Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
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Raimond IV de Saint-Gilles,

comte de Toulouse de 1088 à 1105, comte de Tripoli de 1102 à 1105 (1042 - Mont-Pélerin, 1105).

Fils cadet du comte Pons de Toulouse et d'Almodis de la Marche, Raimond est comte de Saint-Gilles, puis recueille les comtés de Rouergue, Nîmes et Narbonne en 1066. Son frère Guillaume, comte de Toulouse, lui vend le comté lors de son départ en pèlerinage en 1088.

Les contemporains de Raimond de Saint-Gilles font état de sa foi et de son goût pour les grandes entreprises : il s'engage en Espagne dans les combats contre les Maures en 1087. Dans le même état d'esprit, il répond à l'appel à la croisade lancé par le pape Urbain II. Parti de France en 1096, avec une forte armée qui fait de lui l'un des chefs de l'expédition, il emprunte la voie terrestre. Comme Godefroi de Bouillon, il refuse de prêter hommage à l'empereur byzantin Alexis II pour les terres à conquérir, mais lui fait néanmoins serment de fidélité. Cette attitude ambiguë va nuire, par la suite, à son autorité morale.

Il prend Antioche avec Bohémond de Tarente, puis Jérusalem avec Godefroi de Bouillon, mais son comportement fantasque lui vaut d'être évincé de chacune de ces villes. C'est probablement à partir de ce moment qu'il envisage de s'établir définitivement en Terre sainte. Il entreprend la conquête de la Syrie du Nord : Lattaquié est enlevé en 1099, Tortose en 1102, Gibelet en 1104. Premier comte de Tripoli, dont il fait le siège à partir de 1103, il construit la forteresse de Mont-Pélerin, où il meurt en 1105, sans avoir pris la ville. Son fils Bertrand achève la conquête, et la famille de Saint-Gilles s'établit durablement à Tripoli.

Raimond V,

comte de Toulouse de 1148 à 1194 (1134 - Nîmes 1194).

Petit-fils de Raimond IV de Saint-Gilles, fils du comte de Toulouse Alphonse Jourdain et de Faidide d'Uzès, Raimond V hérite du comté en 1148, dans un contexte politique mouvant. Lorsque le roi Louis VII divorce d'Aliénor d'Aquitaine en 1152, les deux hommes trouvent intérêt à s'allier - une alliance qui permet à Louis VII de conserver des liens avec le Midi et à Raimond V de contrer Henri II Plantagenêt, roi d'Angleterre et duc d'Aquitaine, son suzerain en puissance. Le comte de Toulouse entre dans l'alliance française en épousant Constance de France, sœur du roi. Mais le jeu est délicat, car les ingérences du roi de France dans le Midi auprès des vassaux du comte, le vicomte de Béziers Raimond Trencavel et la vicomtesse de Narbonne Ermengarde, menacent l'autorité comtale, tout comme les velléités de conquête d'Henri II Plantagenêt. Louis VII soutient efficacement le comte de Toulouse en 1159, lorsque le Plantagenêt fait le siège de la ville, puis il obtient la normalisation des relations avec Béziers et Narbonne. Mais Raimond V se rapproche alors d'Henri II Plantagenêt : il répudie Constance de France en 1166 et se reconnaît vassal du duc d'Aquitaine en 1173. Cependant, il fait à nouveau appel au roi de France, Philippe Auguste, lors d'un deuxième siège de Toulouse en 1188.

Contemporain des débuts du catharisme, Raimond V demande à Louis VII l'envoi d'une mission cistercienne en 1177. Mais son fils Raimond VI héritera d'une situation religieuse et politique en passe de devenir explosive.

Raimond VI,

comte de Toulouse de 1194 à 1222 (Toulouse 1156 - id. 1222).

Fils du comte Raimond V et de Constance de France, Raimond VI accroît ses États en épousant Jeanne d'Angleterre, fille d'Aliénor d'Aquitaine et d'Henri II Plantagenêt, qui lui apporte en dot le Quercy et l'Agenais. Après s'être opposé à son beau-frère Richard Cœur de Lion, il finit par reconnaître la suzeraineté de ce dernier sur la dot de sa femme.

La grande affaire de Raimond VI de Toulouse est la progression du catharisme, notamment dans les villes, alliées naturelles du comte - qui devient ainsi complice de l'hérésie. S'il ne s'engage pas lui-même, Raimond VI laisse monter dans ses domaines l'opposition au pouvoir temporel de l'Église. Pour cette raison, il est excommunié en 1207 par Pierre de Castelnau, légat du pape Innocent III. Après l'assassinat du légat en 1208 par des officiers de Raimond VI, le pape fait prêcher la croisade contre les hérétiques. Conduite par Simon de Montfort, seigneur originaire d'Île-de-France, une armée s'élance alors vers le Midi, tandis que Raimond VI se hâte de faire pénitence, se joint à la croisade et prend part aux sièges de Béziers et de Carcassonne en 1209. Puis, inquiet de la puissance de Simon de Montfort, il fait volte-face et prend la tête de la résistance aux croisés.

Déchu, excommunié une nouvelle fois par le pape en 1211, Raimond VI trouve le soutien du roi Pierre II d'Aragon, que les menées françaises en Languedoc inquiètent. Pierre II obtient d'abord d'Innocent III des sanctions contre les abus des croisés, mais ces derniers s'en défendent et le roi d'Aragon se résout à engager le combat. La bataille de Muret, le 12 septembre 1213, est un moment capital dans l'histoire du Midi : la mort de Pierre II d'Aragon marque la fin des prétentions aragonaises dans la région, et la victoire de Simon de Montfort constitue un jalon dans l'intégration du Midi au royaume.

Battu, Raimond VI se réfugie en Angleterre, sans pour autant se soumettre. Au quatrième concile du Latran, en 1215, Simon de Montfort obtient la dépossession totale du comte de Toulouse à son profit. Mais ses exactions amènent les Toulousains à se soulever et Raimond VI reprend la ville en 1217, à la faveur de la révolte. Simon de Montfort est tué en 1218 en essayant de reprendre la ville. Son jeune fils, Amaury de Montfort, puis le futur Louis VIII échouent à la reconquérir. À sa mort, Raimond VI est redevenu maître de la quasi-totalité de ses États, mais l'avenir de la principauté toulousaine dépend désormais de l'engagement du roi de France dans la croisade.

Raimond VII,

comte de Toulouse de 1222 à 1249 (Beaucaire 1197 - Millau 1249).

Fils de Raimond VI et de Jeanne d'Angleterre, Raimond VII hérite d'un comté en lutte contre les croisés. S'appuyant sur la fidélité des villes, il s'efforce d'achever la reconstruction engagée par son père et chasse Amaury de Montfort de Carcassonne en 1224. Il fait également cesser les persécutions contre les cathares. Indigné, le pape Honorius III envoie en France le cardinal de Saint-Ange afin de redonner souffle à la lutte contre les hérétiques du Midi. Au concile de Bourges de 1225, Raimond VII est excommunié, une nouvelle croisade est prêchée. Le roi Louis VIII, auquel Amaury de Montfort a abandonné tous ses droits sur les terres languedociennes, a ainsi plus d'une raison de se lancer dans l'aventure. L'expédition royale de 1226 est un relatif succès. Si Louis VIII s'empare avec difficulté d'Avignon, possession du comte de Toulouse, il prend aisément Nîmes, Carcassonne et Béziers, où il fait établir des sénéchaussées royales. Mais il renonce à assiéger Toulouse et meurt sur le chemin du retour.