Dictionnaire de la Littérature 2001Éd. 2001
N

Nkosi (Lewis)

Écrivain sud-africain de langue anglaise (Durban, Natal, 1936).

Exilé à Londres, où il collabore à de nombreux journaux et revues, puis professeur de littérature à l'université de Zambie, auteur d'une pièce qui évoque les tensions raciales à Johannesburg (le Rythme de la violence, 1964), il est l'auteur de plusieurs essais sur les littératures négro-américaine et sud-africaine contemporaines (Au pays et en exil, 1965 ; Travaux et masques : thèmes et styles de la littérature africaine, 1981).

no

Le no est un genre théâtral associant le dialogue, le récitatif et le chant à une gestuelle stylisée, à la danse et à la musique. Avant de devenir un terme générique, le mot « no » (littéralement : « talent », « efficacité ») désignait l'art du spectacle en général. Le no de sarugaku affirma si bien sa suprématie à la fin du XIVe s. qu'il en devint le type, et qu'on prit l'habitude de ne le désigner que par ce mot. Un no est un poème lyrique déclamé, mimé et dansé par un acteur principal, le shite, qui dialogue avec un acteur secondaire, le waki, et un chœur, sur l'accompagnement musical et le bruitage d'une flûte, de deux tambours à main et éventuellement d'un tambour à baguettes. Un spectacle de no, ou « journée de no », comprend la représentation de cinq no et de quatre farces (kyogen) intercalées, chacune, entre deux no.

Historique

La cour impériale avait accueilli et acclimaté les divertissements chinois et coréens introduits à la suite du bouddhisme, comme les danses de gigaku, qu'on exécutait à l'occasion des fêtes liturgiques et des réjouissances impériales, avec le concours des plus hauts dignitaires. Cet art d'origine étrangère s'était imposé aux danses sacrées purement japonaises du shinto (kagura). Les esthètes, d'autre part, se plaisaient à soumettre à leurs principes musicaux et chorégraphiques les danses rituelles agraires, tamai, « danses des rizières », et les chants populaires recueillis du côté des écuries du palais. Ces éléments populaires vont donner naissance au dengaku no no (« divertissements des rizières »), qui va évoluer vers une stylisation de plus en plus raffinée. Parallèlement, les « divertissements variés » (sangaku), amalgame de farces et d'exhibitions de foire introduit de Chine au VIIIe s., vont être à l'origine d'un genre de spectacles plus populaires sous le nom de sarugaku no no.

   Vers le milieu du XIVe s., dengaku et sarugaku réalisaient, dans des registres différents, la synthèse de tous les chants et danses populaires et avaient assimilé des éléments empruntés au chant récitatif bouddhique, aux romans épiques, comme le Dit de Heike, aux chants mimés et dansés. Les deux genres s'étaient mutuellement influencés et ne présentaient pas de différence essentielle. Des troupes, constituées au XIIIe s., avaient fondé des dynasties d'acteurs et de danseurs, capables d'enrichir le répertoire de leur genre. En 1374, l'acteur Kan.ami (1333-1384), chef de la troupe de sarugaku du Yamato, fut remarqué pour ses qualités de danseur par le shogun Yoshimitsu, qui le chargea des divertissements de sa cour. Cet acteur génial renouvela totalement le genre à partir d'éléments empruntés à la plupart des spectacles à la mode. Capable d'adapter son jeu et son répertoire aux circonstances les plus diverses, Kan.ami réussit à imposer son théâtre et à s'attirer aussi bien la faveur de l'élite que celle du public populaire. Son fils Zeami (1364 ?-1443) lui succéda dans sa charge à la cour de Yoshimitsu. Poète et théoricien éminent, il reprit l'art de son père, remania le répertoire en créant le type classique de la grande pièce de no, et consigna ses réflexions sur l'art dans des traités dits « secrets » dont le texte authentique a été retrouvé en 1909.

   Le no resta un art vivant, tant qu'il ne se coupa pas de ses racines populaires. Cependant, le prestige de Zeami était tel qu'aucun de ses descendants ne chercha vraiment à renouveler le genre. Le fils de Zeami mourut prématurément en 1432. Son gendre, Komparu Zenchiku (1405-1468), poursuivit son œuvre et fonda sa propre école, Komparu ryu. Le neveu de Zeami, Saburo Motoshige Onami (1398-1467), cultiva la tradition familiale et assura l'existence de l'école Kanze. Son fils, Kanze Kojiro Nobumitsu (1435-1516), et son petit-fils, Kanze Yajiro Nobutomo (1490-1541), firent évoluer le genre en renforçant le rôle de waki et créèrent des pièces très spectaculaires, volontiers représentées de nos jours. Dès le milieu du XVIe siècle, le genre se fige dans une sorte d'académisme. Les acteurs se spécialisent, soit dans le rôle de shite, soit dans celui de waki, et ne peuvent plus passer de l'un à l'autre.

   Après l'instauration du shogunat des Tokugawa, au début du XVIIe siècle, le no devient le divertissement et l'art favori de l'aristocratie guerrière au pouvoir, mais il perd peu à peu son audience populaire ; le grand public et la bourgeoisie marchande se tournent désormais vers d'autres genres comme le joruri et le kabuki, même s'il continuent à pratiquer la récitation du no sous la forme d'un art d'agrément. Dès le XVIIIe siècle, le no est devenu un art classique achevé ; le rythme se ralentit, la gestuelle et la danse se hiératisent. C'est sous cette forme qu'il a subsisté jusqu'à nos jours. Le nombre des écoles de shite fixé à cinq ne variera plus : Kanze ryu, Komparu ryu, Kongo ryu, Hosho ryu et Kita ryu. On compte aussi trois écoles de waki et deux de kyogen.

Les acteurs

Tous les acteurs sont exclusivement du sexe masculin.

   Le shite. L'acteur principal est appelé « l'actant » (shite). Sauf dans le cas des pièces dites « de ce monde » (gendai mono), il est masqué. Émanation de l'au-delà, divinité bénéfique ou démoniaque, âme en peine qu'une passion enchaîne sur les lieux de son trépas, le shite n'appartient plus à notre monde. Une pièce de no est classée dans l'une des cinq catégories d'après le statut de son shite : divinité, âme de guerrier mort au combat, âme d'héroïne passionnée, être vivant agissant dans notre monde, démon.

   Le waki. Le shite est évoqué par un acteur secondaire dit « le côté » (waki) dont le rôle est loin d'être négligeable. Moine en pèlerinage, dignitaire en voyage, il appartient toujours à ce bas monde et, de ce fait, n'est pas masqué. Il dialogue avec le shite et le chœur, chante mais ne danse pas.

   Le kyogen. Acteur temporaire qui assure la transition entre les deux parties d'une grande pièce de no, personnage du commun, paysan ou domestique, il s'adresse au waki à l'entrée du plateau sur lequel il ne pénètre pas ; il ne chante ni ne danse et déclame d'une façon particulière.

   Le kokata. Certains rôles, dans les pièces postérieures, sont tenus par de jeunes garçons appelés « kokata » qui incarnent des héros virils, dans la force de l'âge, comme Yoshitsune. Le kokata déclame à sa manière ; il ne chante ni ne danse.

   Tsure et tomo sont des comparses accompagnant le shite ou le waki et dont le rôle est purement figuratif ; nombreux dans les pièces postérieures, ils les rendent plus spectaculaires.

   Le ji (« chœur »). Six à huit chanteurs constituent le chœur. Ils dialoguent avec le shite et le waki, déclament et chantent à la place du shite quand il danse, interviennent dans l'action en en faisant le commentaire ; le chœur supplée à l'absence de décors et décrit les lieux et les situations ; en analysant les états d'âme du shite, il tient le rôle du récitant des pièces mimées antérieures au no.

   Les instrumentistes. Acteurs et chœur sont soutenus par la musique et le bruitage d'un groupe de trois ou quatre instrumentistes (hayashi) : une flûte traversière, nôkan ; deux tambours à main (tsuzumi) – le grand tsuzumi, battu à hauteur de la hanche gauche (ôtsuzumi), le petit tsuzumi, battu sur l'épaule droite (kotsuzumi). Accessoirement, un tambour à baguettes (taiko) sert à rythmer les passages animés. Les batteurs de tambour poussent des cris modulés (kakegoe) qui maintiennent la cohésion rythmique de l'ensemble et créent, en fonction de leur intensité, le climat sonore adapté à la nature des situations.

   Les appariteurs (kôken) sont accroupis sur le coin arrière gauche de l'estrade. Ils interviennent en pleine action, rajustent les costumes et apportent les accessoires.