Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
C

CASILIO (Maria Pia)

actrice italienne (L'Aquila 1935).

De Sica la découvre pour le personnage de la jeune servante de Umberto D. (1952), où elle s'identifie à son rôle candide et chaleureux. Son physique de joli petit moineau populaire enjolive ensuite une trentaine de comédies et de mélodrames, dont Stazione Termini (V. De Sica, 1953), Pain, amour et jalousie (L. Comencini, 1954), l'Air de Paris (M. Carné, id.), Amarti è il mio destino (Ferdinando Baldi, 1957) ou le Jugement dernier de Vittorio De Sica (1961), grâce à qui elle réapparaît à l'écran dans un de ses derniers films : Lo chiameremo Andrea (1972).

CASSAVETES (John)

cinéaste et acteur américain (New York, N. Y., 1929 - Los Angeles, Ca., 1989).

Fils d'un homme d'affaires grec, il débute comme comédien en 1953. On le remarque dans Face au crime (D. Siegel, 1956), l'Homme qui tua la peur (M. Ritt, 1957) et Libre comme le vent (R. Parrish, 1958), mais c'est en rupture complète avec Hollywood qu'il réalise Shadows. Financée par une souscription, photographiée en extérieurs réels, interprétée par des inconnus selon les méthodes encore balbutiantes du cinéma-vérité, cette « improvisation dialoguée » est saluée en 1960 comme le manifeste de la jeune école new-yorkaise (Shirley Clarke, Lionel Rogosin, Robert Drew, Richard Leacock, etc.). Sur une trame très mince (la solitude à New York, le racisme « ordinaire »), les acteurs apportent à leur personnage leur vérité propre. Cassavetes ébauche en 16 mm une nouvelle écriture cinématographique, libérée de la lourde machinerie de studio et du souci de la perfection technique : il privilégie le plan long, voire le plan-séquence, se refuse aux ellipses narratives, égalise temps forts et temps faibles, et se plie au rythme du langage parlé.

Dans la Ballade des sans-espoir, sombre chronique de la déchéance qui brise un musicien de jazz idéaliste, Cassavetes tente d'appliquer les préceptes de Shadows, mais se heurte à l'incompréhension de la Paramount. Après les déconvenues d'une seconde expérience hollywoodienne (Un enfant attend, qui est remonté contre son gré par le producteur Stanley Kramer), il revient au 16 mm et à la production artisanale avec Faces. Des dix-sept heures de film impressionné pendant cinq mois, il ne retient qu'une demi-douzaine de scènes paroxystiques. Ce n'est plus l'intrigue qui conduit le récit, mais la caméra : hypermobile, elle explore, débusque, met à nu la détresse des protagonistes en plans très rapprochés, superbement indécents. Disséquant la faillite des rapports conjugaux, Cassavetes traque l'individu (le visage) sous le masque social (les grimaces). Parallèlement à sa carrière de comédien (À bout portant de Don Siegel, Rosemary's Baby de Roman Polanski en 1968), il poursuit cette recherche dans Husbands, qui décrit la triste dérive de trois hommes mariés, et dans Ainsi va l'amour, qui réacclimate la comédie loufoque des années 30 dans le Los Angeles des névroses contemporaines.

Son œuvre maîtresse reste, à ce jour, Une femme sous influence (1974), portrait d'une mère déchirée entre plusieurs pouvoirs, entre plusieurs rôles, qu'incarne Gena Rowlands, épouse et inspiratrice du cinéaste. En totale indépendance (il produit et distribue lui-même le film), Cassavetes et ses proches se livrent à un happening concerté qui tourne par instants au psychodrame. Il ne s'agit pas de reproduire une réalité préexistante, mais de confondre durée filmée et durée vécue en créant une situation où les comédiens (professionnels et amateurs mêlés) puissent s'exprimer physiquement en toute impunité, en toute impudeur. Au mépris des canons arbitraires de la psychologie, le film épouse la mouvance de comportements imprévisibles, parcourant toute la gamme des émotions, de la comédie la plus débridée au mélodrame le plus strident. Comme Faces, il nous convie à une aventure existentielle unique, exténuante, et parfois terrifiante lorsque le regard s'attache aux seuls épiphénomènes (grimaces, larmes, bouffées d'angoisse, crises d'hystérie), là où on attendait une perspective, sociologique ou psychanalytique par exemple.

Dans le Bal des vauriens, dont l'hyperréalisme renouvelle la tradition du film noir, et dans Opening Night, où il retrouve Gena Rowlands pour un jeu pirandellien sur le théâtre, Cassavetes approfondit encore cet art de l'aléatoire. Il y fait une part plus belle que jamais à ses interprètes, voyant en eux la force créatrice fondamentale : « C'est l'intensité des émotions qui compte. Je veux que personne ne se sente coupable d'avoir quelque chose à communiquer. C'est la liberté d'exprimer ses propres profondeurs qui est révolutionnaire. » Tel est le propos de Gloria : la rencontre d'un orphelin portoricain et d'une comédienne ratée, tous deux traqués par la Maffia, marque les limites d'un désir qui ne peut s'accomplir que dans l'imaginaire. On ne triomphe pas du Système, mais les rêveurs et les artistes qui se mêlent de le défier ne sont-ils pas seuls à connaître l'ivresse de l'illusion ? Nul doute que cette fable touche de près le cinéaste, qui, à l'instar de ses créatures, toutes peu ou prou schizoïdes, est voué pour survivre à une double carrière in et off Hollywood. En 1984, il a obtenu le grand prix du festival de Berlin avec Love Streams.

Films (réalisation) 

Shadows (1961 [ 1957]) ; la Ballade des sans-espoir (Too Late Blues, 1962) ; Un enfant attend (A Child is Waiting, 1963) ; Faces (1968) ; Husbands (1970) ; Ainsi va l'amour (Minnie and Moskowitz, 1971) ; Une femme sous influence (A Woman Under the Influence, 1974) ; le Bal des vauriens / Meurtre d'un bookmaker chinois (The Killing of a Chinese Bookie, 1976) ; Opening Night (1978) ; Gloria (1980) ; Torrents d'amour / Love Streams (Love Streams, 1983) ; Big Trouble (1985).

Interprétation :

À bout portant (D. Siegel, 1964) ; les Douze Salopards (R. Aldrich, 1967) ; Rosemary's Baby (R. Polanski, 1968) ; Mickey and Nicky (Elaine May, 1977).

CASSEL (Vincent Crochon, dit)

acteur français (Paris 1966).

Fils de Jean-Pierre Cassel, il fait quelques brèves apparitions jusqu'à Métisse, le premier film de Mathieu Kassovitz ; le deuxième film de ce dernier, la Haine (1995), l'affirme auprès du public et de cinéastes très divers. Il passe de l'Élève (Olivier Schatzky, 1996), le Plaisir et ses petits tracas (Nicolas Boukhrief, 1998), ou l'Appartement (Gilles Mimouni, 1996) à des films d'action parfois très violents : Dobermann (Jan Kounen, 1997). Il participe à quelques films emblématiques de sa génération : les Rivières pourpres (M. Kassovitz, 2000), le Pacte des loups (Christophe Gans, 2001).