Dictionnaire de la Littérature 2001Éd. 2001
O

Olivétan (Pierre Robert, dit)

Écrivain français (Noyon 1506 – Ferrare 1538).

Cousin de Calvin, il se rallia très tôt à la Réforme et se fixa d'abord à Strasbourg (1528), puis dans le pays de Vaud, avant d'exercer à Genève la fonction de précepteur. On lui doit un traité pédagogique (l'Instruction des enfants, 1533) et une traduction française de la Bible d'après les textes hébraïques et grecs (1535).

Oller (Narcís)

Écrivain espagnol d'expression catalane (Valls 1846 – Barcelone 1930).

Son premier roman, le Papillon (1882), récit d'une séduction se terminant par une « réparation », est traduit en français avec une préface de Zola, ce qui lui assure une renommée européenne. Viennent ensuite Vilaniu (1885), la Fièvre d'or (1890-1893), La bogeria (1899) et Pilar Prim (1906). Le prestige de Narcís Oller diminua avec l'apparition du modernisme et d'un courant romanesque nouveau, dit « naturalisme rural », auquel il ne souscrivit pas. Auteur dramatique, il a également publié des nouvelles, dont la plus connue est L'escanyapobres (1884). Considéré comme l'introducteur du naturalisme dans le roman catalan, Oller s'écarte néanmoins de l'école française par son refus des situations et des expressions scabreuses, l'artifice de certains dénouements heureux et son manque d'intérêt pour la peinture des classes populaires.

Ollier (Claude)

Écrivain français (Paris 1922).

Ancien élève d'H.E.C., docteur en droit, mû par le désir de quitter l'Europe d'après guerre, il devient fonctionnaire de l'administration chérifienne au Maroc (1950-1955). La rencontre du monde arabo-berbère est fondatrice : c'est à partir de là, en effet, qu'il parvient à canaliser la « pulsion vers l'écriture » qui l'agitait depuis quelques années. La découverte éblouie de l'étranger (paysages, calligraphie, langue, culture, religion) le désoriente, bouleverse tout repère, ouvre à une poétique du partage et à une thématique de l'altérité.

   On voyage donc beaucoup dans son œuvre, des déserts africains de la Mise en scène (1958) aux pistes de Marrakch-Médine (1980), en passant par les touffeurs d'Été indien (1963). Errance géographique et invention de territoires se confondent (Outback ou l'Arrière-monde, 1995 ; Missing, 1998), de même que l'inspiration conjugue les principes d'incertitude et de distance (Déconnection, en 1988, devient Obscuration, en 1998). Au gré des Navettes (1967) concertées de l'écriture, l'aventure se fait projection plane dans un présent sans épaisseur ni perspective (l'Échec de Nolan, 1967), itinéraire hasardeux tracé sur une carte, à la lumière intérieure d'une lanterne magique. Ollier n'est pas un passionné de cinéma pour rien (Souvenirs écran, 1981). Ce défilement d'images masque la réalité plus qu'il ne la révèle, car plus l'archéologie met au jour de tablettes et de signes (Our ou Vingt Ans après, 1974), moins l'alphabet est déchiffrable (Une histoire illisible, 1986). D'où l'« arabesque » qui clôt Enigma (1973).

   Un temps associée au Nouveau Roman, l'œuvre d'Ollier rejette l'illusion référentielle (Mon double à Malacca, 1982), tandis que le conflit entre l'imaginaire individuel et les contraintes sociales l'amène à une contestation à la fois politique (le Maintien de l'ordre, 1961) et rhétorique, y compris dans le cadre de la science-fiction (la Vie sur Epsilon, 1972), dont il subvertit les stéréotypes. Cependant la technicité du vocabulaire masque mal l'angoisse face à l'infini cosmique, aux dilatations du temps, à un dédale universel que le sujet ne parvient pas à maîtriser, fût-ce au moyen de systèmes géométriques. Dans cette lutte dont « l'enjeu est la page blanche ; l'issue, le tracé des lignes » (Fuzzy Sets, 1975), l'auteur multiplie les brouillages et les déplacements esthétiques (Nébules, 1981 ; Truquage en amont, 1992 ; Aberration, 1997). Inventions lexicales, inversions syntaxiques, messages codés, mots tronqués, typographie iconoclaste, composition polyphonique : tels sont les traits de ce vaste Jeu d'enfant, que vient compléter un journal (Cahiers d'écolier, 1984 ; Fables sous rêve, 1985 ; les Liens d'espace, 1989).

Ollivier (Émile)

Écrivain haïtien (Port-au-Prince 1940).

Il a pu fuir in extremis le régime de terreur de Duvalier et rejoindre en 1965 le Canada, où il est devenu professeur à l'Université de Montréal. Auteur de nombreux essais politiques et sociologiques, il est surtout un puissant romancier. Voix originale de l'expression romanesque haïtienne, il a pour thèmes de prédilection l'exil et le chant de la terre natale (Mère-Solitude, 1983) ; la quête des racines (la Discorde aux cent voix, 1986), Passages, 1991) ; les exils (les Urnes scellées, 1995 ; Mille Eaux, 1999), l'enfance. Il a été élu membre de l'Académie des lettres du Québec en 2000.

Olonkho

Épopée orale iakoute.

Ensemble de textes narratifs, en vers (de 10 à 15 milliers) mêlés de prose rythmée, qu'unit un lien de thème et de style, l'Olonkho se développe entre les VIIIe-IXe s. (influences turco-mongoles et altaïques) et le XVIIe (présence russe) : reflétant, à travers la lutte des héros iakoutes (aïyy aïmaga : enfants de dieu) et des monstres agressifs du monde infernal (abaassy), la décomposition de la société clanique primitive, il oppose au désordre tribal un rêve d'harmonie sociale. Interprété sans accompagnement musical, mais avec des éléments de théâtralisation, par des bardes (olonkhosout), il fut au XXe s. collecté et élaboré par le poète Oïounski (Niourgoun-Bootour l'Impétueux, 1927).

Olson (Charles)

Poète américain (Worcester, Massachusetts, 1910 – New York 1970).

Son influence sur le renouveau poétique américain après 1945 fut déterminante, notamment à travers le groupe de Black Mountain College, où il était entouré de Franz Kline et de John Cage. Il se fit le théoricien du Vers projectif (1950), définissant le vers en termes de souffle et la poésie comme une « énergie cinétique ». Cette poétique s'affirme aussi dans ses essais critiques, qui allient analyses littéraires et visées anthropologiques (Appelez-moi Ismaël, 1947, sur Melville ; Lettres mayas, 1953 ; Univers humain et autres essais, 1965 ; Lettres pour une origine, 1969). Son œuvre dessine une histoire de l'Amérique où persistent des notations agrariennes. Elle se développe en une vaste entreprise d'évocation de la nation (The Maximus Poems, 1953, 1956, 1968), où s'unissent pièces lyriques, recherches expérimentales et références sociologiques, dans une visée totalisatrice proche de Pound et de William Carlos Williams.