Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
S

Saxe (Maurice, comte de), (suite)

Serviteur du roi de France mais aussi prince allemand, Maurice de Saxe joue un rôle sur l'échiquier européen : élu duc de Courlande en 1726, il doit rapidement abandonner le duché en raison de l'opposition de l'impératrice Catherine Ire de Russie ; des projets de mariage avec les futures tsarines Anna Ivanovna et Élisabeth Petrovna, qui auraient pu le porter sur le trône de Russie, échouent. Surtout, il favorise le rapprochement entre la France et le royaume polono-saxon, prélude à l'alliance autrichienne, ainsi que le mariage du dauphin, fils de Louis XV, avec sa nièce, Marie-Josèphe de Saxe, en 1747.

Saxons,

peuple germanique installé entre le Rhin et l'Elbe, difficilement intégré au royaume franc et converti au christianisme par Charlemagne entre 772 et 799.

Dès le Ve siècle, les Saxons apparaissent comme les adversaires des Francs, et le roi Childéric Ier les combat avec l'aide des armées romaines. À partir de 556-557, les rois mérovingiens parviennent à imposer aux Saxons d'importants tributs, qui sont renforcés après les campagnes de Dagobert Ier (623-638). Mais au cours du VIIe siècle, les Saxons reprennent leur indépendance et mènent des expéditions en Thuringe et en Rhénanie. Au début du VIIIe siècle, Pépin le Jeune puis Charles Martel conduisent contre eux plusieurs campagnes de représailles. Cependant, ce n'est qu'à partir de 772 que Charlemagne entreprend de soumettre définitivement ce peuple en l'intégrant au royaume franc et à la chrétienté. Une campagne de destruction systématique des points fortifiés et des lieux de culte saxons est menée entre 775 et 780 et aboutit à la création de comtés et à la nomination de missionnaires. En 782, une grande révolte est très sévèrement réprimée - plusieurs milliers de personnes sont massacrées à Verden. À partir de 785, le premier capitulaire saxon établit un régime de terreur et de christianisation forcée. En 793, une nouvelle révolte conduit cependant Charlemagne à adopter une politique plus souple : les lois saxonnes sont maintenues et le premier capitulaire saxon est remplacé par un second, plus clément, qui introduit une égalité progressive entre Francs et Saxons (797). Enfin, la fondation de plusieurs évêchés (Brême, Paderborn, Verden) et de grands monastères (Werden, Corvey) transfère aux clercs la responsabilité d'une christianisation moins brutale. Au cours du IXe siècle, les élites aristocratiques saxonnes sont définitivement intégrées à l'Empire et à la chrétienté occidentale, au point de faire de la Saxe le foyer de la renaissance impériale au siècle suivant : en 962, Otton Ier est sacré à Rome, fondant ainsi le Saint Empire romain germanique.

sceau de majesté,

cachet d'authentification de documents royaux, dont l'empreinte représente un souverain dans une attitude hiératique.

Le sceau, qui équivaut à une signature, est attaché à un acte public ou privé. Il est constitué d'une bulle de cire ou de plomb sur laquelle est gravé, par empreinte, un symbole ou une effigie propre à celui qui l'appose. Réservé aux chancelleries royales à l'époque carolingienne, l'emploi du sceau se généralise à partir du XIe siècle dans les milieux aristocratiques, et devient jusqu'au XVe siècle le mode de validation par excellence des actes.

Le sceau de majesté apparaît en France sous le règne d'Henri Ier (1031/1060), au moment où la monarchie capétienne cherche à affermir son autorité face aux grands du royaume. Il représente le plus souvent le souverain assis sur son trône, couronné, et tenant à la main les insignes royaux : une fleur de lys, un sceptre, un globe ou une main de justice. Le roi dispose d'autres sceaux, notamment de type équestre, le représentant à cheval, ou de type armorial, et il use d'un petit sceau (ou sceau du secret) pour sceller des lettres à caractère confidentiel. À partir du XIVe siècle, le sceau de majesté se prête à de nombreuses variations sur la figuration du trône mais aussi sur les motifs iconographiques.

scélérates (lois),

nom donné par l'opposition radicale et socialiste aux lois votées par la majorité parlementaire en 1893 et 1894 pour lutter contre les anarchistes.

Le 9 décembre 1893, Auguste Vaillant lance une bombe dans l'enceinte de la Chambre des députés ; le 24 juin 1894, le président de la République Sadi Carnot, qui a refusé de gracier Vaillant, est assassiné par l'Italien Sante Caserio : mettant à profit l'émotion suscitée par ces attentats, les gouvernements dirigés par Casimir-Perier puis par Charles Dupuy font voter trois lois qui restreignent la liberté de la presse et qui facilitent les poursuites contre les menées anarchistes. La loi du 12 décembre 1893 définit le délit de « provocation indirecte aux faits qualifiés crimes », c'est-à-dire l'apologie des crimes de sang, pillage, incendie ou vol. La deuxième loi, votée le 17 décembre, vise les « associations de malfaiteurs » : les poursuites ne sont plus engagées seulement contre les auteurs de crime ou de délit mais contre tout organisme jugé potentiellement dangereux. Enfin, la loi du 27 juillet 1894 traduit devant le tribunal correctionnel, moins sensible aux mouvements de l'opinion que les jurys, les délits, très vaguement définis, de « propagande anarchiste par voie de presse ». Ces lois, adoptées malgré l'opposition des socialistes et des radicaux, sont très vite contestées pour l'usage qui en est fait. Alors que les attentats anarchistes cessent rapidement, elles deviennent l'outil privilégié des gouvernements pour atteindre d'autres cibles. Elles sont en particulier utilisées pour lutter contre le mouvement socialiste et antimilitariste à la veille de la Première Guerre mondiale et contre le Parti communiste entre les deux guerres. Leur abrogation, maintes fois réclamée, ne sera effective qu'en 1939.

Scheurer-Kestner (Auguste),

chimiste, industriel et homme politique (Mulhouse 1833 - Bagnères-de-Luchon 1899).

L'histoire a retenu le nom de Scheurer-Kestner car il a su faire usage de son influence comme vice-président du Sénat pour animer le mouvement qui a conduit à la révision du procès du capitaine Dreyfus.

À l'issue de ses études secondaires, Scheurer-Kestner travaille dans l'usine d'indiennes de son père à Thann, près de Mulhouse, tout en faisant des séjours à Paris pour étudier la chimie. Ayant épousé la fille de l'industriel et homme politique Charles Kestner en 1856, il entre dans l'entreprise chimique de celui-ci pour la diriger ensuite jusqu'en 1899, bien que résidant le plus souvent à Paris depuis 1870. Républicain déterminé comme son beau-père, Scheurer-Kestner a connu la prison à Paris en 1862. Il est élu député du Haut-Rhin lors du scrutin de 1871 et, à ce titre, signe la « protestation de Bordeaux », refusant la cession de sa région natale à l'Allemagne. Contraint à la démission, il se fait élire dans la Seine dès juillet comme député gambettiste. Entre 1879 et 1884, il dirige la République française, le journal du groupe de l'Union républicaine. En 1875, il devient sénateur inamovible, puis vice-président du Sénat (1895-1897).