Dictionnaire du Cinéma 2001Éd. 2001
W

WARHOL (Andrew Marhola, dit Andy) (suite)

Installé dans un vaste atelier qu'il nomme la Factory, Warhol crée une véritable cour autour de lui où se côtoient les membres reconnus de l'intelligentsia de l'époque (Jack Kerouac, Allen Ginsberg, Taylor Mead, Jack Smith) et toute une faune de nouvelles vedettes dont les noms renvoient à un étrange phénomène de fascination pour Hollywood : Baby Jane Holzer, Mario Montez, Viva, Edie Sedgwick, Ondine, Ingrid Superstar... Le succès de Warhol, aux diverses étapes de sa carrière, est dû à une attitude froide, distante par rapport aux sujets filmés, dont il se contente de reproduire les actes et les confessions sans les juger. Il promeut un art de la surface, sans intériorité, sans sentiments : un univers d'objets, d'automates. On note une continuité logique entre ses sérigraphies et ses premiers films : Sleep (1963), un homme qui dort pendant plus de six heures ; Empire (1964), une pellicule de huit heures composée d'une suite de bobines montées bout à bout et cadrant en plan fixe l'Empire State Building de New York. Le plasticien y développe une esthétique de l'ascétisme qui le classe parmi les pères du cinéma dit « structurel ». Il introduit une nette rupture dans le courant expérimental de l'époque en abandonnant tout recours au lyrisme ou à l'onirisme. À partir de Harlot (1964), il utilise le son dans ses films mais leur facture demeure toujours aussi brute, aussi relâchée. Toutefois, certains collaborateurs comme Ronald Tavel (Vinyl, 1965), Chuck Wein (My Hustler, id.) ou Paul Morrissey (The Nude Restaurant, 1967) conduisent Warhol à concevoir ses bandes avec un peu plus de soin. Ses œuvres de la dernière période (The Chelsea Girls, 1966 — qui connaît un succès foudroyant et passe dans plus de cent salles aux États-Unis ; Bike Boy, 1967) se présentent comme des documentaires, des essais sociologiques à mi-chemin entre la réalité et la fantaisie, sur une certaine faune artistique. Ses films, comme le Flaming Creatures de Jack Smith (1963), contribuent à assouplir la censure dans le pays. Victime, le 5 juin 1968, d'une tentative d'assassinat de la part de Valerie Solanas, une de ses « stars », Andy Warhol ne tourne plus, après Lonesome Cowboys (1968), personnellement. Son nom apparaît encore au générique d'œuvres comme Flesh (1968), Trash (1970), mais c'est Paul Morrissey qui les réalise.

WARM (Hermann)

décorateur allemand (Berlin 1889 - 1976).

Travaillant d'abord pour le théâtre, il se tourne vers le cinéma en 1912, et devient l'un des plus importants chefs décorateurs de l'expressionnisme. Peintre par vocation et architecte de formation, il met en œuvre ses deux spécialités dans la construction de décors pleins de reliefs. Le Cabinet du Docteur Caligari, R. Wiene, 1919) reste le premier film important auquel il a participé. Par la suite, il a collaboré avec les plus grands cinéastes allemands : Fritz Lang (les Araignées, 1920 ; les Trois Lumières, 1921), Friedrich Wilhelm Murnau (Schloss Vogelöd, id. ; le Fantôme, 1922), Georg Wilhelm Pabst (Comtesse Donelli, 1924 ; Un amour de Jeanne Ney, 1927). Il a aussi travaillé en France, notamment pour Carl Theodor Dreyer (la Passion de Jeanne d'Arc, 1928, et Vampyr, 1932). Travaillant d'abord avec des cinéastes fidèles au régime nazi (Jugend, V. Harlan, 1938, et Die Geierwally, H. Steinhoff, 1940), il s'exile ensuite en Suisse durant la Seconde Guerre mondiale. De retour dans son pays, il signe les décors de Wozzeck (G. C. Klaren, 1947), Hokuspokus (H. Hoffmann, 1953) et Die Botschafterin (H. Braun, 1960). Il a créé ou collaboré à de nombreux autres décors de films, dont : Liebe (P. Czinner, 1926), Dreyfus (R. Oswald, 1930) et l'Étudiant de Prague (A. Robison, 1935).

WARMERDAM (Alex Van)

cinéaste néerlandais (Haarlem 1952).

C'est dans ses activités d'auteur, d'acteur et de metteur en scène de théâtre qu'on doit rechercher l'origine de son approche très personnelle du cinéma, d'où tout réalisme est exclu. Flegmatique et ironique, évitant tout pathétique sans évacuer toute sensibilité, son style repose sur l'étrangeté d'un regard qui démasque les gens et les choses les plus ordinaires. Ainsi Abel (1986), où il joue le rôle principal, encore marqué par l'approche théâtrale, est un film à la fois subtil et cruel, émouvant et bouffon, qui décrit aux antipodes du naturalisme un milieu bourgeois et les affres d'une adolescence figée. De même les Habitants (De Noordlingen, 1992), qui commence comme une satire à la Tati, dévoile le grotesque des comportements sociaux dans un ensemble d'habitations visiblement inachevé au décor purement schématique. La Robe (De Jurk, 1996) accentue le malaise dans la succession échevelée de rencontres dont le trait d'union est une pièce d'étoffe devenue un habit qui passe d'un personnage à un autre. Little Tony (Kleine Teun, 1998) prolonge la démarche de ses premiers films, bien que son contenu social soit moins convaincant et que la critique l'ait moins bien accueilli.

WARNER BROS.

La Warner Bros a été fondée en 1923 par Harry, Sam, Albert et Jack L. Warner, quatre émigrants polonais dont le père, modeste artisan, s'était établi aux États-Unis vers 1890. Les quatre frères débutent en organisant des projections de courts métrages, accompagnées de numéros burlesques et musicaux. Pour assurer une meilleure rotation des copies, Harry fonde le premier groupement d'exploitants des États-Unis, la Duquesne Amusement Supply Company. Sam se lance ensuite dans la réalisation de westerns en deux bobines (sur des scénarios de Jack), et crée en 1912 une société de distribution à Los Angeles. Jack fait de même à San Francisco, puis installe avec Sam un service production à Los Angeles, tandis que Harry et Albert assurent, depuis New York, le financement et la distribution des films. En 1917, les frères Warner louent un petit studio dans le Bronx et y tournent l'un des premiers longs métrages américains de propagande, inspiré des souvenirs de l'ambassadeur James W. Gerard : My Four Years in Germany (W. Nigh, 1918). Le triomphe de ce film leur permet de construire leur propre studio sur Sunset Boulevard. Ils y produisent chaque année une moyenne de cinq longs métrages, avec une préférence marquée pour les drames sociaux et les films de gangsters (Parted Curtains, W. Nigh, 1921 ; Heroes of the Street, W. Beaudine, id.).