Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
G

GARFEIN (Jack)

cinéaste américain d'origine tchèque (Mukacevo, Tchécoslovaquie, 1930).

Rescapé d'Auschwitz, il est arrivé aux États-Unis en 1945. Homme de théâtre, adepte de l'Actor's Studio, il a assisté Elia Kazan (Baby Doll, 1956) et George Stevens (Géant, id.) avant de débuter au cinéma avec Demain ce seront des hommes (The Strange One, 1957). Il dirigea surtout sa femme Carroll Baker dans un beau film désespéré et original, Au bout de la nuit (Something Wild, 1961). Il a ensuite poursuivi sa carrière au théâtre.

GARFIELD (Julius Garfinkle, dit John)

acteur américain (New York, N. Y., 1913 - id. 1952).

Des études d'art dramatique menées grâce à une bourse (au sortir d'une maison de redressement) et entrecoupées de vagabondages à travers les États-Unis mûrirent assez l'ancienne « tête dure » de l'East Side pour qu'il rejoigne le Group Theatre en 1933. Vedette à Broadway (1936), il est engagé en 1938 par la Warner pour Rêves de jeunesse (M. Curtiz) et tournera presque tous ses films pour cette firme. Malgré la médiocrité de plusieurs d'entre eux, il s'impose comme une figure de « rebelle sympathique », au jeu très étudié sous son apparente nonchalance, et d'une grande générosité malgré son introversion. Ses meilleurs rôles sont à chercher dans Je suis un criminel (B. Berkeley, 1939) ; Juarez (W. Dieterle, id.) ; le Vaisseau fantôme (M. Curtiz, 1941) ; Air Force (H. Hawks, 1943) ; Pride of the Marines (D. Daves, 1945) ; Le facteur sonne toujours deux fois (T. Garnett, 1946) ; Humoresque (J. Negulesco, 1947) ; Sang et Or (R. Rossen, id.) ; le Mur invisible (E. Kazan, id.) ; l'Enfer de la corruption (A. Polonsky, 1948) ; les Insurgés (J. Huston, 1949) ; Trafic en haute mer (M. Curtiz, 1950) ; Menaces dans la nuit (John Berry, 1951). En 1951, Garfield, qui avait signé une pétition en faveur des « Dix d'Hollywood », est à son tour interrogé par la commission sénatoriale d'investigation : il refuse de donner le moindre nom, mais tient des propos anticommunistes. Ses sympathies « de gauche » sont cependant manifestes ; il n'obtient plus de travail et meurt d'une crise cardiaque, probablement consécutive à un profond drame moral. En dépit d'une campagne de presse abjecte, ses amis lui gardèrent leur estime. Il est devenu une figure quasi légendaire : objectivement, des acteurs comme Bogart et même James Dean lui ont dû beaucoup.

GARINE (Erast) [Erast Pavlovič Garin]

acteur et cinéaste soviétique (Riazan 1902 - Moscou 1980).

Acteur de la troupe de Meyerhold, petit, fluet, fureteur avec une lueur d'étrangeté et d'inquiétude dans le regard, il est voué aux rôles comiques. Parmi les films qu'il a interprétés, il faut citer le Lieutenant Kijé (A. Faïntsimmer, 1934), la Noce (Ženit'va, 1937, sous sa propre direction), À la frontière (Na granice, Aleksandr Ivanov, 1938), Une histoire musicale (Muzykal'naja istoria, Aleksandr Ivanovski et Herbert Rappaport, 1940), Ivan Nikouline, matelot russe (I. Savtchenko, 1945), Cendrillon (Zoluška, Nevena Kocheverova et M. Shapiro, 1947), le Revizor (V. Petrov, 1952), Alenka (B. Barnet, 1962). Réalisateur, il signe après son adaptation gogolienne de la Noce plusieurs films en collaboration avec sa femme Khesia Lokchina : Docteur Kalioujni (Doktor Kaljužnyj, 1939), le Prince et le Pauvre (Princ i nišij, 1943), le Pays des montagnes bleues (Sinegorija, 1946), le Petit Oiseau bleu (Sinjaja ptička, 1955), le Jet d'eau (Fontan, 1956).

GARLAND (Frances Gumm, dite Judy)

actrice américaine (Grand Rapids, Minn., 1922 - Londres, G. B., 1969).

Elle est certainement une des plus incontestables victimes du système hollywoodien ; et pourtant, Judy Garland, amoureuse de son métier, n'y aurait renoncé pour rien au monde. Enfant de la balle, elle se produit avec ses deux sœurs aînées. Mais quand ses sœurs se marient, sa mère la pousse vigoureusement à passer une audition devant Louis B. Mayer : elle a treize ans, et sa voix, déjà parfaitement formée, cuivrée, juste et claire, impressionne si fortement le boss de la MGM qu'elle est engagée sans bout d'essai. Prêtée à des studios concurrents pour ses deux premiers films, elle bouleverse l'Amérique à son troisième : fillette boulotte et peu gracieuse, elle chante sa passion platonique pour Clark Gable dans Broadway Melody of 1938. Au sein d'un film assez quelconque, cet instant d'émotion pure fait encore impression aujourd'hui.

Une étoile est née, comme le confirme le Magicien d'Oz en 1939. Petite paysanne à tresses, partie sur les routes des légendes, Judy Garland y laisse encore une fois, tout à coup, se dissoudre son apparence juvénile quand sa voix d'airain, rêveuse et plaintive, attaque cet Over the Rainbow qui restera, toujours, sa chanson fétiche. La MGM a vite fait de comprendre qui elle a sous contrat et très vite impose à l'adolescente un rythme de travail exténuant qui, finalement, a raison de sa santé et de son équilibre. Elle mène alors tambour battant, avec un Mickey Rooney fiévreux, sous la direction de Busby Berkeley, des comédies musicales trépidantes que l'intensité des deux interprètes fait s'envoler loin de toute frivolité. Elle passe bientôt, avec grâce, mais au prix de régimes draconiens, à des rôles d'adulte comme celui de la chanteuse de For Me and My Gal (1942).

Mais, en 1944, Vincente Minnelli lui donne un merveilleux rôle de jeune fille en fleur dans un musical doucement nostalgique : le Chant du Missouri. À cette époque, Judy est mariée au musicien David Rose. En 1945, elle épouse Minnelli et tourne sous sa direction un rôle sans musique dans The Clock : son jeu nerveux fait passer, dans cette comédie douce-amère, le sentiment désespéré de l'éphémère. En réalité, Judy est déjà malade, dépendante de tranquillisants et d'excitants. Ses retards et ses indispositions créent de fréquents problèmes au studio. En 1947, son mariage avec Minnelli n'est pas sans en souffrir, mais le cinéaste la guide de main de maître à travers les embûches d'une création incandescente dans le Pirate. En 1951, le mariage est rompu, et Judy, très malade, suicidaire, se voit rayer des listes de vedettes de la MGM après le tournage de la Jolie Fermière (1950), qui a été fort pénible.