication dans les problèmes contemporains. Quatre ans plus tard, elle réalise Wives (Hustruer, 1975), la riposte féministe, pleine d'esprit et d'intelligence, à Husbands de Cassavetes, tourne ‘ le Jeu sérieux ’ (Den alvarsamma leken, 1977) puis fait montre de maturité avec l'Héritage (Arven, 1979), en disséquant les motivations égocentriques d'une famille bourgeoise après la mort d'un riche industriel. Le regard désenchanté qu'elle porte sur les structures sociales de la Norvège se révèle dans la Persécution (Forfølgelsen, 1981), qui rappelle par son sujet le Dies irae de Dreyer. Après le Cerf-volant (Papirfuglen, 1984), elle reprend en 1985 les personnages de Wives dans Wives II (Hustruer II), espérant ainsi tous les dix ans étudier leur évolution dans le temps. En 1990, elle signe ‘ le Voleur de bijoux ’ (Smykketyven) et, en 1995, Wives III.

BREJCHOVÁ (Jana)

actrice tchèque (Prague 1940).

Elle débute à treize ans dans Pentecôte rouge / le Pain de plomb (Olověny chléb, Jiři Sequens) et s'impose avec le Piège à loups (J. Weiss, 1957), Désir (V. Jasnÿ, 1958), Monsieur Principe supérieur (J. Krejčík, 1960), le Baron de Crac (K. Zeman, 1962) et la Nuit de la nonne (K. Kachyňa, 1967). Evald Schorm lui fait assumer une image nouvelle, plus mûre et fragile dans Du courage pour chaque jour (1964), le Retour du fils prodigue (1966) et la Fin du bedeau (1969). Elle le retrouvera, acteur, dans Fugues à la maison (J. Jireš, 1979) après beaucoup de rôles moins intéressants et tournera sous sa direction en 1988 l'Amour démesuré (qui sera l'ultime film du cinéaste). Elle interprète ensuite notamment ‘ les Points sensibles ’ (Citlıvá místa, V. Drha, 1988), ‘ Un château de sable ’ (Hráo z písku, Z. Zemanová, 1994), Lacrimosa (Má je pomsta, L. Zafranović, 1995), la Conception de mon petit frère (Pocetí mého mladsího bratra, V. Dhra, 2000). C'est sa sœur, Hana Brejchová (Prague 1946), qui joue dans les Amours d'une blonde (M. Forman, 1965).

BREL (Jacques)

chanteur, compositeur, acteur et cinéaste belge (Bruxelles 1929 - Bobigny, France, 1978).

Jusqu'en 1967, année où il joue dans les Risques du métier (A. Cayatte), le monde entier le connaît comme le remarquable auteur et chanteur de poèmes tendres et grinçants, parfois révoltés. En 1966, il abandonne la chanson pour le cinéma, où il se révèle être un excellent comédien. Il joue dans onze films, dont Mon oncle Benjamin (É. Molinaro, 1969), les Assassins de l'ordre (M. Carné, 1971) et l'Emmerdeur (Molinaro, 1973). Il a lui-même réalisé Franz (1972) et Far West (1973).