Dictionnaire de la Littérature 2001Éd. 2001
I

Iglesias (Ignasi)

Auteur dramatique espagnol de langue catalane (Sant Andreu del Palomar 1871 – Barcelone 1928).

Proche du groupe de L'avenç, il fut influencé par Ibsen (le Remords, 1890 ; L'escurçó, 1894), avant de mettre en œuvre, dans des drames «  engagés » , une sorte de symbolisme naturaliste (le Cœur du peuple, 1902 ; les Gars, 1906 ; Foc nou, 1909 ; les Émigrants, 1916).

Ignatow (David)

Poète américain (Brooklyn, New York, 1917 – New York 1997).

Reconnaissant l'influence de William Carlos Williams, d'un certain réalisme libéré des contraintes formelles puis du surréalisme, il tente par sa poésie de faire de sa vie une « métaphore des temps ». Pour lui, l'écriture est acte d'indépendance et quête d'un équilibre, qui lui « enseigne comment mourir demain ». Exigeants, ses poèmes (Poèmes complets, édition augmentée 1970-1985, 1986 ; Contre l'évidence : Poèmes choisis 1934-1994, 1993) relient conscient et inconscient, dans un monde onirique et sombre énergisé souvent par la colère.

Ikinci Yeni (Seconde Modernité)

Ce courant poétique, qui concentre l'ensemble des aspirations à un renouvellement de l'écriture poétique des années 1950 (en opposition au courant Garip), est parfois hermétique, privilégiant la métaphore et marqué par le modernisme anglo-saxon comme par les surréalistes. Plusieurs générations de poètes s'y retrouvent, entre autres Oktay Rifat (1918-1988), Ilhan Berk (1918-), Turgut Uyar (1927-1985) ou Ece Ayhan (né en 1931).

Ikor (Roger)

Écrivain français (Paris 1912 – id. 1986).

Auteur d'essais historiques (l'Insurrection ouvrière de juin 1848, 1936) et littéraires (Mise au net, sur Zola, 1957), il évoque avec le cycle des Fils d'Avrom (la Greffe de printemps et, surtout, les Eaux mêlées, 1955) l'acculturation d'une famille juive en France au cours du temps, puis un tissu social déchiré dans Si le temps (le Semeur de vent, 1960 ; la Ceinture du ciel, 1964 ; Frères humains, 1969) et la vanité des théories prétendant y remédier (le Cœur à rire, 1978). Son enquête est plus angoissée avec la vieillesse (l'Éternité dernière, 1980). Le suicide de son fils lui suggère un regard douloureux sur les sectes, parodie de vie spirituelle dans un monde sans âme (Je porte plainte, 1981 ; la Tête du poisson, 1983 ; les Fleurs du soir, 1985).

Ilf Et Petrov

Nom de plume de deux écrivains soviétiques, Ilia Arnoldovitch Faïnzilberg (Odessa 1897 – Moscou 1937) et Evgueni Petrovitch Kataïev (Odessa 1903 – Sébastopol 1942).

Auteurs de feuilletons dénonçant dès 1923 le retour aux mœurs bourgeoises et à la bureaucratie, ils publièrent en collaboration des romans picaresques très populaires (les Douze Chaises, 1928 ; le Veau d'or, 1931), dont le héros, le « grand combinateur » Ostap Bender, dévoile, sous la fiction d'une chasse au trésor, l'univers éphémère d'affairisme qui prospérait à l'ombre du socialisme en construction. La grande réussite d'Ilf et Petrov est d'avoir su devenir un seul auteur : ils maîtrisent l'humour à la perfection et, en des récits extrêmement gais et enlevés, portent sur l'U.R.S.S. naissante un regard si acéré et si lucide qu'ils seront victimes post mortem en 1949, d'une violente campagne critique : leurs œuvres ne seront republiées (expurgées) qu'au moment du dégel.

Ilhan (Attila)

Écrivain turc (Menemen 1925 – id. 2005).

Il se fit d'abord connaître comme poète (le Mur, 1946), puis écrivit des scénarios et des articles dans la presse sous le nom d'Ali Kaptanoglu. Ses recueils lyriques (le Fugitif de la pluie, 1955 ; l'Amour interdit, 1968 ; la Journée d'un détenu, 1974) et ses premiers romans (l'Homme de la rue, 1953 ; À la table des loups, 1963-1964) mêlent « réalisme social » et révolte romantique. Au cours des années 1978 à 1987, il publie un cycle de cinq romans qui couvrent l'ensemble du XXe s. : « Ceux qui sont dans le miroir ». On lui doit aussi des essais politiques (Quelle gauche ?, 1971 ; Quelle droite ?, 1980) et sociologiques qui sont parmi les plus incisifs de la littérature turque actuelle.

Illyés (Gyula)

Écrivain hongrois (Rácegres 1902 – Budapest 1983).

Après l'échec de la Commune hongroise, il s'exila à Paris, où il se lia avec les poètes surréalistes. Rentré dans son pays (1925), il s'imposa comme poète (Terre lourde, 1928 ; Regain, 1929 ; Sous des cieux en mouvement, 1935), succédant à Babits, en 1941, à la direction de la revue Nyugat (Occident), qui, rebaptisée Magyar Csillag (l'Étoile hongroise), sera interdite par les Allemands en 1944. Après la défaite française (1940), il publia en témoignage de solidarité un Trésor de la littérature française (1942). Au lendemain de la guerre, il dirigea la revue Válasz (la Réponse), puis se retira de la vie publique. Son poème, Cent vers sur la tyrannie, vigoureuse dénonciation de la dictature, paraît pendant la révolution de 1956. Après plusieurs années de silence, il publie de nouveaux recueils (Nouveaux Poèmes, 1961 ; la Voile qui penche, 1965 ; Noir et blanc, 1968 ; Testament singulier, 1977). Son œuvre narrative (Radicelles, 1971 ; Comme les cigognes, 1972) comprend aussi un célèbre essai sociologique consacré aux conditions de vie des paysans hongrois (Ceux des pusztas, 1936) et un roman autobiographique (les Huns à Paris, 1943). Mêlant dans Sur la barque de Caron (1970) les poèmes aux méditations sur l'art et la destinée humaine, il donne à son lyrisme une orientation plus réaliste (Patrie en haut, 1973) sans renier toutefois l'héritage surréaliste.

imaginisme

École poétique russe (1919-1927).

Influencé par l'imagisme anglo-saxon, le groupe, constitué autour des théoriciens Mariengov (1897-1962) et Cherchenievitch (1893-1942), fut dirigé temporairement par Essenine. Préconisant le primat de l'image sur le sens (« la dévoration du sens par l'image ») et la réduction du poème à « une vague d'images », souvent au mépris de la syntaxe et de la métrique (recours au vers libre), l'imaginisme préfère à l'engagement l'expression intime d'angoisses souvent transposées en motifs de marginalité ou de bohème urbaine.

imagisme

Mouvement poétique anglais et américain qui contribue, entre 1912 et 1917, à une redéfinition de l'écriture et de l'effet poétiques. Il a pour promoteurs, théoriciens et praticiens, Ezra Pound, F. S. Flint, Amy Lowell, Hilda Doolittle, T. E. Hulme. L'idée majeure est d'assurer une stricte adéquation entre la lettre poétique, l'objet évoqué et l'effet de la représentation. Le poème doit donc être bref, offrir une seule image (l'évocation de l'objet n'exclut pas la métaphore), adapter rigoureusement les données rythmiques à l'effet objectif recherché. Il y a là le double refus de toute abstraction et de toute connotation affective. L'imagisme doit se comprendre comme une réaction face aux excès du symbolisme et comme une tentative pour ramener la poésie à un nominalisme qui va à l'encontre de tous les jeux arbitraires sur le langage ; il trouve ses meilleurs antécédents dans la poésie brève japonaise (haïku). Il influencera indirectement le formalisme poétique et critique des écrivains du mouvement « agrarien », ainsi que le New Criticism, mais il sera bientôt éclipsé par la violence prophétique de D. H. Lawrence et de T. S. Eliot.