Dictionnaire de la Littérature 2001Éd. 2001
H

Hrubín (František)

Poète et auteur dramatique tchèque (Prague 1910 – Ceské Budějovice 1971).

Influencé par les classiques et une vision chrétienne de l'existence, il écrit plusieurs recueils d'un lyrisme mélodieux et méditatif (Belle en misère, 1935 ; Rayon de miel, 1940 ; la Terre-Parque, 1941). À la guerre (la Nuit de Job, 1945 ; Pain et Acier, 1945 ; Hiroshima, 1948) succède une inspiration plus distanciée (Métamorphose, 1957 ; Romance pour un clairon, 1962). Il a laissé des pièces (Un dimanche d'août, 1958 ; la Nuit de cristal, 1961) et un livre de souvenirs (Autour de la table, 1958).

Hu Feng (Zhang Guangren, dit)

Critique littéraire chinois (1902 – 1985).

Marxiste, disciple de Lu Xun, il s'oppose radicalement à Zhou Yang et à Mao à propos du réalisme en art : selon lui, la subjectivité en est un élément constitutif, irréductible. Jamais reniée, cette position théorique lui vaut vingt-cinq années de prison (1955-1979). Il est réhabilité et retrouve un rôle officiel en 1980.

Hu Shi

Philosophe chinois, théoricien de la littérature (1891 – 1962).

Après de brillantes études universitaires aux États-Unis (1910-1917), il joue un rôle important dans le mouvement du 4 Mai comme fervent promoteur (Suggestions pour une réforme littéraire, 1917) de la « langue parlée » (baihua) se substituant à la « langue classique » (wenyan). Résolument libéral, opposé à tout engagement politique, il quitte la Chine en 1949 et termine sa carrière à Taïwan.

huaju (« théâtre parlé »)

En Chine, théâtre à l'occidentale par opposition au théâtre classique, chanté. L'essor du genre, influencé par Ibsen et Tchekhov, est lié au mouvement du 4 Mai 1919. Comédies de mœurs ou tragédies, la critique sociale en est le matériau (Cao Yu, Xia Yan). Avec la guerre sino-japonaise (1937-1945), le huaju devient outil de propagande. Après 1949, avec la tyrannie des sujets imposés, le genre s'étiole et seule la pièce de Lao She, Maison de thé, vaut d'être retenue. Dans les années 1980, sous l'influence d'Artaud, de Beckett, de Ionesco..., un théâtre résolument moderne apparaît (Gao Xingjian).

Huch (Ricarda)

Poétesse et romancière allemande (Brunswick 1864 – Schönberg, Taunus, 1947).

Docteur ès lettres, elle commença sa carrière par des œuvres néoromantiques et une étude sur le romantisme allemand. Elle s'intéressa à l'histoire de l'indépendance italienne, puis à la guerre de Trente Ans (la Grande Guerre en Allemagne, 1912-1914). Marquée par la Première Guerre mondiale, fascinée par les grandes figures du passé, elle publia des études sur Bakounine, sur la révolution de 1848, des récits (le Dernier Été, 1910), des poèmes. Mise à l'écart dès 1933, elle resta en Allemagne et prépara une histoire de la résistance intérieure (la Révolte silencieuse, 1953).

Huchel (Peter)

Écrivain allemand (Berlin-Lichterfelde 1903 – Laufen, près de Fribourg, 1981).

Il fit la guerre sur le front russe. À son retour de captivité, il travailla à la radio de la zone soviétique d'occupation et devint, en 1949, rédacteur en chef de la revue Sinn und Form. Après sa démission forcée (1962), il ne fut autorisé à s'installer à l'Ouest qu'en 1971. Il a surtout écrit des poèmes (Chaussées, chaussées, 1963 ; Les jours sont comptés, 1972) : l'enfance à la campagne, ses voyages, la guerre sont ses sujets, et la nature, son réservoir d'images. Il en tire une poésie envoûtante et élégiaque, traduisant la détresse dans un monde inhumain.

Hudson (William Henry)

Écrivain anglais (Quilmes, près de Buenos Aires, 1841 – Londres 1922).

Ornithologue amateur, il parcourut l'Amérique latine, qu'il évoquera dans des récits où se retrouve sa perception quasi visionnaire de la nature : le Pays pourpre (1885), l'Ombu (1903) et son autobiographie (Là-bas, jadis, 1918) sont ainsi des classiques argentins. Ses évocations sensuelles de la campagne anglaise, qui débouchent sur le fantastique de Vertes Demeures (1904), lui vaudront l'admiration de Conrad.

Huelsenbeck (Richard)

Écrivain allemand (Frankenau 1892 – Muralto, Tessin, 1974).

Représentant l'aile gauche du mouvement Dada à Zurich (Prières fantastiques, poèmes, 1916), il oriente le dadaïsme berlinois vers un « communisme radical » (l'Homme nouveau, essai, 1917). En 1920, il publie des articles (« Dada vaincra », « L'Allemagne doit disparaître »), un roman « antiexpressionniste » (la Fin du docteur Billig), une histoire du mouvement (En avant Dada), édite le Dada-Almanach, organise la Foire dada de Berlin et rompt avec Tzara. Il cesse toute activité dadaïste en 1921, mais laissera des souvenirs (Avec humour, lumière et gruau, 1957).

Huet (Pierre Daniel)

Évêque et écrivain français (Caen 1630 – Paris 1721).

Sous-précepteur du Dauphin, évêque d'Avranches (1692), il fit figure d'arbitre du goût à qui La Fontaine adressa en 1687, à l'occasion de la querelle des Anciens et des Modernes, une Épître célèbre. Outre ses ouvrages historiques et théoriques sur la traduction, il reste l'auteur de la Lettre à M. de Segrais sur l'origine des romans (1670) : traitant le roman comme une expression de l'amour, il le voit comme la version en prose de l'épopée, capable d'assurer la formation culturelle et morale du lecteur.

Hughes (Edward James, dit Ted)

Poète anglais (Mytholmroyd, Yorkshire, 1930 – North Tawton, Devon, 1998).

Issu d'une famille modeste, il grandit dans une région déshéritée. En 1956, il épouse la poétesse américaine Sylvia Plath et il part enseigner à Amherst (Massachusetts). Hughes publie son premier recueil en 1957, le Faucon sous la pluie, où il chante les énergies de la nature. Le couple revient s'établir en Angleterre en 1959 ; suite à leur rupture, Sylvia Plath se suicidera en 1963. Romantique bourru, féru d'anthropologie, Ted Hughes dit la férocité du désir de survie pris dans les cycles naturels de la création et de la destruction (Wodwo, 1967 ; Corbeau, 1970). À partir des années 1970, son œuvre semble s'apaiser, devenir plus accessible ; la suite poétique Gaudete (1977) situe dans un village d'Écosse les rites dionysiaques. Créateur en 1968 de la Fondation Arvon, école d'écriture pour apprentis poètes, il collabore avec le metteur en scène Peter Brook pour inventer le langage « primitif » parlé dans le spectacle Orghast (1971). En 1984, il succède à John Betjeman comme poète-lauréat. Outre ses recueils poétiques, on lui doit une traduction des Métamorphoses d'Ovide (1998) et un ouvrage théorique (Shakespeare et la déesse de l'Être complet, 1992). Ted Hughes concevait le poète comme un « chaman », magicien investi d'une mission transcendantale.