Dictionnaire de la Littérature 2001Éd. 2001
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Sabatier (Robert)

Écrivain français (Paris 1923).

Orphelin de bonne heure, ouvrier typographe, il participe à la Résistance, imprime lui-même ses premiers vers et fonde à Roanne une revue, la Cassette. Il restera toujours fidèle à l'inspiration poétique (les Fêtes solaires, 1951 ; Dédicace d'un navire, 1959 ; les Poissons délectables, 1965 ; les Châteaux de millions d'années, 1969 ; l'Oiseau de demain, 1981) et publiera même une Histoire de la poésie française (1975-1988). Romancier (Alain et le Nègre, 1953 ; Boulevard, 1956 ; Canard au sang, 1958 ; la Sainte Farce, 1960 ; le Chinois d'Afrique, 1966), il pourchasse avec ténacité les rêves et les souvenirs de son enfance, à travers les aventures d'Olivier, le héros des Allumettes suédoises (1969) : Trois Sucettes à la menthe (1972), les Noisettes sauvages (1974), les Fillettes chantantes (1980), David et Olivier (1986). Cette recherche anime également le conte merveilleux des Enfants de l'été (1978) et le voyage symbolique évoqué dans les Années secrètes de la vie d'un homme (1984). Il publie en 1997 le Lit des merveilles, roman situé dans le Quartier latin des années 1950.

Sabatier de Castres (Antoine Sabatier, dit)

Écrivain français (Castres 1742 – Paris 1817).

Séminariste défroqué, il se rendit à Paris, où il fut protégé par Helvétius. Il publia des poésies et des contes licencieux (les Quarts d'heure d'un joyeux solitaire, 1766), un roman (Betsi ou les Bizarreries du destin, 1769), puis se rangea aux côtés des antiphilosophes. Ses ouvrages les plus connus sont le Dictionnaire de littérature (1770) et les Trois Siècles de la littérature française (1772) ; il y attaque Voltaire et les Encyclopédistes, mais ménage Rousseau.

Sábato (Ernesto)

Écrivain argentin (Rojas, Buenos Aires, 1911).

Physicien, il travaille à Paris avec les Joliot-Curie, puis aux États-Unis. Directeur de la revue Mundo argentino (1955) et collaborateur de divers périodiques américains et européens, il est l'auteur d'essais, généralement à thèmes socio-politiques et de ton polémique (Hommes et Engrenages, 1951 ; Hétérodoxie, 1953 ; l'Écrivain et ses fantasmes, 1963 ; Avant la fin, 1998 ; la Résistance, 2000). Son œuvre romanesque traduit le mal de vivre de l'homme contemporain dans une perspective à la fois réaliste et fantastique. Le Tunnel (1948), roman existentialiste sur la grandeur et la misère de l'Argentin, Héros et Tombes (1961), monologue autour de l'amour maléfique et image de la société de Buenos Aires et de ses faubourgs, et l'Ange des ténèbres (1974) forment une trilogie empruntant le costume de la fresque épique pour chanter les charmes et les maléfices de la capitale argentine.

Sabina (Karel)

Écrivain tchèque (Prague 1813 – id. 1877).

Auteur de nouvelles (le Fossoyeur, 1837), de Poésies (1841) et de romans (Rêvasseries, 1857 ; Fils de lumière, 1863), il fut révolutionnaire en 1848 et emprisonné. Outre un portrait de Mácha (Introduction psychologique, 1845) et une étude (le Communisme spirituel, 1861), on lui doit un témoignage sur les prisons autrichiennes (les Tombeaux animés, 1870).

Sabino (Fernando Tavares)

Écrivain brésilien (Belo Horizonte, Minas Gerais, 1923 – Rio de Janeiro 2004).

Ses chroniques (la Vie réelle,1952) mêlent l'humour et la poésie du quotidien. Parmi ses romans se détache le Rendez-vous (1957), où il peint une génération frustrée.

Sabir (Mirza Alekper Taïrzadè, dit)

Poète azerbaïdjanais (Chemakha 1862 – id. 1911).

Élève du poète Seïd-Azim, il reçut une éducation moderne, et renonça au lyrisme pour se lier à l'équipe du journal satirique Molla Nasreddin (1906) : haï des puissants, il travailla à Bakou comme instituteur. D'essence satirique, sa poésie flétrit les abus du patriarcat, le fanatisme religieux, le conservatisme des nantis et l'arbitraire des régimes d'Iran et de Turquie ; sa sympathie envers les exploités, qu'il appelle à la lutte et tente d'arracher aux haines intercommunautaires, fait de lui le père de la poésie démocratique d'Azerbaïdjan (le Livre de la huppe, 1912).

Sablé (Madeleine de Souvré, marquise de)

Femme de lettres française (en Touraine 1599 – Paris 1678).

Familière de la société galante et précieuse de l'hôtel de Rambouillet, Mme de Sablé fréquenta la société polie et lettrée de son temps ; elle publia des portraits et des maximes en 1678. Amie de La Rochefoucauld, elle fut considérée comme l'auteur de bon nombre des maximes de ce dernier et de Jacques Esprit. À partir de 1655, Mme de Sablé donna dans la dévotion et se retira auprès du monastère de Port-Royal de Paris.

Sacchetti (Franco)

Écrivain italien (Raguse, Dalmatie, v. 1332 – San Miniato, Pisa, 1400).

Haut fonctionnaire de la République florentine, il a tracé dans ses Trois Cents Nouvelles un portrait de la société de son temps. Composé de 1385 à 1397, ce recueil de nouvelles, dont seules 223 nous sont parvenues, se signale par la vivacité des dialogues et la simplicité du style. Contrairement à la tradition inaugurée par le Décaméron, aucun ordre ne préside à leur succession. Courtes, ces nouvelles sont souvent centrées sur des reparties savoureuses ou des scènes du quotidien. Cette thématique réaliste s'était dégagée auparavant de l'abondante production poétique de Sacchetti à travers des formes empruntées à Dante et à Pétrarque : la Bataille des belles dames de Florence avec les vieilles (1354) et le Livre de poésies, recueil de 309 poèmes, composés entre 1352 et 1381, oscillant entre le genre pastoral (O belles bergères montagnardes) et la réflexion morale qui caractérise, d'autre part, la paraphrase évangélique de sa première œuvre en prose (Présentations de l'Évangile, 1378-1381).

Sacher-Masoch (Leopold von)

Écrivain autrichien (Lemberg 1836 – Lindheim, Hesse, 1895).

Fils de haut fonctionnaire, il passe sa jeunesse en Galicie et à Prague. D'abord professeur d'histoire à Graz et à Lemberg (auj. Lvov), il abandonne rapidement son poste pour se consacrer à la littérature. Sous les pseudonymes de Charlotte Arand et de Zoë von Rodenbach ou sous son propre nom, il acquiert bientôt une grande notoriété comme auteur de contes folkloriques de l'Europe centrale (Histoires galiciennes, 1877-1881 ; Histoires juives polonaises, 1887). Pendant toute cette période, le public ne reconnaît aucun « érotisme » dans l'auteur du roman la Femme divorcée (1870) et des cycles de contes intitulés « Récits du monde du théâtre » (qui contient la Fausse Hermine, 1873-1879) ou « Histoires de la bonne société » (qui contient la Vénus à la fourrure, 1870). Le destin posthume change quand le psychologue Krafft-Ebing  appelle « masochisme » l'érotisme où le plaisir naît de l'humiliation infligée par un être adoré.