Dictionnaire de la Littérature 2001Éd. 2001
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Ji Yun

Écrivain chinois (1724 – 1805).

Descendant d'une famille aristocratique, il occupe une place de premier plan dans l'histoire des lettres des Qing (1644-1911). Haut fonctionnaire, rédacteur en chef pendant treize années de la gigantesque encyclopédie (Siku quanshu) qui marqua la vie intellectuelle de son siècle, il s'éteignit à l'âge de 82 ans en laissant une œuvre personnelle immense dépassant largement le champ littéraire. Doué d'une curiosité que rien, pas même les rudesses d'un exil temporaire au Turkestan chinois, ne parvint à tarir, il prit goût, sa vie durant, à recueillir quantité d'anecdotes touchant les mœurs de ses contemporains. Ces « notes prises au fil du pinceau » (biji) couchées dans une langue classique directe, sans apprêt – mirabilia aussi surprenants les uns que les autres, faits rares et inexpliqués, récits mettant en scène esprits et démons –, furent réunies et publiées à partir de 1789 en cinq volumes sous le titre de Notes de la chaumière des perceptions subtiles. Sous cette forme, l'ouvrage constitue un ensemble impressionnant de quelque mille deux cents histoires, dont à peine une moitié présente un caractère narratif. Il ne doit son relatif oubli qu'à la confrontation avec le chef-d'œuvre incontesté de ce type de littérature, le Liaozhai zhiyi (Chroniques de l'étrange) de Pu Songling (1640-1715).

Jia Pingwa

Écrivain chinois (né en 1952).

Originaire du Shaanxi, il observe dès l'enfance les mœurs d'une humanité rurale à laquelle il appartient par toutes ses racines. Depuis 1977, il fait de la peinture du milieu paysan son sujet de prédilection : superstition et sexualité tiennent une place de choix dans ses descriptions naturalistes (le Porteur de jeunes mariées, 1992). Cet attachement à la paysannerie lui vaut d'être inclus dans la littérature de « recherche des racines ». Mais il doit sa notoriété à la Capitale déchue (1993), qualifié par la critique chinoise de roman pornographique ; autocensurée, l'œuvre confère à la grande ville les dimensions mythiques d'une énorme puissance corruptrice. Dans les années 1990, l'auteur choisit pour thème majeur les rapports ville-campagne : la première, séductrice diabolique, pourrit inéluctablement la seconde (le Village englouti, 1996), image d'un avenir où la Chine bascule de la ruralité dans la citadinité.

Jiang Qing

Personnalité politique chinoise (1914 – 1991).

Troisième épouse et veuve de Mao, elle régente toute la politique artistique pendant la Révolution culturelle (1966-1976), imposant les huit « pièces modèles » (yangbanxi), à la gloire des « héros positifs ». Membre de la « Bande des Quatre », elle est condamnée à mort en 1981 et se serait suicidée en prison.

jidaimono

Terme désignant les drames de kabuki et de ningyo-joruri traitant d'événements historiques ou pseudo-historiques situés avant l'époque d'Edo (1603-1867) et relatifs à la société aristocratique et guerrière. À l'exception des éphémères « pièces d'histoire vivante » (katsurekimono) du début de l'ère Meiji (1868-1912), ces « pièces d'époque » prennent de grandes libertés avec l'authenticité historique.

Jiménez (Juan Ramón)

Poète espagnol (Moguer, Huelva, 1881 – Porto Rico 1958).

Prix Nobel en 1956, il est l'héritier spirituel le plus accompli de R. Darío, maître du modernisme. Prince reconnu des poètes, il fonde à Madrid diverses revues (Indice, Sí) et exerce une influence notable sur la « génération de 1927 ». Il recherche l'essence même de la beauté, divinisée et adorée (Éternités, 1918 ; Unité, 1925). Il s'exile (1936) et poursuit son œuvre poétique (la Saison totale, 1946 ; Animal de fond, 1949).

Jippensha Ikku

Écrivain japonais (Shizuoka 1765 – Tokyo 1831).

S'étant d'abord essayé à Osaka comme auteur de joruri et après avoir tâté à divers métiers de petit négoce, il se rend à Edo en 1794, où il cherche à vivre de sa plume. Il rencontre le succès en 1802, avec les premiers livrets de Voyage par le Tokaido sur l'alezan Genou, dont la publication en feuilleton s'échelonne jusqu'en 1822. Ce roman comique (kokkei-bon) émaillé de vers burlesques (kyôka), qui raconte le voyage d'Edo à Osaka de deux joyeux farceurs, Kita et Yaji, est considéré comme un chef-d'œuvre de la littérature populaire.

Jirásek (Alois)

Écrivain tchèque (Hronov, près de Náchod, 1851 – Prague 1930).

Gardien du passé (Vieilles Légendes tchèques, 1894), il composa des romans historiques sur la période hussite (Entre les courants, 1887-1890 ; Contre tous, 1893 ; la Confrérie, 1899-1908), sur les années qui suivirent la défaite de la Montagne Blanche (les Têtes de chiens, 1884 ; les Ténèbres, 1913) et sur la renaissance nationale (F. L. Věk, 1888-1906). Il écrivit également des pièces (le Père, 1895 ; l'Émigré, 1898 ; Jan Žižka, 1903 ; Jan Hus, 1911 ; Monsieur Johanes, 1919).

Jñanesvar

Écrivain indien de langue marathi (Paithan 1271 – Alandi 1296).

La Jñanesvari (1290) ou Bhavarthdipika est une œuvre en prose rythmique qui paraphrase la Bhagavad-Gita pour ceux qui ne comprenaient pas le sanskrit : l'auteur illustre son exposé de comparaisons empruntées à la vie quotidienne ou à la nature et insiste à plusieurs reprises sur la nouveauté qu'il y a à présenter le texte sacré en langue locale, élevant celle-ci à la dignité de langue littéraire.

Job (livre de)

Il a été composé vers le Ve s. av. J.-C. Chef-d'œuvre de la littérature sapientielle, le Livre de Job a été élaboré à partir d'un conte populaire qui donne en exemple la patience d'un homme du pays d'Ouç, peut-être en Edom (I, 1). Le livre se présente sous la forme d'un dialogue poétique (III, 1 ; XLII, 6) inclus dans un ensemble rédigé en prose (I, 1 ; XLII, 7 ; XLII, 17). Job est un homme juste que Dieu permet à Satan de tenter. Trois amis s'efforcent de le persuader que sa souffrance est la rétribution pour son péché. Mais Job refuse leurs arguments. Un quatrième interlocuteur prétend trouver une solution dans la vertu éducatrice de la souffrance. Yahvé apparaît alors. Il découvre à Job les merveilles de la création et lui reproche ses plaintes. À la fin du livre, Job retrouve sa félicité première. Tout au long du Livre de Job, qui touche aux questions fondamentales de l'existence, des thèses contradictoires se heurtent : Dieu intervient finalement pour inviter Job à l'humilité devant un mystère qui le dépasse. Depuis les Moralia in Job de Grégoire le Grand, le commentaire de ce livre biblique fut l'une des bases de la culture monastique médiévale.