Dictionnaire de la Littérature 2001Éd. 2001
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Pascoaes (Joaquim Pedro Teixeira de Vasconcelos, dit Teixeira de)

Écrivain portugais (Amarante 1877 – id. 1952).

Issu du groupe Renascença Portuguesa, il inspira (1912-1917) un mouvement esthétique et doctrinaire, le Saudosismo (le « Nostalgisme »), proche de l'esthétique symboliste et considéré comme un développement du mysticisme panthéiste de la « génération de 70 ». Comme d'autres écrivains de sa génération, Pascoaes part d'un sentiment de frustration patriotique. Avec lui, l'apologie de la saudade, traditionnelle dans le lyrisme portugais, est élevée au rang d'intuition ethnique (Maîtresse de la nuit, 1909 ; le Fou et la Mort, 1913 ; Élégie d'amour, 1924) : le monde de l'imagination est le seul réel, le reste n'est qu'ombre vaine.

Pascoli (Giovanni)

Écrivain italien (San Mauro di Romagna 1855 – Bologne 1912).

Longtemps professeur de lycée, il succéda à Carducci à la chaire de littérature italienne à l'université de Bologne (1906). À l'exception de ses dernières œuvres, où il s'essaie précisément à rivaliser avec la grande manière patriotique de Carducci (Poèmes italiques, 1911 ; Poèmes du Risorgimento, 1913), l'originalité de son inspiration s'exprime dans l'effusion bucolique de Myricae (1891), le lyrisme intime des Chants de Castelvecchio (1903) et les tableaux rustiques de ses Petits Poèmes (1897), dédoublés ultérieurement en Premiers Petits Poèmes (1904) et Nouveaux Petits Poèmes (1909). Malgré l'étroitesse de sa thématique, la poésie de Pascoli annonce toute la poésie moderne italienne par la richesse et la subtilité de son invention lexicale et prosodique, qu'attestent également ses Poèmes latins (1914). La concomitance d'éléments stylistiques tels que les procédés prégrammaticaux (onomatopées), grammaticaux (usage du dialecte – archaïsmes) et postgrammaticaux (litanies de noms propres empruntés à des langues étrangères) fait que l'art de Pascoli oscille sans cesse d'une poétique de la nomenclature et de la détermination à une poétique de la pure évocation. Ses lectures symbolistes de Dante (l'Admirable Vision, 1902 ; Conférences et études sur Dante, 1915), ses nombreux essais et proses sont diversement reçus par la critique (Méditations humanistes variées, 1903 ; Pensées et discours, 1907).

Pashku (Anton)

Écrivain kosovar d'expression albanaise (Grazhdanik 1937 – Prishtinë 1995).

Influencé par Kafka, Faulkner et Orwell, il a contribué à ouvrir la littérature albanaise de Kosova sur les grands courants littéraires mondiaux à travers ses récits (Contes, 1961 ; Une partie de la naissance, 1965 ; la Tour, 1968 ; Gof, 1976 ; les Prières du soir, 1978), ses romans (Oh, 1971) et son théâtre (Syncope, 1968). Ses œuvres complètes sont publiées en 1982 en albanais.

Pasolini (Pier Paolo)

Écrivain et cinéaste italien (Bologne 1922 – Ostie 1975).

Autobiographie, idéologie et expérimentation sont les trois pôles de sa création. Son assassinat a relancé les interprétations passionnées et contradictoires auxquelles son œuvre n'a cessé de se prêter – d'Enzo Siciliano (Vie de Pasolini, 1978) à Dario Bellezza (Mort de Pasolini, 1981). Ses premières compositions rassemblées dans Poésies, 1943-1970 ainsi que ses poésies en dialecte frioulan, la Nouvelle Jeunesse (1954), s'enracinent dans un conflit aigu entre langue « paternelle » petite-bourgeoise et dialecte « maternel » archaïque et paysan. La découverte de Marx, qui lui permet de dépasser ce premier conflit, n'exclut pas la prise de conscience de tout ce qui échappe en l'homme à l'idéologie marxiste (les Cendres de Gramsci, 1957), voire la tentation d'un retour à la religion (Poésie en forme de rose, 1964 ; Trasumanar e organizzar, 1971). Ses romans (les Ragazzi, 1955 ; Une vie violente, 1959) tentent, dans une langue fortement mêlée de dialecte et d'argot, de dresser un tableau critique mais aussi nuancé de tendresse, du sous-prolétariat de la banlieue romaine. Alors que ses premiers films (Accattone, 1961 ; Mamma Roma, 1962 ; la Ricotta, 1963) s'inscrivent dans cette même lignée, ses œuvres cinématographiques ultérieures, tout comme son théâtre (Calderón, 1972), seront surtout des adaptations classiques (notamment l'Évangile selon saint Matthieu, 1964 ; Œdipe roi, 1967 ; Médée, 1969 ; le Décaméron, 1971). L'activité théorique de Pasolini, qu'il exerce en dirigeant des revues telles Nuovi Argomenti et Officina ou en écrivant des articles dans les journaux, est une partie fondamentale, sinon la plus significative, de son œuvre. Elle révèle en effet toute la verve polémique, le courage, l'anticonformisme de ses choix littéraires, politiques, existentiels (Passion et idéologie, 1960 ; l'Expérience hérétique, 1972 ; Écrits corsaires, 1975 ; Lettres luthériennes, 1977 ; Descriptions de descriptions, 1979 ; le Porche de la mort, posthume 1988, ainsi que ses anthologies Poésies dialectales du vingtième siècle, 1952, et Chansonnier italien, une anthologie de poésie populaire, 1954). Parmi ses autres écrits inédits, publiés après sa mort, on retiendra son roman inachevé Amado mio (1982), son dernier roman, Pétrole (1992), qui suscita encore des polémiques, et les Pages oubliées, antérieures à 1950 et qui parurent en 1980.

Pasquier (Étienne)

Magistrat, poète et historien français (Paris 1529 – id. 1615).

Juriste de formation, nommé commissaire pour réprimer à Poitiers et à Troyes les désordres civils, il fait preuve de qualités qui lui valent la charge d'avocat général (1585) à la Chambre des comptes. Pasquier a laissé une œuvre abondante et variée : un dialogue sur l'amour, le Monophile, publié en 1554 ; plusieurs recueils de poésie française et, surtout, néolatine, dont différents Tombeaux, un recueil d'Epigrammata (1582) et de Poemata (1585), des Lettres. Son maître ouvrage, les Recherches de la France, comprend 10 livres augmentés de 1560 à 1621. Les Recherches relèvent d'une défense et illustration gallicane du passé gaulois avec lequel il s'agit de faire renouer la nation française, par delà le poids de la culture romaine. L'originalité et l'intérêt des Recherches résident dans la conception, tout d'abord, que leur auteur se fait de l'histoire de la nation (à ses yeux, les événements politiques et militaires comptent moins que les institutions et l'organisation générale du pays) ; ensuite, dans la spécificité de leur propos, d'ordre essentiellement génétique (c'est l'évolution des institutions que Pasquier s'attache avant tout à décrire) ; dans leur méthodologie, enfin : même s'il s'est servi des travaux de ses devanciers, Pasquier est l'un des premiers historiens français à avoir utilisé des documents d'archives tels que les registres du parlement ou les mémoriaux de la Chambre des comptes.