Dictionnaire de la Littérature 2001Éd. 2001
B

Bazin (René)

Écrivain français (Angers 1853 - Paris 1932).

Professeur à la faculté libre d'Angers, collaborateur à la Revue des deux mondes et à différents journaux, membre de l'Académie française à partir de 1903 à la suite du succès des Oberlé (1901), il est l'auteur de romans (Stephanette, 1884), de récits de voyage (Croquis de France et de l'Orient, 1899 ; Nord-Sud, notes de voyage, 1913), d'essais (les Personnages de roman, 1899 ; Questions littéraires et sociales, 1906) et de monographies (Charles de Foucault, 1921). Représentant de la grande tradition catholique, il a chanté les vertus de la religion et du terroir (la Terre qui meurt, 1899 ; Douce France, 1911 ; Davidée Birot, 1912).

Béalu (Marcel)

Écrivain français (Selles-sur-Cher 1908 – Paris 1993).

Ami de Max Jacob, dont il retient la leçon de style, et peut-être la fantaisie, admiré par André Pieyre de Mandiargues pour son romantisme inactuel et pour sa maîtrise du conte fantastique, il introduit son lecteur dans un climat surnaturel qui doit beaucoup à l'amour de la nuit et à ses visions oniriques. Avec un humour parfois grinçant, ses variations cruelles et sensuelles aboutissent à de surprenants dénouements. Son œuvre se partage entre des poèmes, une réflexion sur son propre itinéraire et des contes d'une brièveté souvent remarquable, dont l'Araignée d'eau : le trio de l'épouse et d'une araignée, devenue femme pour plaire au narrateur-héros, développe une relation ambivalente, voilée seulement par l'indécision des êtres et des lieux. La passion amoureuse se double d'un regard enfantin, source d'un merveilleux qui atténue la rigueur tragique de l'intrigue.

Bear (Greg)

Écrivain américain (San Diego, Californie, 1951).

En une quinzaine d'années, il s'est imposé au côté de Gregory Benford comme l'un des meilleurs représentants du courant « hard science » par l'audace de ses spéculations scientifiques. Après la Musique du sang (1985), il a abordé l'univers de la Voie, un artefact infini (Éon, 1985 ; Éternité, 1988 ; Héritage, 1995) et dépeint un XXIIe siècle technologique (la Reine des anges, 1990 ; l'Envol de Mars, 1993 ; Oblique, 1997). Avec l'Échelle de Darwin (1999), il revient sur le thème de la transcendance de l'humanité.

Beat generation

Mouvement littéraire puis culturel, qui traverse les années 1950 et persiste dans les années 1960. L'expression appartient à l'argot du jazz et désigne l'effet hypnotique du rythme, entre béatitude et « déprime » face au réel. Le mouvement naît avec quelques écrivains new-yorkais, Kerouac, Ginsberg, qui passent à l'Ouest (la Californie), dans un parcours visant à retrouver l'espace américain et la liberté. Le livre clé est Sur la route (1957) de Kerouac. San Francisco devient une ville littéraire et bohème. Les « voyages » (trips) sont à la fois spatiaux, mentaux (la drogue) et spirituels (le bouddhisme zen). Sociologiquement, le groupe est composite : un fils de la grande industrie (William Burroughs), des vagabonds authentiques (Neal Cassady, Gregory Corso), des étudiants (Ginsberg, Holmes), un poète-éditeur (Ferlinghetti). Leurs prédécesseurs sont Kenneth Rexroth et Henry Miller. Révolte résolument utopique, le mouvement reste l'affirmation originale d'une mystique de l'individu, typiquement américaine en ce qu'elle reconduit l'opposition stricte du moi et de la société et prête à la subjectivité le pouvoir de dessiner ou de retrouver le centre du monde dans le jeu même du déplacement.

Beatrijs
(Béatrice)

Poème néerlandais du XIVe  s.,

adaptation anonyme d'une légende (XIIe s.) inspirée par le culte marial et dont au moins 54 versions médiévales sont connues. Le texte néerlandais, rédigé par un auteur flamand d'après un exemplum latin de Césaire de Heisterbach (Dialogus Miraculorum), date d'environ 1300 ; il est conservé dans un manuscrit de 1374 qui se trouve à La Haye, où il fut édité en 1841 par W. Jonckbloet. C'est l'histoire d'une nonne séduite puis abandonnée et devenue fille publique : revenue au couvent, elle découvre que sa faute est ignorée, car la Vierge, pour laquelle elle avait une dévotion particulière, a pris sa place.

Beaudoin (Théo)

Écrivain belge d'expression wallonne (Liège 1893 – id. 1932).

Seul, ou en collaboration, il a contribué à sortir le répertoire théâtral du réalisme anecdotique traditionnel et du romantisme idéaliste, en ouvrant la scène au monde et à l'inspiration sociale (Song'di houyeû, 1929 ; Deûs-omes, 1931). Il est surtout l'auteur, avec Duchatto, d'une pièce héroï-comique en vers, François (1931), écrite en mémoire des luttes liégeoises pour la liberté, dont le héros, personnage du théâtre des marionnettes au langage plein de gouaille, est considéré comme le symbole du peuple wallon.

Beaulieu (Victor-Lévy)

Écrivain québécois (Saint-Jean-de-Dieu, près de Rimouski, 1945).

Polémiste, auteur dramatique (la Tête de Monsieur Ferron, 1949) et surtout romancier, admirateur de Voltaire et de Hugo aussi bien que de Jack Kerouac et de l'auteur de Moby Dick (Monsieur Melville, 1980), il lâche la bride à tous les fantasmes de l'imagination et du langage (la Nuitte de Malcomm Hudd, 1969) ; Don Quichotte de la Démanche, 1974). Il a dirigé les Éditions du Jour, puis créé les Éditions de l'Aurore, VLB éditeur, et enfin les Éditions Trois-Pistoles, du nom du village d'où il rayonne et écrit des séries télévisées.

Beaumanoir (Philippe de Remi, sire de)

Écrivain français (dans le Beauvaisis ou le Gâtinais vers 1250 – Pont-Sainte-Maxence 1296).

Il exerça les fonctions de bailli du Gâtinais pour Robert d'Artois, le frère de Saint Louis, puis, à la mort de ce dernier, il se mit au service de sa veuve. Il devint seigneur de Beaumanoir, après l'aménagement de son fief situé sur le finage de Remy et la construction d'un manoir. Son œuvre poétique, importante et variée, comprend des chansons courtoises, un fabliau moral, le conte dit de Fole largesse, une prière et deux pièces à tonalité antilyrique et satirique, et surtout deux romans en octosyllabes (vers 1230-1240), la Manekine et Jehan et Blonde. La Manekine raconte les malheurs de Joïe, la fille du roi de Hongrie, que son père, devenu veuf, veut épouser. Elle se coupe la main gauche pour lui échapper, mais, condamnée au bûcher, se sauve et trouve refuge en Écosse. Elle devient l'épouse du roi, mais est persécutée par sa belle-mère. Abandonnée en mer avec son enfant, elle arrive à Rome, où elle retrouve son mari et... sa main, miraculeusement, le jour de Pâques. L'histoire a connu un vif succès et inspiré au XIIIe siècle la Belle Hélène de Constantinople et, au XIVe, le Roman du comte d'Anjou de Jean Maillart. Jehan et Blonde, roman idyllique et roman d'apprentissage, raconte les pérégrinations de Jehan pour faire fortune et subvenir aux besoins de sa famille noble appauvrie. Celui-ci tombe amoureux de Blonde au service de laquelle il est entré, l'épouse contre le vœu de son père, le comte d'Oxford, qui finalement leur accorde sa bénédiction, le texte s'achevant sur la naissance de quatre enfants. Le fils cadet de Philipppe de Remy, passé à la postérité sous le nom de Philippe de Beaumanoir (1252-1254 – 1296) mena une carrière administrative (bailli et sénéchal). Grand juriste, il est l'auteur des coutumes du Beauvaisis, où il a consigné les droits et coutumes à respecter pour maintenir l'ordre dans son comté. Son œuvre reflète les particularismes de la vie juridique et de la société de son époque.