Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
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KLOPČIČ (Matjaž)

cinéaste slovène (Ljubljana, Slovénie, 1934).

Il fait des études d'architecture et devient en 1958 assistant du décorateur de cinéma Niko Matul. En 1960, il réalise son premier court métrage, Du côté du soleil (Na sončni strani ceste), essai poétique de cinéma-vérité suivi par deux autres courts métrages très remarqués. Après des études comme stagiaire à Stuttgart et à Paris, il débute dans le long métrage en 1966 avec Une histoire qui n'existe pas (Zgodba, ki je ni) : c'est la fable d'un géant en proie à la peur et qui parcourt le pays ; il y rencontre des hommes et des femmes dont il n'arrive pas à cerner la personnalité. Il dirige ensuite Sur les ailes en papier (Na papirnatih avionih, 1967), déchirante et élégiaque histoire d'amour dans des paysages enchantés. Le style littéraire et précieux de l'auteur s'affirme dans la Fête des morts (Sedmina, 1969), d'après le roman de Beno Zupančič : émouvante évocation des années de guerre vues par les yeux d'un jeune idéaliste qui va partir combattre comme partisan. L'année suivante, il crée une parabole politique sur le pouvoir, Oxygène (Oksigen), à la thématique insolite dans son œuvre, et, en 1972, Fleurs en automne (Cvtje v jeseni). Avec la Peur (Strah, 1974), il utilise un bordel de luxe fin de siècle pour décrire toute une société corrompue vouée à l'autodestruction. D'un style très différent, le Veuvage de Karolina Zasler (Vdovstvo Karoline Žašler, 1976) développe une satire féroce de la vie d'une petite communauté de province trop vite balayée par l'industrie. Avec Tourments (Iskanja, 1979), il revient à ses thèmes de la mémoire et du passé, imaginant l'aventure romantique d'un jeune clerc qui découvre en Italie la beauté de l'amour. En 1985, il signe Héritage (Dediščina) et en 1988, Mon papa koulak socialiste (Moj ota, socijalisticni kulak). Il est le talent le plus original de sa génération dans le modeste mais vivant cinéma de Slovénie.

KLÖPFER (Eugen)

acteur allemand (Rauhenstich-Talheim 1886 - Wiesbaden 1950).

Le cinéma l'accueille en 1918 après quelques années qu'il a consacrées au théâtre. Dès lors, il tourne beaucoup, et se fait remarquer dans des films de Hanns Kobe (Torgus, 1921), Karl Grüne (la Rue, 1923), Murnau, E. A. Dupont, Richard Oswald. La période nazie lui apporte les plus grands honneurs : directeur d'un des plus importants théâtres de Berlin, administrateur de la UFA, il est proclamé « acteur d'État ». Il trouve ses grands rôles dans Pygmalion (Erich Engel, 1935), Liselotte von der Pfalz (C. Froelich, id.), Jugend (V. Harlan, 1938), Friedemann Bach (Traugott Müller, 1941), la Ville dorée (Harlan, 1942).

KLOS (Elmar)

cinéaste tchèque (Brünn [auj. Brno], Autriche-Hongrie, 1910 - Prague 1993).

Après des études de droit, il choisit d'être scénariste et acteur (1926). À Prague (à partir de 1934), il se signale par ses activités de scénariste et de documentariste. En 1952, il s'associe avec Jan Kadar pour une longue et féconde collaboration (où il remplit surtout les fonctions de scénariste) marquée en particulier par le succès de la Boutique sur la grand-rue / le Miroir aux alouettes (Obchod na korze, 1965, Oscar du meilleur film étranger). Après l'exil de Kadar aux États-Unis, il s'est consacré à l'enseignement de la scénaristique puis à des travaux personnels. ( KADAR [Jan].)

KLUGE (Alexander)

cinéaste allemand (Halberstadt 1932).

Étudiant en histoire et en droit, il obtient le doctorat et s'établit comme avocat en 1958. Il s'intéresse au cinéma, devient assistant auprès de Fritz Lang (expérience qu'il juge décevante) et réalise plusieurs courts métrages en 1960-1962. En 1962, il est parmi les rédacteurs du manifeste d'Oberhausen, qui annonce le renouveau du cinéma allemand. Dirigeant l'Institut für Filmgestaltung de l'université d'Ulm, ce pionnier du nouveau cinéma crée (1963) sa propre société de production et contribue (1965) à la Fondation du curatorium du jeune cinéma allemand (qui financera de nombreuses premières œuvres). Il tourne en 1965-66 son premier long métrage, Anita G. (Abschied von Gestern), adapté d'une nouvelle qu'il a publiée dans son recueil Lebensläufe (1962). Couronné à Venise, ce film, qui révèle (avec le premier Schlöndorff) l'existence d'une Nouvelle Vague en Allemagne, annonce les constantes du style de Kluge (au-delà de certaines influences godardiennes) : importance du montage, procédés de distanciation, refus de tout esthétisme, recours à la voix off et au découpage en chapitres, insertion de séquences quasi documentaires, ironie dans la narration, critique sociale fondée sur une analyse des contradictions des personnages... Une puissante personnalité s'affirme dans les films suivants : les Artistes sous le chapiteau : perplexes (Die Artisten in der Zirkuskuppel : ratlos, 1967), film d'allure nettement moins réaliste, plus symbolique, plus nonsensique aussi ; Travaux occasionnels d'une esclave (Gelegenheitsarbeit einer Sklavin, 1973), un approfondissement de la méthode d'Anita G. En 1974, avec In Gefahr und grösster Not bringt der Mittelweg den Tod (CO E. Reitz), il mêle plusieurs récits et joue avec les mythes politiques et cinématographiques. La théorie du montage qui fonde ce dernier film triomphe dans la Patriote (Die Patriotin, 1979), dont les apparences de complexité (s'agissant de l'histoire de l'Allemagne et des difficultés de la relater) ne masquent ni la lucidité ni l'humour. En 1975, il avait renoué avec une méthode de narration plus linéaire dans Ferdinand le radical (Der starke Ferdinand), récit mettant en cause le culte allemand de la sécurité. Alexander Kluge a réalisé douze courts métrages de 1960 à 1977 et huit longs métrages. N'ayant jamais cessé de militer pour le cinéma indépendant, il a également contribué aux essais de film collectif à contenu politique : l'Allemagne en automne (Deutschland im Herbst, 1977-78), où ses séquences annoncent la Patriote, et le Candidat (Der Kandidat, 1980), film-pamphlet, mais surtout réflexion sur les mœurs politiques du pays, où l'on retrouve son humour et son sens du montage. En 1983, il tourne le Pouvoir de l'émotion (Die Macht der Gefülhe), après avoir participé à un film collectif : Guerre et Paix (Krieg und Frieden, avec Heinrich Böll, V. Schlöndorff, Stefan Aust et Axel Engstfeld) ; en 1986 Vermischte nachrichten et l'Attaque du présent sur le temps qui reste (Der Angriff der Gegenwart auf die übrige Zeit), un film mi-documentaire, mi-fictionnel. Il a publié de nombreux textes, dont Anita G. (Lebensläufe, nouvelles), Stalingrad, description d'une bataille (Schlachtbeschreibung), et des ouvrages sur la théorie du cinéma et les institutions. Depuis 1988, il se consacre à la réalisation d'émissions culturelles à la télévision.