Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
V

vin. (suite)

Au XXe siècle, tandis que la superficie du vignoble français diminue régulièrement, sa production augmente continuellement, et le rendement à l'hectare ne cesse de s'accroître. Cela va de pair avec un incontestable progrès des techniques viticoles et vinicoles, mais n'est guère cohérent avec la prétention affichée d'amélioration de la qualité du vin. La chute de la consommation de vin ordinaire, et l'accroissement très rapide des quantités de vins d'appellation contrôlée produites et consommées, qui fondent cette prétention, correspondent-ils à autre chose qu'à une série de décrets administratifs ? On a d'autant plus de raison de s'en inquiéter que le degré alcoolique - en principe, naturel - entre dans les critères de classification de la qualité des vins, et que la pratique de la chaptalisation affecte la plupart des régions.

Vincennes (édit du Bois de),

édit réglementant la succession au trône de France.

Élaboré en août 1374 par le roi Charles V et ses conseillers, il est publié au parlement de Paris le 21 mai 1375. Sa principale disposition fixe la majorité des rois de France à leur entrée dans leur quatorzième année, c'est-à-dire à 13 ans et un jour : elle a pour but de limiter la durée d'une éventuelle régence. D'autres dispositions définissent ensuite l'ordre de succession à la couronne : le fils aîné, puis le petit-fils - ou, à défaut, le fils cadet -, enfin le frère le plus âgé. L'édit établit ainsi la dévolution de la couronne en faveur du petit-fils aîné, plutôt que du frère cadet, en cas de décès prématuré du dauphin avant celui du roi. En outre, l'édit exclut totalement les femmes de la succession, et prévient les éventuelles prétentions de leurs fils, à l'instar de celles du roi Édouard III d'Angleterre, petit-fils de Philippe IV le Bel par sa mère Isabelle, qui, depuis 1337, revendique la couronne de France.

L'ensemble de ces dispositions traduit la volonté de favoriser une succession masculine directe et le souci d'assurer la continuité de l'État qui animent le roi Charles V et ses proches conseillers. La couronne n'est pas un bien propre du roi : sa dévolution respecte des règles précises - désormais rassemblées en un texte unique -, qui s'imposent au roi lui-même et garantissent la stabilité du gouvernement du royaume. L'édit du Bois de Vincennes s'accompagne des ordonnances d'octobre 1374 sur la régence, la tutelle des enfants royaux et les apanages et dots des cadets. Ces textes définissent un ensemble cohérent de règles qui président à la succession de la couronne de France, du XIVe siècle à la fin de l'Ancien Régime.

Vincent de Beauvais,

frère prêcheur, auteur de la plus célèbre encyclopédie médiévale (vers 1190 - 1264).

Vraisemblablement originaire de Beauvais, Vincent entre au couvent dominicain de Paris, qui vient d'être fondé en 1218. En 1246, il est sous-prieur du couvent de Beauvais avant de devenir lecteur à l'abbaye cistercienne de Royaumont. Il est alors un proche de Louis IX : il prêche devant le roi et dédie à sa femme, la reine Marguerite, un ouvrage destiné à l'éducation des enfants royaux, le De eruditione puerorum. Le roi lui commande alors - ou peut-être soutient-il seulement - la réalisation d'une grande encyclopédie, le Speculum majus, achevé vers 1257-1258. Il s'agit d'une vaste compilation de l'état des savoirs, divisée en trois volumes : le Miroir de l'histoire (Speculum historiale), le Miroir de la nature (Speculum naturale) et le Miroir des sciences (Speculum doctrinale). L'entreprise est collective : Vincent de Beauvais dirige, coordonne et complète les travaux d'une équipe composée de dominicains du couvent de Paris et de cisterciens de l'abbaye de Royaumont. L'appui du roi lui permet de bénéficier de grandes facilités de travail, en particulier pour la consultation de manuscrits parfois rares et lointains. Le projet s'inscrit parfaitement dans le cadre de l'esprit totalisant des intellectuels du XIIIe siècle, férus de « sommes » et d'encyclopédies. L'ouvrage connaît d'ailleurs un succès immédiat et considérable. Dès 1271, une forme abrégée de la partie historique est réalisée par Adam de Clermont, et en 1333, paraît une traduction française, due à Jean de Vignay, sous le titre de Miroir historial : cette œuvre fait désormais partie de la culture des élites laïques de la fin du Moyen Âge. Enfin, dès 1473, le Speculum majus est imprimé intégralement, en dix volumes. Il demeure une référence et connaît de nombreuses rééditions jusqu'au XVIIe siècle.

Vincent de Paul (saint),

missionnaire fondateur d'ordre (Pouy, aujourd'hui Saint-Vincent-de-Paul, Landes, 1581 - Paris 1660).

Issu d'une famille de paysans pauvres, il peut, grâce à la protection du juge local, étudier au collège des cordeliers de Dax. Ordonné prêtre en 1600, il est d'abord pèlerin à Rome, puis étudiant en théologie à Toulouse, en quête d'un bénéfice pour s'établir. Enlevé par des pirates, il aurait même été esclave à Tunis, mais le fait n'est pas prouvé. Monté à Paris en 1608, il s'insinue dans l'entourage de Marguerite de Valois, « la Reine Margot », dont il devient aumônier (1610), et reçoit une petite abbaye. Il fréquente les milieux dévots, rencontre Bérulle, qui lui obtient la cure de Clichy (1612). Devenu précepteur dans la riche famille des Gondi (1613), il redécouvre sur leurs terres picardes la pauvreté paysanne, matérielle et spirituelle. Une conversion se fait en lui, qui le pousse, en 1617, à s'installer dans la misérable cure de Châtillon-sur-Chalaronne, dans la Dombes ; il y édifie ses paroissiens par son zèle vertueux. Revenu à Paris, nommé en 1619 aumônier général des galères, il mène une vie consacrée à la charité et à l'activité missionnaire : rechristianiser le peuple n'est possible qu'à travers le secours aux plus démunis. En 1625, il fonde la Société des Prêtres de la Mission, dits « lazaristes » parce qu'ils s'installent en 1633 au prieuré Saint-Lazare, à Paris. Cette congrégation veut former des prêtres dans l'esprit tridentin ; chaque mardi se tiennent à Saint-Lazare des conférences spirituelles très prisées des clercs parisiens. Les lazaristes ouvrent des séminaires, prêchent l'exemple, assurent plusieurs centaines de missions, en France, en Pologne et jusqu'à Madagascar. Parallèlement, Vincent de Paul mobilise les laïcs à des fins charitables. Avec Louise de Marillac et la protection de dévotes de la haute société, il fonde en 1633 les Filles de la Charité, dont le costume gris devient vite familier aux pauvres. Dans la collecte des dons ou pour l'œuvre des Enfants trouvés, qu'il crée en 1638, il s'appuie sur les réseaux dévots, telle la Compagnie du Saint-Sacrement : il est particulièrement actif pour alléger les misères lors des troubles de la Fronde. « Monsieur Vincent » jouit d'un grand prestige, sauf auprès des jansénistes, qu'il combat. Anne d'Autriche en fait son directeur de conscience et le nomme au Conseil de conscience (1643), institution qui règle les affaires ecclésiastiques.