Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
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Montoire (entrevue de),

rencontre entre Hitler et le maréchal Pétain le 24 octobre 1940, qui officialise la politique de collaboration du régime de Vichy avec l'Allemagne nazie.

Dès l'automne 1940, les dignitaires du gouvernement de Vichy cherchent à nouer avec l'Allemagne des relations qui dépassent la collaboration technique imposée par l'armistice. Pour Pétain comme pour Laval, la collaboration d'État doit garantir à la France un traitement privilégié dans le cadre d'une Europe allemande ; de son côté, Hitler souhaite que le régime de Vichy s'oppose à la progression des Britanniques en Méditerranée et le soutienne dans sa lutte contre l'Angleterre. Le 22 octobre 1940, une prise de contact a lieu à Montoire, près de Tours, entre Laval, vice-président du gouvernement, et Hitler. Le 24 octobre, de retour d'Espagne, où il n'a pu convaincre Franco de renoncer à sa neutralité, Hitler retrouve le maréchal Pétain à Montoire. Sans prendre d'engagement précis concernant le rôle de Vichy dans une coalition contre les Anglais, Pétain admet « l'idée d'une collaboration avec l'Allemagne dans le sens indiqué par le Führer » et dans l'espoir d'« obtenir pour la France un règlement plus favorable », selon les termes du communiqué de Hitler. Le 30 octobre 1940, Pétain s'adresse directement aux Français pour confirmer le choix de la collaboration. Désavouée par l'opinion, l'entrevue de Montoire se révèle vite un marché de dupes : certain de la victoire définitive de l'Allemagne nazie, Pétain lui apporte le soutien toujours croissant de son régime ; quant à Hitler, loin de souhaiter le redressement de la France, il redouble de sévérité dans l'application de l'armistice.

Montpellier (paix de),

traité conclu entre Louis XIII et les révoltés protestants du Midi, le 18 octobre 1622.

Quelques mois après l'assemblée de La Rochelle de décembre 1620, qui a réuni les députés des communautés réformées les plus résolues, les protestants, inquiets du rétablissement du catholicisme en Béarn, prennent les armes. Les combats de l'année 1621 ne sont guère décisifs. En revanche, en 1622, Louis XIII bat Benjamin de Rohan - dit le seigneur de Soubise - dans les marais de Riez, en Vendée (avril), prend Royan (mai), soumet la vallée de la Garonne. Le dernier bastion huguenot est constitué par le Languedoc, défendu par le duc Henri de Rohan, frère de Soubise. Le 1er août, le siège est mis par les troupes royales devant Montpellier, dont les habitants opposent une résistance farouche. Des négociations sont alors menées entre Rohan et Lesdiguières, prestigieux gouverneur du Dauphiné qui vient d'abjurer le protestantisme. Selon les termes du traité, l'amnistie est accordée aux révoltés, les principales dispositions de l'édit de Nantes (1598) sont confirmées, mais, si les villes de Montauban et de La Rochelle gardent leurs fortifications, celles de Nîmes, Castres, Uzès et Millau - autres places protestantes - doivent réduire les leurs. De même, si Montpellier demeure sans garnison royale, les cités prises aux huguenots ne leur sont pas restituées. Les assemblées religieuses, synodes provinciaux et nationaux, peuvent se tenir sans autorisation, mais les assemblées politiques sont soumises à l'accord du roi. Les chefs protestants obtiennent le maréchalat (Châtillon) ou de fortes pensions (Rohan, Soubise). Louis XIII a concédé ces conditions avantageuses pour pouvoir se tourner vers les affaires italiennes, où la France affronte les intérêts espagnols. Cependant, la paix de Montpellier n'est qu'une trêve. Dès 1624, les hostilités reprennent.

Mont-Saint-Michel (abbaye du),

abbaye bénédictine située sur l'îlot rocheux du même nom, d'abord appelé Mont-Tombe, relié au continent depuis 1880 par une digue insubmersible (actuel diocèse de Coutances).

Primitivement lieu de culte voué à saint Étienne et à saint Symphorien, le rocher abrite un sanctuaire dédié à saint Michel au tout début du VIIIe siècle. L'apparition de l'archange à l'évêque d'Avranches, saint Aubert (mort en 725), est à l'origine de cette dédicace effectuée en 709 selon un processus inspiré de celui du mont Gargano, en Italie. Une abbaye carolingienne remplace peu après le premier sanctuaire. De nombreux pèlerinages s'y succèdent en raison de l'importance progressive prise par le culte de saint Michel, désigné comme patron de l'Empire par Charlemagne. Après un déclin dû aux invasions normandes, la réforme monastique gagne le sanctuaire et la règle clunisienne y est introduite au moment où il devient, au XIe siècle, un des plus grands centres de pèlerinage de l'Occident. La nouvelle église abbatiale, dont la nef est achevée en 1084, est agrandie progressivement jusqu'à ce qu'un incendie, en 1203, nécessite la reconstruction des bâtiments monastiques et l'élévation du cloître de la Merveille. La configuration du rocher, qui rend impossible la disposition habituelle des bâtiments autour du cloître, centre de la vie monastique, impose alors une construction sur trois niveaux. Le renouveau du culte de saint Michel aux XIVe et, surtout, XVe siècles accroît le prestige du monastère. L'archange devient le protecteur des rois de France lors de l'avènement des Valois et le saint est invoqué dans la lutte contre les Anglais durant la guerre de Cent Ans. Un sentiment national naissant se développe autour de son culte.

Les vicissitudes temporelles (exactions, taxes...), liées à la lutte entre protestants et catholiques au XVIe siècle, mettent l'accent sur l'urgence d'une réforme. À partir de 1622, les moines de la congrégation de Saint-Maur s'installent ainsi au Mont-Saint-Michel, où ils demeurent jusqu'en 1789. Pendant la Révolution, le monastère sert de prison d'État et de « Bastille des mers ». Détenus politiques et condamnés de droit commun y sont emprisonnés jusqu'en 1863. L'incendie gigantesque de 1834 est à l'origine d'une longue campagne de restauration, qui se poursuit jusqu'en 1957. La reprise de la vie bénédictine à l'abbaye s'effectue en 1965, date de la célébration festive du millénaire monastique du mont. Les Monuments historiques ont entrepris en 1987 la restauration de la statue de l'archange saint Michel, œuvre du sculpteur français Emmanuel Frémiet (1824-1910).