Dictionnaire de la Littérature 2001Éd. 2001
S

Schwartz (Delmore)

Écrivain américain (New York 1913 – id. 1966).

Dans ses recueils poétiques (les Responsabilités commencent dans les rêves, 1938 ; Genèse Livre I, 1943 ; la Science de l'été, 1959) comme dans ses récits ou ses essais (l'Imitation de la vie, 1941), il définit une recherche juive de l'identité, comprise à la fois en termes sociaux et en termes ethniques et métaphysiques, qui font de l'écriture un geste de célébration.

Schwartz (Maurice)

Comédien et metteur en scène américain (Sedikov, Ukraine, 1887 – en Israël 1960).

Passionné de théâtre, il ouvre en 1918, sur la Deuxième Avenue de New York, le Kunst-Teater (Théâtre d'art juif). Il y montera et interprétera en yiddish un répertoire où figurent les œuvres d'Ibsen, Schiller, Tolstoï, Pinsky, Singer, Asch, Wilde, Schnitzler, Strindberg, Maupassant et Shakespeare. Disposant à partir de 1926-1927 d'un local construit exprès pour lui, organisant des tournées dans le monde entier, le Kunst-Teater voit son succès décliner en même temps que celui de tout le théâtre yiddish de New York et cesse ses productions en 1950. En 1960, Maurice Schwartz tente de fonder un centre d'art dramatique yiddish en Israël.

Schwarz-Bart (André)

Écrivain français d'origine polonaise (Metz 1928-Pointe-à-Pitre, Guadeloupe, 2006).

Résistant à partir de 1943, il se met à écrire en 1948 après avoir repris des études. Hanté par les camps nazis – il y a perdu ses parents et deux de ses frères –, il évoque dans le Dernier des justes (1959) des siècles de persécution et d'humiliation des Juifs, avant d'entreprendre, avec son épouse Simone, d'origine guadeloupéenne, la quête d'une autre identité incertaine : Un plat de porc aux bananes vertes (1967) dénonce la persécution des Noirs ; la Mulâtresse Solitude (1972), première partie d'un cycle allant de 1760 à nos jours, évoque, à travers le personnage de Solitude, le destin tragique d'une esclave noire, jusqu'à la revendication de sa négritude.

Schwarz-Bart (Simone)

Femme de lettres guadeloupéenne (Saintes, Charente-Maritime, 1938).

Elle publie d'abord avec son mari André Schwarz-Bart Un plat de porc aux bananes vertes (1967), puis, sous sa seule signature, Pluie et Vent sur Télumée Miracle (1972), évocation d'une lignée de femmes antillaises confrontées à leur dure condition, et Ti Jean l'horizon (1979), roman fantastique qui transpose en Afrique l'imaginaire et les légendes de la Guadeloupe à travers un héros mythique retrouvant le pays des ancêtres Bambara. Après un silence de quelques années, l'auteur a donné pour le théâtre Ton beau capitaine (1987), sur le thème de l'exil.

Schwerner (Armand)

Poète américain (Anvers, Belgique, 1927 – Staten Island, New York, 1999).

Américain depuis 1936, Schwerner est surtout connu pour son long poème Tablettes I-XXVI rédigé entre 1968 et 1989, mais il est aussi l'auteur de sonnets (Sonnets Bacchae 1-7, 1974-1977). Il y met en scène des voix impossibles à identifier, archaïques, toujours préoccupées de prendre la mesure du monde, de surmonter la confusion mentale par l'extase et l'incantation. Satiriques, les poèmes des Tablettes sont présentés comme des inscriptions islandaises retrouvées, transcrites et traduites, éminemment fragmentaires et prétextes à une critique du pseudo-scientisme littéraire. Mais de manière magistrale, le poème avant-gardiste de Schwerner transcende l'intention ironique première pour montrer d'autres possibilités pour la poésie.

Schwob (Marcel)

Écrivain français (Chaville 1867 – Paris 1905).

Il débuta par une intéressante Étude sur l'argot français (1889) et un article sur le Jargon des coquillards en 1445 (1890), dans lequel il soutient que Villon composa ses ballades argotiques dans la langue d'une association de malfaiteurs. Esprit ironique, attiré par l'étrange, et nanti d'une insatiable curiosité à l'égard de toute forme de culture tant historique que philosophique (Schopenhauer le marqua profondément) ou littéraire, avec une préférence pour les littératures grecque, latine, médiévale ou anglo-saxonne (cf. Spicilège, 1896), il acquit une culture encyclopédique que manifeste l'ensemble de son œuvre et fut une des figures intellectuelles centrales de la fin de siècle. Les traditions orientales, italiennes ou bretonnes, les guerres antiques et modernes comme les paradis artificiels hantent des recueils de contes à l'écriture particulièrement raffinée (Cœur double, 1891 ; le Roi au masque d'or, 1893). Sa Croisade des enfants (1896) lui fut inspirée par des récits hagiographiques du Moyen Âge ; ses Vies imaginaires (1896), par des lectures de textes anciens et son goût pour la peinture. On lui doit encore des poèmes en prose : Mimes (1894) et, surtout, le Livre de Monelle (1894), qu'on a comparé aux Nourritures terrestres et qui constitue un des livres clefs du décadentisme. Composé d'aphorismes, de conseils, d'allégories qui visent à une forme de morale philosophique, l'ouvrage comporte aussi des nouvelles parfois très courtes et énigmatiques, centrées sur un personnage changeant et gracile de très jeune fille dans une atmosphère mystérieuse.

Sciascia (Leonardo)

Écrivain italien (Racalmuto, prov. d'Agrigente, 1921 – Palerme 1989).

À la fois essayiste (Pirandello et la Sicile, 1960 ; le Cliquet de la folie, 1970) et romancier, il est l'auteur de brefs récits policiers à mi-chemin entre le conte et la réflexion politique, qui ont pour thème la Mafia et, au-delà et à l'image de celle-ci, les mécanismes les plus troubles de la politique italienne des années 1960 et 1970. Les Oncles de Sicile (1958) est un recueil de nouvelles qui analysent la société et l'histoire italiennes. Mais c'est surtout avec le Jour de la Chouette (1961) que Sciascia inaugure son art du roman policier : il s'agit du récit d'une enquête sur un crime de la Mafia, conduite par un jeune officier des carabiniers, antifasciste et originaire de Parme, d'où il ressort malheureusement que la Mafia n'existe que dans l'imagination des gens du « continent ». Suivront À chacun son dû (1966), le Contexte, (1971), Actes relatifs à la mort de Raymond Roussel (1971), Todo modo (1974), Candido ou Un rêve fait en Sicile (1977), où Sciascia évoque le compromis historique entre la Démocratie chrétienne et le Parti communiste italien, Ie Chevalier et la Mort (1988), Une histoire simple (1989). La trame de ses enquêtes, historiques ou contemporaines, anticipent ou confirment singulièrement celle de ses propres fictions, qui continuent toutefois de s'inspirer de la réalité (la Disparition de Majorana, 1975 ; les Poignardeurs, 1976 ; Portes ouvertes, 1987). Il intervient également sur des sujets brûlants de l'actualité italienne (l'Affaire Moro, 1978), tout en basant toujours sa réflexion politique sur l'expérience qu'il a vécue dans sa région natale (la Sicile comme métaphore, 1979). Son séjour en France lui a permis d'élargir son regard sur les évènements de l'histoire, comme en témoigne la Sentence mémorable (1984) dont les Essais de Montaigne constituent le point de départ. L'ensemble de son œuvre ainsi que ses Mémoires (Noir sur noir. Journal de dix années, 1980) sont rassemblés dans Œuvres complètes (1999-2000).