Dictionnaire de la Littérature 2001Éd. 2001
S

surréalisme (suite)

Actualité du surréalisme

On se tromperait gravement si l'on croyait, à partir des Manifestes d'André Breton, que le surréalisme s'est formé un corps de doctrine figé. En vérité, les principes se sont établis au fur et à mesure des événements, au gré des participants, à partir de quelques constantes. Plus que sa nouveauté artistique, on se plaît à reconnaître dans le surréalisme son pouvoir universel d'émancipation. Son action se ressent sur la manière dont on aborde maintenant la sexualité ou la maladie mentale. On peut douter que son intervention dans le champ politique ait été sensible à l'époque (encore que certains appels de 1934 ou de 1960 n'aient pas été sans effet) ; reste qu'il a entraîné les intellectuels et les poètes à se poser clairement la question de leur attitude face aux pouvoirs établis et aux idéologies dominantes. De sorte que l'institution de la littérature en a été transformée, ne serait-ce que sur le plan de la critique. Davantage, la vision du monde selon le surréalisme s'est répandue partout, le surréalisme « éternel » rejoignant le quotidien, ce qui a entraîné l'occultation du mouvement historique, mais – peut-être aussi – sa banalisation jusque sur les murs de nos villes et dans la publicité.

Surrey (Henry Howard, comte de)

Homme politique et poète anglais (vers 1518 – Londres 1547).

Grand seigneur de la cour d'Henri VIII, il doit à l'hostilité des Seymour d'être retenu prisonnier à Windsor (1537-1539), où il compose sans doute l'essentiel de son œuvre, puis, après s'être distingué dans les luttes contre la France (1544-1546), d'être accusé de haute trahison et exécuté. Ses poèmes, publiés seulement en 1557 avec ceux de Thomas Wyatt, qu'il reconnaissait pour son maître, adaptent le sonnet italien et le pétrarquisme, et ouvrent la voie à Sidney et à Spenser. Il fut le premier poète anglais à utiliser le vers blanc, pour sa traduction de l'Énéide.

Süskind (Patrick)

Écrivain allemand (Ambach/Bavière 1949).

Ses antihéros peu sociables reflètent son propre retrait dans l'espace privé : un appartement insonorisé pour l'interprète antiwagnérien de la pièce la Contrebasse (1981), une mansarde pour l'humble gardien aux prises avec une palombe dans le Pigeon (1987), la cime des arbres pour le vieillard farouche de l'Histoire de Monsieur Sommer (1991), une caverne pour Grenouille, le génie monstrueux du best-seller mondial le Parfum (1985), fable olfactive dans le Paris du XVIIIe siècle. Conjuguant qualité et succès public, Süskind écrit aussi des scénarios pour la télévision et le cinéma.

Suso (Heinrich Seuse, dit)

Mystique allemand (Constance 1295 – Ulm 1366).

Entré chez les dominicains en 1308, il fut vers 1324 l'élève de Maître Eckhart à Cologne. Son existence, consacrée à l'enseignement, la prédication et la méditation, se déroula dans divers couvents d'Allemagne, de Suisse et des Pays-Bas. De tous les mystiques allemands, il est le plus authentiquement poète. Ses Sermons, ses Lettres, son autobiographie, son Livre de la Vérité (vers 1326-1327) et son Livre de la Sagesse éternelle (vers 1328) révèlent une sensibilité lyrique et une langue souple et musicale qui font de lui un des maîtres de la prose allemande et un digne héritier des poètes courtois.

Sutardji Calzoum Bachri

Écrivain indonésien (Rengat 1941).

Les poèmes qu'il a publiés en recueils (O, 1973 ; Amok, 1977) ou qu'il fait paraître dans la revue Horison, s'écartant des normes traditionnelles, se caractérisent par l'importance accordée à la présentation typographique, par la présence de mots en groupes, de mots qui ne font pas sens en indonésien et par la fréquence des répétitions. Il pense, en effet, que les mots ont perdu leur force créatrice dans l'usage ordinaire et qu'il appartient au poète de la leur redonner. Pour atteindre ce but, il prend pour modèle les « formules magiques » (mantra).

sutra (aphorismes, versets mnémoniques)

Les érudits qui voyageaient ne pouvaient transporter que quelques feuilles de palmier sur lesquelles une vaste doctrine était résumée en quelques sutra (« fil ») reliant un nombre minimal de lettres (patra ou « feuille »). Les premiers, Grihya et Dharma Sutra, remontent à une période antérieure à notre ère. La plupart des textes doctrinaux (s'astra) utilisent ce style condensé qui leur confère un statut d'orthodoxie au sein de l'hindouisme. Il est évident que les sutra exigeaient d'être accompagnés d'un commentaire. Certains sutra célèbres comme les Brahma Sutra ont aujourd'hui de très nombreux commentaires et commentaires de commentaires.

Sutzkever (Avrom)

Poète de langue yiddish (Smorgon, Lituanie, 1913).

Après une enfance passée en Sibérie, il s'installe à Vilno en 1920. Ses premiers recueils publiés en Pologne (Poèmes, 1937 ; De la forêt, 1940) sont salués comme l'annonce d'un renouveau du langage et du paysage de la poésie yiddish. Rescapé du massacre du ghetto de Vilno, il rallie les partisans. Après un séjour à Paris (1946-48) il s'installe en Israël, où il dirige la grande revue littéraire Goldene keyt (1948-1995). Son immense œuvre lyrique de l'après-guerre porte le témoignage du ghetto et de la Résistance, ainsi que de la confrontation entre le poète survivant du génocide et une réalité israélienne en éclosion. Après les deux volumes de ses Œuvres poétiques (1963), il a publié Poèmes de la mer de la Mort (1968) ; Signes carrés et miracles (1968) ; Aquarium vert (1975) ; Où gîtent les étoiles (1979) ; De jeunes et vieux manuscrits (1982).

Suyuti (Abu al-Fath al-)

Écrivain arabe (1445 – 1505).

Après avoir terminé ses études et accompli le pèlerinage à La Mecque, il passa sa vie au Caire, où il est né. Cette vie sédentaire fait contraste avec le vagabondage intellectuel qui caractérise al-Suyuti. Polygraphe, il a traité de tous les sujets et détient, pour la littérature arabe, le record absolu de titres d'ouvrages : 981 œuvres, certaines très courtes, il est vrai, mais d'autres en plusieurs volumes, toujours appréciées.

Sveinsson (Jón)
ou Jón Svensson

Écrivain islandais (Mödruvellir 1857 – Cologne 1944).

Jésuite, il s'est rendu célèbre par les nombreux ouvrages pour enfants dont le héros s'appelle « Nonni » (Nonni, souvenirs d'un jeune Islandais, 1913) et qu'il écrivit d'abord en allemand : ils devaient être traduits dans toutes les langues européennes. Avec sa foi prosélyte, il fit beaucoup pour rendre l'Islande familière au monde entier (Nonni raconte, 1934 ; les Voyages de Nonni autour du monde, 1947).