Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
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JUGNOT (Gérard)

acteur et cinéaste français (Paris 1951).

Après des cours d'art dramatique, il fonde en 1974, avec Thierry Lhermitte et Christian Clavier, le café-théâtre du Splendid, et sera le coauteur des pièces à succès de la troupe. En même temps, au cinéma, il joue toute une série de petits rôles centrés sur les tares et avatars du Français moyen, à la fois vachard et sensible, jusqu'au film de Charles Nemes, Les héros n'ont pas froid aux oreilles (1979), qu'il cosigne. Les adaptations des pièces de café-théâtre à l'écran (les Bronzés, P. Leconte, 1978 ; Le père Noël est une ordure, Jean-Marie Poiré, 1982) font vite de lui une vedette ; il tourne notamment Pour cent briques, t'as plus rien (É. Molinaro, 1982) ; le Quart d'heure américain (Philippe Galland, id.) ; Papy fait de la résistance (J.-M. Poiré, 1983) ; le Garde du corps (F. Leterrier, 1984) ; les Rois du gag (C. Zidi, 1985), le Beauf (Yves Amoureux, 1987), Tandem (P. Leconte, id., l'un de ses meilleurs rôles), les Clés du Paradis (Ph. de Broca, 1991). Il passe au statut de coproducteur et d'acteur réalisateur avec Pinot simple flic (1984) ; le film trouve un succès public que ne connaîtra ni sa deuxième réalisation, Scout toujours (1985), ni sa troisième, Sans peur et sans reproche (1988). Toujours désireux de mêler comédie et thématique « sérieuse », il met en scène le décalage entre l'univers de gens simples et des événements exceptionnels : Une époque formidable (1991), Casque bleu (1994), Fallait pas (1996), Meilleur espoir féminin (2000) – tout en faisant évoluer son personnage d'acteur : Oui mais (Yves Lavandier, 2001).

JUGO (Eugenie Walter, dite Jenny)

actrice autrichienne (Mürzzuschlag, Steiermark, 1905).

Après avoir épousé — à seize ans — l'acteur Emio Jugo, elle aborde le cinéma en 1924, interprétant plusieurs films muets, dont Blitzzug der Liebe (Johannes Gutes, 1925) et Die Hose (Hans Behrendt, 1927), mais c'est au cours des années 30 qu'elle rencontre la popularité : Eine Stadt steht Kopf (G. Gründgens, 1932), Allotria (W. Forst, 1936). Elle obtient ses succès les plus significatifs sous la direction d'Erich Engel, dont elle est vedette attitrée : Wer nimmt die Liebe ernst (1931), Fünf von der Jazzband (1932), Pygmalion (1935), Mädchenjahre einer Königin (1936). Elle joue son dernier rôle dans Königskinder (H. Käutner, 1949).

JUILLARD (Robert)

chef opérateur français (Joinville 1906 - Paris 1982).

Technicien de talent, il s'impose, dans les années 50, comme un des meilleurs opérateurs de sa génération. Il fait preuve d'une grande sensibilité et d'une maîtrise technique rare. Il a dirigé la photo de nombreux films, dont : Allemagne année zéro (R. Rossellini, 1947) ; Amore (id., 1948)  ; le Journal d'un curé de campagne (R. Bresson, 1951) ; Jeux interdits (R. Clément, 1952) ; les Dents longues (D. Gélin, 1953) ; les Grandes Manœuvres (R. Clair, 1955 [COPH : R. Le Febvre]) ; les Diaboliques (H.-G. Clouzot, id.) ; Gervaise (Clément, 1956) ; Austerlitz (A. Gance, 1960 [COPH : H. Alekan]) ; le Rendez-vous (J. Delannoy, 1961).

JULIA (Raul)

acteur américain d'origine portoricaine (San Juan, Porto Rico, 1940 - Long Island, NY, 1994).

Très respecté au théâtre, Raul Julia a remarquablement tiré parti de son physique, latin jusqu'à la caricature. Les plus graves se souviendront du prisonnier politique, touché par l'amitié d'un homosexuel dans le Baiser de la femme araignée (H. Babenco, 1985) ou poursuivi par l'amour d'une femme dans Havana (S. Pollack, 1990). Les plus pointilleux retiendront le gigolo qui fait rêver les midinettes dans Coup de cœur (F. Ford Coppola, 1982) ou le Caliban de Tempest (P. Mazursky, 1982). Plutôt que dans ses prestations de mafieux suave (Tequila Sunrise, id., Robert Towne, 1989), le public lui fait un triomphe quand il incarne le chef de l'excentrique Famille Addams (The Addams Family, Barry Sonnenfeld, 1992), rôle loufoque et sinistre où son charme calamistré fait merveille.

JULIAN (Rupert)

cinéaste américain d'origine néo-zélandaise (Auckland 1889 - Los Angeles, Ca., 1943).

Ce réalisateur ennuyeux et terne a laissé un nom dans l'histoire du cinéma grâce à deux films qu'il signa et dont il ne fut que le demi-auteur. Il termina Chevaux de bois (Merry-Go-Round, 1923), qu'Irving Thalberg avait retiré à un Erich von Stroheim trop exigeant. Il réalisa le Fantôme de l'Opéra (The Phantom of the Opera, 1925), belle production de prestige qui porte surtout la marque du studio Universal et de l'acteur principal, Lon Chaney. Quant au reste, on pourrait chercher longtemps chez Rupert Julian la moindre trace de personnalité.

JUNGE (Alfred)

décorateur d'origine allemande (Görlitz 1886 - [?]1964), établi en Grande-Bretagne à partir de 1929.

Formé à l'école expressionniste : Escalier de service (P. Leni et P. Jessner, 1921), il accompagne le réalisateur allemand Ewald André Dupont en Angleterre pour construire les décors de Piccadilly (1929) et d'Atlantic (1929). Il travaille ensuite avec Victor Saville (The Good Companions, 1933), Hitchcock (l'Homme qui en savait trop, 1934), King Vidor (la Citadelle, 1938), Sam Wood (Good Bye Mr. Chips, 1939). À partir de 1943, les « Archers » (M. Powell et E. Pressburger) en font un de leurs collaborateurs les plus fidèles et lui commandent les décors de Colonel Blimp (1943) ; dans les Contes de Canterbury (1944), il reconstruit l'intérieur de la cathédrale dans les studios Denham ; il travaille aussi pour Je sais où je vais (1945), Une question de vie et de mort (1946), le Narcisse noir (1947 ; récompensé par un Oscar). Parmi les autres grandes réussites d'Alfred Junge : Ivanhoe (R. Thorpe, 1952) ; Mogambo (J. Ford, 1953) ; l'Adieu aux armes (Ch. Vidor, 1957).

JUNGHANS (Carl)

cinéaste allemand (Dresde 1897 - Munich 1984).

Il débute en 1925 comme monteur. Dans son premier film, Deux Mondes (Zwei Welten, 1925), il établit un parallèle entre le monde du travail et celui du plaisir. Avec bien des difficultés, il produit lui-même et tourne à Prague Telle est la vie (So ist das Leben / Takovy je život, 1929), œuvre naturaliste où l'on décèle l'influence conjointe du style des éclairages expressionnistes allemands et des théories soviétiques du montage. Deux grands comédiens, le Tchèque Theodor Pištěk et la Soviétique Vera Baranovskaïa, sont les protagonistes de cette chronique populiste efficacement valorisée par la puissance des images et des métaphores. Cette brillante réussite ne s'est pas renouvelée dans ses films suivants : Ombres fuyantes (Fremde Vogel über Afrika, 1931) ; Années décisives (Jahre der Entscheidung, 1937, montage d'archives) ; Un vieux cœur part en voyage (Altes Herz geht auf die Reise, 1939 ; d'après Hans Fallada). Il se réfugie en Suisse et en France en 1939, puis en 1940 aux États-Unis, où il a travaillé jusqu'en 1963 comme documentariste et photographe. Il s'est alors fixé en RFA.