Dictionnaire de la Littérature 2001Éd. 2001
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Ristikivi (Karl)

Écrivain estonien (Uue Varbla 1912 – Stockholm 1977).

Après trois romans sur différents milieux de la capitale estonienne, centrés respectivement sur un ouvrier (le Feu et le fer, 1938), un commerçant (Dans une maison étrangère, 1940, réédité en 1943 sous le titre : la Maison du juste) et un intellectuel (le Jardin, 1942), il s'exile en 1943 et s'installe en Suède, où il peint avec nostalgie l'atmosphère des dernières années de l'Estonie indépendante (Tout ce qui fut jamais, 1946 ; Il ne s'est rien passé, 1947). Il livre ensuite un singulier roman onirique (la Nuit des esprits, 1953) exprimant l'angoisse fondamentale de l'homme étranger au monde, puis se consacre au roman historique (l'Étendard en flammes, 1961 ; le Voile de la fiancée, 1965 ; les Dents du dragon, 1970 ; Journal romain, 1976). Il laisse également un recueil de poèmes marqué par la douleur de l'exil (le Chemin de l'homme, 1972).

Ritsos (Yannis)

Poète grec (Monemvassia, Péloponnèse, 1909 – Athènes 1990).

Poète engagé dans la Résistance puis dans la lutte contre la dictature, il connaît l'exil et la déportation. Très prolifique – il a publié plus d'une centaine de recueils –, il est le poète le plus populaire en Grèce et l'un des plus connus à l'étranger. Parti d'une forme classique (Chant funèbre, 1936), il adopte ensuite le vers libre (le Chant de ma sœur, 1937) ; le combat politique lui inspire de grandes compositions épiques (Grécité, 1947), puis sa poésie se fait plus personnelle. Dans les longs monologues dramatiques (la Sonate au clair de lune, 1956 ; Chrysothémis, 1972) comme dans les formes courtes, son œuvre se caractérise par son puissant lyrisme.

Rivarol (Antoine Rivaroli, dit le Comte de)

Écrivain français (Bagnols, Languedoc, 1753 – Berlin 1801).

Il tenta diverses professions avant de s'imposer dans les milieux parisiens par son esprit caustique et volontiers méchant. Il entreprit la traduction de l'Enfer de Dante. Son Discours sur l'universalité de la langue française fut couronné par l'Académie de Berlin (1784) ; il y défend avec des arguments obsolètes le principe d'une supériorité du français par sa logique et sa clarté. Il composa des pamphlets et des libelles contre le poète Delille, Mme de Genlis ou Necker. Systématisant la satire dans le Petit Almanach de nos grands hommes (1788), il se fit beaucoup d'ennemis littéraires, auxquels son Petit Dictionnaire des grands hommes de la Révolution (1790) ajouta des ennemis politiques. Ancien conseiller secret de Louis XVI, collaborateur du Journal politique et national, puis des Actes des apôtres, feuilles hostiles à la Révolution, il émigra à Bruxelles (1792), où il écrivit sa Lettre à la noblesse française et un violent pamphlet sur la Vie politique et privée de M. de La Fayette, à Londres, où il fut accueilli par Burke, puis à Hambourg (1795), où il anima un cercle d'émigrés. Il y rédigea de nombreux opuscules politiques, un traité philosophique De l'homme et de ses facultés philosophiques (1800), et travailla à un Nouveau Dictionnaire de la langue française dont il publia seulement le Discours préliminaire (1797).

Rivas (Ángel de Saavedra, duc de)

Homme politique et écrivain espagnol (Cordoue 1791 – Madrid 1865).

Exilé, il exprime son désespoir dans le Songe du proscrit (1824) et le Phare de Malte (1820). De retour en Espagne, Ferdinand VII étant mort, il reprend dans le Bâtard maure (1834), poème narratif en 12 longs romances, la légende des Infants de Lara, compose un drame en vers et prose (la Force du destin, 1835), qui marque l'avènement du drame romantique en Espagne, et des Romances historiques (1841), qui, inspirés des traditions nationales du romancero, ouvrent la voie à une forme de romantisme.

Rivaz (Alice)

Femme de lettres suisse de langue française (Rovray 1901 – Genthod 1998).

Fille du militant socialiste Paul Golay, musicienne, fonctionnaire au B.I.T. (qui lui fournit la toile de fond de plusieurs de ses romans), elle entreprend de problématiser les rapports de force souvent inégaux entre hommes et femmes. Nuages dans la main (1947) relate les intrigues et les déceptions de petits fonctionnaires, alors que la Paix des ruches (1947) entame les plaidoyers pour la cause des femmes, dont elle esquissera, sans jamais devenir polémique, le dépit amoureux, la solitude (Sans alcool, 1961 ; De mémoire et d'oubli, 1973). Sur le tard, A. Rivaz accédera à une belle sérénité dans Ce nom qui n'est pas le mien (1980) et Traces de vie (1983), et inaugurera des techniques romanesques originales, entre fiction et autobiographie, dans Jette ton pain (1979), peut-être son meilleur livre.

Rive (Richard)

Écrivain sud-africain d'expression anglaise (Cape Town 1931 – id. 1989).

Il est l'auteur de nouvelles (Chants africains, 1963), d'un roman (Urgence, 1964) en partie autobiographique, dans lequel il évoque plaisamment les relations interraciales en Afrique du Sud, et d'une pièce de théâtre (Traités comme des esclaves, 1972). Il a retracé sa carrière littéraire, ses voyages et ses rencontres avec des écrivains africains dans l'Écriture noire (1981).

Rivera (José Eustasio)

Écrivain colombien (Neiva del Huila 1889 – New York 1928).

Il fut influencé par les parnassiens et symbolistes français, notamment J. M. de Heredia, lors de la composition de plus de 160 sonnets réunis dans Terre promise (1921). Son unique œuvre en prose, la Voragine (1928), roman néoréaliste, « document sociologique et poèmes en prose » sur la vie des travailleurs du caoutchouc, eut une grande influence sur le développement du roman hispano-américain et fait de lui un des créateurs du roman moderne hispano-américain.

Rivière (Jacques)

Écrivain français (Bordeaux 1886 – Paris 1925).

Attiré d'abord par la peinture et la musique (Études, 1911), lié avec F. Jammes, F. Mauriac et Gide, il entra en 1910 à la N.R.F., qu'il dirigera de 1919 à sa mort. Fait prisonnier dès 1914, il s'ouvrit aux courants de réflexion européens (l'Allemand, 1918 ; Carnets, 1974). Outre ses romans (Aimée, 1922 ; Florence, 1935), sa Correspondance avec Paul Claudel (1926) et sa Correspondance avec Alain-Fournier (1926-1928) révèlent l'extraordinaire curiosité intellectuelle de la jeunesse lettrée à la veille de la Première Guerre mondiale. À la trace de Dieu (1925), De la sincérité avec soi-même (1926), De la foi (1928) marquent les étapes et les hésitations de son évolution religieuse.