Dictionnaire de la Littérature 2001Éd. 2001
A

Actes des Martyrs

On rassemble habituellement sous ce nom des récits, la plupart du temps anonymes et de valeur historique et littéraire très inégale, qui évoquent les persécutions subies par les premiers chrétiens. On distingue généralement trois types de documents : les procès verbaux du tribunal, plus ou moins remaniés (les Actes de S. Justin), qui sont des récits très dépouillés ; les rapports de témoins oculaires, qui portent le nom de Passions ou de Martyres (le Martyre de Polycarpe) ; les légendes de martyrs, le plus souvent destinées à légitimer un culte (le Martyre de S. Clément), qui sont de même nature que les Vies de saints, avec lesquelles on les confond parfois.

Actors Studio

École d'art dramatique fondée en 1947 à New York par Elia Kazan, auquel succéda Lee Strasberg, ancien directeur du Group Theatre. Strasberg tire de la méthode de Stanilavski l'accent mis sur la subjectivité de l'acteur, excluant presque toute distance critique. Cette démarche, contestée par les esthétiques de distanciation, a influencé à la fois le spectacle conventionnel et le théâtre expérimental.

adab

Mot arabe, notion clé lorsqu'il s'agit de comprendre la culture, les lettres, voire la société et la civilisation arabes, mais que l'on a parfois tendance à réduire, par commodité ou par abus, à un genre littéraire. Aujourd'hui, adab signifie aussi bien politesse, au sens fort du terme, que littérature ou lettres, mais ce mot a eu d'autres sens. Dérivé d'une racine renvoyant à l'idée d'usage, le terme indique à l'origine une pratique souhaitable, que l'on pouvait confondre avec la notion de sunna. Après l'installation de l'islam et l'octroi à la sunna d'un rôle clairement religieux, lié aux traditions prophétiques et au hadith, il semble que les premières codifications se soient attachées à dégager de l'adab une fonction qui fasse la différence, plus neutre, qui se démarque du religieux sans pour autant s'y opposer. Le développement de la littératrure arabe, sous le pavillon de l'adab, aussi bien en poésie qu'en prose, a assurément trouvé là l'un de ses meilleurs supports. À commencer par le livre d'Ibn al-Muqaffa' (m. 756), al-Adab al-kabir (le Grand Adab), livre peut-être fondateur. Celui-ci propose, comme son titre l'indique, un adab synonyme de règles de conduite, selon deux axes : premièrement, dans le cadre spécifique du pouvoir, un adab adressé au gouvernant (fuir la flatterie, ne pas céder à la colère, etc.) et au gouverné (savoir parler, être de bon conseil, garder le silence) ; deuxièmement, dans un cadre non hiérarchisé, il propose un adab du comportement, et particulièrement envers les amis (comment les choisir, quand se montrer généreux, patient). En partant donc de cet écrit, l'un des plus anciens du genre, et en faisant varier le mode de présentation des règles introduites, notamment en les accompagnant d'exemples, d'anecdotes, en faisant varier également le cadre, plus général ou plus spécialisé, auquel l'auteur désire appliquer ces règles, on parvient à grouper une importante quantité de livres, parfois fort distincts les uns des autres, mais qui demeurent tous, à cause de leur mode d'élaboration, et sans doute aussi de leur fonction, des livres d'adab. L'Adab al-'akl, que l'on peut traduire par la Politesse de la table,fournit au XIVe siècle un ensemble de recommandations qui concernent les modalités du boire et du manger, l'art de la table, conformément aux bonnes manières. De ce fait, il n'a qu'un lointain rapport avec la littérature. En revanche, si ces recommandations concernent la sphère de la parole, du langage, de la conversation, de la manière de l'engager et de l'entretenir sur tel ou tel sujet entre personnes cultivées, l'ouvrage prend immanquablement une tournure littéraire : car inciter le lecteur à faire preuve d'éloquence et d'esprit, c'est lui fournir des textes-modèles, des discours, des récits édifiants ou humoristiques, de beaux poèmes, bref une littérature dont la connaissance, à l'instar de l'art de la table, est jugée nécessaire, dans la civilisation arabe comme dans de nombreuses autres civilisations, à l'homme social.

Adam (Paul)

Romancier français (Paris 1862 – id. 1920).

Le parcours de ce romancier brillant et fécond, que certains en son temps comparèrent à Balzac, est représentatif des évolutions littéraires et idéologiques de la fin de siècle. Après la provocation de ses débuts naturalistes (Chair molle, 1885), il est acteur et témoin privilégié des années héroïques où s'affirment les mouvements décadents et symbolistes. Il contribue avec Fénéon, Méténier et Moréas au Petit Bottin des lettres et des arts en 1886. Il compose avec Jean Moréas en 1887 deux romans d'un symbolisme militant : les Demoiselles Goubert et le Thé chez Miranda, et signe sous le pseudonyme de Jacques Plowert un savoureux Petit Glossaire pour servir à l'intelligence des auteurs décadents et symbolistes en 1888. Les romans Être (1888) et En décor (1891) relèvent de l'ésotérisme et du subjectivisme symbolistes. Ouvrant ensuite son univers romanesque à des préoccupations plus contemporaines, à l'Histoire et à la politique, il publie des romans de mœurs (les Robes rouges, 1891 ; la Force du mal, 1896 ; l'Année de Clarisse, 1898), des romans antiques (Basile et Sophia, 1900 ; Irène et les Eunuques, 1907), un cycle de romans historiques (la tétralogie du « temps de la vie ») évoquant l'épopée d'une famille sous l'Empire et la Restauration (la Force, 1899 ; l'Enfant d'Austerlitz, 1902 ; la Ruse ; Au soleil de juillet, 1903). Son anarchisme de jeunesse a fait place à une pensée morale et politique de l'énergie, inspirée par Nietzsche, par Barrès (le Mystère des foules, 1895) et par les socialismes utopiques (les Lettres de Malaisie, 1898). Ses nombreux romans, très lus au tournant du siècle où Adam est devenu une personnalité reconnue de l'institution littéraire, pour ambigus parfois qu'ils soient sur le plan idéologique, témoignent d'une capacité surprenante à traduire dans des fictions originales et audacieuses (dont certaines vont vers la science-fiction) les questionnements et les débats de l'époque.