Dictionnaire de la Littérature 2001Éd. 2001
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Desrochers (Alfred)

Poète canadien-français (Saint-Élie-d'Orford 1901 – Montréal 1978).

Excellent journaliste et critique (Paragraphes, 1931), il fut aussi animateur d'un « mouvement des Cantons de l'Est » et correspondant des meilleurs écrivains de l'époque. À l'ombre de l'Orford (1929) est le point culminant de son œuvre poétique : sonnets réalistes, hymnes robustes, marqués par l'influence américaine (Whitman), humour et nostalgie d'un « fils déchu de race surhumaine ».

Destouches (Philippe Néricault, dit)

Auteur dramatique français (Tours 1680 – Villiers-en-Bière 1754).

Le succès lui vint dès sa première pièce, le Curieux impertinent (1710), que suivirent l'Ingrat (1712) et l'Irrésolu (1713), le Philosophe marié (1727), le Glorieux (1732), la Fausse Agnès (1736), le Dissipateur (1736). Ce théâtre décent qui prise l'argent autant que la noblesse, et où les affrontements de classe se diluent dans l'opposition de caractères fades, se cantonne dans le « noble comique » et ouvre la voie à la comédie larmoyante et moralisatrice.

Destutt de Tracy (Antoine Louis Claude, comte)

Philosophe français (Paris 1754 - id. 1836).

Nommé par le Directoire membre du Comité de l'instruction publique, il participa avec ses amis de la société d'Auteuil à un double travail de réflexion philosophique et d'application politique. Il est aujourd'hui surtout célèbre pour ses Éléments d'idéologie (1801), qui donnèrent son nom au mouvement des « idéologues » et que prolongèrent une Grammaire générale (1803), où il propose une intelligente réforme de la langue, une Logique (1805) et un Traité de la volonté (1815).

Detambel (Régine)

Romancière française (Saint-Avold 1964).

Kinésithérapeute, elle explore dans ses romans les métamorphoses et les blocages du corps : fragilité cruelle de l'enfance (Elle ferait battre des montagnes, 1988 ; la Modéliste, 1990), révoltes de l'adolescence (la Verrière, 1996), engluement dans la vieillesse (le Long Séjour, 1991), maladie et sexualité (la Chambre d'écho, 2001). Dans la continuité revendiquée de Colette, elle scrute le réel à la loupe, d'un regard myope qui révèle la charge affective violente du quotidien. Son écriture concise, charnelle et souvent cruelle, met en scène la Comédie des mots (1997), recourt aux métaphores pour créer la surprise et aux contraintes oulipiennes pour débrider l'imaginaire (l'Écrivaillon, 1998).

Detrez (Conrad)

Écrivain belge de langue française (Roclenge 1937 – Paris 1985).

Dès son premier récit, Ludo (1974), histoire d'une enfance hantée par le feu et l'eau, l'interrogation de Detrez porte sur trois dimensions : politique, religieuse et sexuelle. Il poursuit son « roman de formation » avec les Plumes du coq (1975) et l'Herbe à brûler (1978). La Lutte finale (1980) ne retient que la corrélation du politique et du sexuel, comme la Ceinture du feu (1984).

Deubel (Léon)

Poète français (Belfort 1879 - Maisons-Alfort 1913).

Son œuvre (Léliancolies, 1901 ; Sonnets intérieurs, 1903 ; Vers la vie, 1904 ; la Lumière natale, 1905) montre, à travers des réminiscences symbolistes et parnassiennes, un poète partagé entre le défi et la détresse. Cette dernière finit par l'emporter puisqu'il se suicida un an après la parution de son recueil Ailleurs (1912). Il fut l'ami de Louis Pergaud.

deutérocanoniques (livres)

On appelle ainsi dans la Bible plusieurs livres dont l'appartenance au canon des Écritures a fait l'objet de discussions au cours des âges : Judith, Tobie, I et II Maccabées, Sagesse de Salomon, Siracide (ou Ecclésiastique), Baruch et la Lettre de Jérémie et les additions grecques aux livres d'Esther et de Daniel. Nous les possédons presque essentiellement en traduction grecque. Ils font partie du canon de l'Église catholique depuis le concile de Trente. Les Églises orientales n'ont jamais pris de décisions explicites à leur sujet. Les réformateurs protestants du XVIe siècle, tout en admettant leur caractère édifiant, leur ont dénié la canonicité ; les désignant du nom d'Apocryphes (« livres tenus cachés »), ils les ont placés en appendice de la Bible.

Deutéronome

De nombreux exégètes reconnaissent dans le « Livre de la Loi », trouvé en 622 av. J.-C. dans le Temple de Jérusalem (II Rois, XXII, 3-10), le premier état du cinquième livre du Pentateuque : le Deutéronome (« deuxième Loi »). Reflétant les traditions du royaume du Nord (mais composé peut-être à Jérusalem après la chute de Samarie en 722), ce livre dut être déposé dans le Temple durant le règne du roi Ézéchias. À la suite de sa découverte, son influence ne cessera de grandir avec le temps, ce qui explique les nombreuses étapes rédactionnelles qu'il connaîtra avant de parvenir à son état actuel. La Bible hébraïque le désigne par : Debarim (« Paroles »). Ce titre est significatif, car ce sont les paroles de Moïse, au pays de Moab, qui sont censées être rapportées dans le cours de cet ouvrage, dont les auteurs s'efforcent de remettre Israël face à l'essentiel : un Dieu, une terre, un peuple, une loi, un temple. La conclusion (les traditions sur la mort de Moïse, XXXI-XXXIV) sert en même temps de conclusion au Pentateuque.

Devaulx (Noël)

Écrivain français (Brest 1905 – Paris 1995).

Ses nouvelles et ses contes (l'Auberge Parpillon, 1945 ; le Pressoir mystique, 1948 ; Sainte Barbegrise, 1952 ; Bal chez Alféoni, 1956 ; la Dame de Murcie, 1961 ; Frontières, 1965 ; Avec vue sur la zone, 1974 ; le Lézard d'immortalité, 1977) mettent en scène des songes angoissants où le héros se voit confronté à une menace souvent impalpable, comme les insidieuses souches qui s'en prennent aux villageois dans la Plume et la racine (1979). Un univers fantastique se greffe sur la réalité quotidienne ou historique (Instruction civique, 1986), suivant une logique imaginaire très cohérente, comme une course à la mort ou un bal des chimères, entre souffrance et volupté.

Dewandelaer (Franz)

Écrivain belge de langue wallonne (Nivelles 1909 – Bruges 1952).

Le plus doué de sa génération, et le plus précoce, Dewandelaer acheva à vingt-cinq ans une œuvre commencée avec deux recueils inspirés par sa ville natale (Bouquet tout fait, 1933 ; le Monceau qui grandit, 1948, mais composé en 1930) : elle ne sera rassemblée qu'après sa mort dans l'édition des Œuvres poétiques (1970) ; il faut y ajouter Fragments de la nuit (1935), chœur parlé sur le monde du travail. Son lyrisme fougueux est à la mesure du sentiment de révolte qui anime ce poète épris de tendresse et de justice, et dont la virtuosité entrelace images et rythmes dans une technique de « boléro » qui fait le succès de ses « poèmes majeurs » : le Fou, le Prisonnier, le Mendiant, les Rues chaudes, l'Homme qui pleure.