Dictionnaire de la Littérature 2001Éd. 2001
A

Aimon de Varennes

Poète français du XIIe s.

Il est l'auteur d'un roman en vers, Florimont (1188) situé dans un cadre pseudo-oriental (Grèce et Macédoine), et contant le parcours d'un héros, Florimont, qui, forcé de renoncer à sa liaison avec la fée de l'île Celée, conquiert par sa vaillance l'amour et la terre de la fille d'un roi de Macédoine. Roman de fondation – le héros est l'arrière-grand-père d'Alexandre le Grand –, Florimont est aussi une réflexion sur l'amour et sur les vertus nécessaires à l'exercice du pouvoir.

Aïni (Sadriddine Saïdmouradovitch, dit)

Écrivain tadjik (Soktar 1878 – Douchanbe 1954).

Fils de paysan, gagné aux idées réformistes de A. Donich, il adhère au parti djadidiste, fonde une école, rédige des manuels et est incarcéré pour ses écrits antiféodaux (1917). Libéré par la Révolution, il se rallie au bolchévisme, qu'il propage par ses articles et ses vers (Marche de la liberté, la Mort de mon frère, 1918). Ses récits (les Bourreaux de Boukhara, 1920 ; Odina, 1924 ; Dokhounda, 1930 ; les Esclaves, 1934 ; la Mort de l'usurier, 1939) constituent une fresque épique des luttes du peuple tadjik de 1800 aux premiers kolkhozes, et une impitoyable dénonciation du régime féodal et du servage. Ses Mémoires (Boukhara, 1949-1954) livrent un précieux témoignage sur la vie sociale et intellectuelle du Turkestan à l'aube du XXes.

Ainsworth (William Harrison)

Publiciste et écrivain anglais (Manchester 1805 – Reigate 1882).

Après ses romans picaresques où il idéalise les criminels célèbres – ainsi Dick Turpin dans Rookwood (1834), puis Jack Sheppard (1839) –, il se convertit au genre « gothique historique » : la Tour de Londres (1840), l'Ancienne Cathédrale Saint-Paul (1841) et le Château de Windsor (1843) creusent le sillon ouvert en 1831 par Victor Hugo : comme Notre-Dame de Paris, les romans d'Ainsworth ancrent leurs intrigues dans un bâtiment bien réel.

Ajip Rosidi

Écrivain indonésien (Jatiwangi 1938).

Dès l'âge de 15 ans, il écrit et dirige une revue. Éditeur et animateur de périodiques, il participe au Conseil des arts de Jakarta et dirige, depuis 1971, la maison d'édition Pustaka Jaya. Son œuvre, très variée, gravite autour de deux thèmes principaux : le monde sundanais (Java-Ouest) et le contraste entre le village et la grande ville. Elle rassemble des poèmes (Fêtes, 1956 ; Recherche d'une cargaison, 1959 ; Lettres d'amour de Endaj Rasidin, 1960 ; Cascade, 1970 ; Serpent et Brume, 1973 ; Poèmes de l'enfant du soleil, 1979), des nouvelles (Années mortes, 1955 ; En famille, 1956 ; Une maison pour mes vieux jours, 1957 ; Retrouvailles, 1961), des romans (Voyage de noces, 1958), des pièces de théâtre (Masyitoh, 1969). Il est aussi l'auteur d'articles et d'ouvrages sur la littérature indonésienne et sundanaise (la Littérature sundanaise contemporaine, 1966), d'anthologies et d'adaptations d'œuvres littéraires sundanaises (Mer bleue, ciel bleu, 1977).

Akhmadoulina (Bella Akhatovna)

Poétesse russe (Moscou 1937).

Elle appartient à la « génération des années 1960 » (la Corde, 1962 ; Leçon de musique, 1969), celle d'Evtouchenko et de Voznessenski, et son œuvre, si elle eut un moindre retentissement, traduit bien le dynamisme de cette époque. L'aspiration au voyage et la création sont ses motifs de prédilection ; elle excelle aussi dans le genre méditatif et intimiste (Conte de la pluie, 1962 ; la Chandelle, 1977 ; le Secret, 1983 ; Au bord de la mer, 1991).

Akhmatova (Anna Andreïevna Gorenko, dite)

Poétesse russe (Odessa 1889 – Moscou 1966).

L'une des fondatrices, avec son premier mari, Goumiliov, de l'acméisme, elle publie d'abord des recueils qui renouent avec la période classique, pouchkinienne, et dans lesquels se fait sentir l'influence d'Annenski : le souci du mot juste et une construction dramatique font souvent de ses poèmes de véritables saynettes tout en concision et en non-dits. Ces recueils écrits dans une veine intimiste ont pour motif de prédilection l'amour douloureux, mais les sentiments sont toujours évoqués indirectement : l'introspection passe par le dialogue, la mise en scène d'une situation concrète. Le Soir (1912), Rosaire (1914) et Volée blanche (1917) sont couronnés de succès. Les événements historiques dont elle est témoin conduisent Akhmatova à réfléchir sur le rôle du poète dans l'Histoire (Plantain, 1921 ; Anno Domini MCMXXI, 1922). Pour elle, l'écriture poétique ne se conçoit que dans un ancrage national (dès ses premiers recueils, elle se plaît à recourir à des formes ou à des légendes populaires) ; c'est pourquoi elle refuse l'émigration, et cela malgré l'exécution de Goumiliov en 1921 (ils ont divorcé en 1918). C'est bientôt pour elle une longue période de silence ; elle accumule sans espoir de publication les vers du recueil Roseau (1924-1940) et de son futur Requiem (1935-1940). Ce dernier opus (publié en 1987), un long poème en dix chants dédié aux « (...) compagnes involontaires/ De ces deux années de terreur », est un témoignage sur sa douleur de mère victime (à travers son fils, qui fut arrêté à trois reprises) du stalinisme. La guerre marque pour elle une libéralisation provisoire, puisqu'elle est autorisée à publier dans la presse des vers dont le patriotisme est sincère. Mais elle est exclue de l'Union des écrivains, et donc réduite à la famine, même si elle se résigne, dans l'espoir d'adoucir le sort de son fils, toujours déporté, à écrire des vers à la gloire de Staline. Après le XXe  congrès, elle peut republier un choix de Vers lyriques (1961) et surtout, le Poème sans héros (1963), où elle fait le bilan historique et métaphysique d'une existence tragique.

Akhoundov (Mirza Fatali)

Écrivain azerbaïdjanais (Noukha 1812 – Tiflis 1878).

Destiné au clergé, il est détourné de la culture islamique par le poète Mirza Chafi. Interprète officiel à Tiflis, il découvre grâce aux décembristes exilés la pensée démocratique russe et compose, en 1837, une Ode sur la mort de Pouchkine. Ses comédies (l'Alchimiste, M. Jordan botaniste, le Vizir de Lenkoran, 1850 ; l'Avare, 1852 ; les Avocats de Tabriz, 1855) dénoncent les mœurs patriarcales, la déchéance de la noblesse, l'arbitraire administratif et le fanatisme. Ce tableau critique de la société se prolonge dans sa satire antimonarchiste, sans une fiction orientale, les Étoiles dupées (1857). Son traité philosophique (Trois Lettres de Kémal-ud-Dovlé, 1864-1865) expose une vision matérialiste qui a influencé les esprits progressistes de Turquie et d'Iran.