Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
V

Vienne (congrès de), (suite)

Les acteurs et les négociations.

• Les quatre puissances victorieuses de Napoléon - l'Angleterre, la Prusse, l'Autriche et la Russie - convoquent au congrès l'ensemble des chefs d'État européens. Des souverains y assistent - François Ier d'Autriche, le tsar Alexandre, le roi de Prusse Frédéric-Guillaume III -, mais également des ministres, des courtisans et de simples observateurs. Si l'ouverture officielle des négociations a lieu le 1er novembre, les quatre grands ont tenu dans les semaines précédentes - dès le 15 septembre - des réunions préliminaires qui témoignent de leur volonté de régler entre eux les principales questions. L'Angleterre est représentée par Castlereagh (auquel succédera Wellington), l'Autriche par Metternich - qui joue un rôle majeur durant ces quelques mois et connaît l'apogée de sa carrière diplomatique -, la Prusse par Hardenberg et von Humboldt, la Russie par Nesselrode et Razoumovski.

Talleyrand, qui représente la France de Louis XVIII, arrive le 24 septembre. Il a pour mission de défendre le principe de « légitimité », selon lequel « la souveraineté ne peut être acquise par le simple fait de la conquête, ni passer au conquérant si le souverain ne la cède ». A-t-il, par ses intrigues, réussi à diviser les quatre grands, ou a-t-il, avec sa dextérité coutumière, profité de leurs dissensions ? Quoi qu'il en soit, il parvient à se faire admettre aux conférences préliminaires et à faire résonner, au milieu du concert des vainqueurs, la voix d'une France accablée par la défaite : s'élevant contre le pouvoir abusif que s'arrogent l'Angleterre, l'Autriche, la Prusse et la Russie, il reçoit le soutien de l'Espagne et réussit à grouper autour de lui les États secondaires, si bien que la direction du congrès est finalement assumée par un comité de huit pays comprenant, outre les quatre grands, la France, l'Espagne, le Portugal et la Suède. Mais les décisions importantes continuent d'être prises au cours de réunions restreintes, auxquelles Talleyrand est néanmoins admis.

Jusqu'à la fin de l'année 1814, l'avancée des négociations est contrariée par la constitution d'un axe russo-prussien, auquel s'opposent la France, l'Autriche et l'Angleterre : l'antagonisme, né des visées de la Prusse sur la Saxe et de la volonté du tsar de rétablir à son profit l'ancien royaume de Pologne, n'est définitivement surmonté qu'au début du mois de février 1815. Le 13 mars, le congrès déclare hors la loi Napoléon, revenu en France après son exil de l'île d'Elbe : « En rompant la convention qui l'avait établi à l'île d'Elbe, Bonaparte détruit le seul titre légal auquel son existence se trouvait attachée. Comme ennemi et perturbateur du repos du monde, il s'est livré à la vindicte publique. » En un sens, ce retour de l'« usurpateur » intervient à point nommé pour souder les alliés et reléguer au second plan leurs dissentiments. Sans se laisser troubler outre mesure par les Cent-Jours, le congrès poursuit ses discussions.

Bilan territorial et politique.

• L'acte final est signé le 9 juin 1815. La France se voit dépossédée de l'ensemble des territoires conquis par Napoléon. L'une des idées directrices du congrès consiste à se prémunir de ses éventuelles visées hégémoniques en l'entourant d'un réseau d'États secondaires suffisamment forts pour ne pas tomber dans son orbite. De cet objectif procèdent la création du royaume des Pays-Bas, la reconstitution de la Confédération helvétique et la résurrection du royaume de Piémont-Sardaigne. Autre création politique : la Confédération germanique, réunissant trente-neuf États et villes libres et présidée par l'empereur d'Autriche. Sur le plan territorial, la Russie conserve la Finlande et la Bessarabie et place sous sa tutelle la plus grande partie de la Pologne ; la Prusse acquiert la Poméranie suédoise, une partie de la Saxe, la Westphalie et les provinces rhénanes ; l'Autriche compense la perte de la Belgique par des gains en Italie et en Bavière ; l'Angleterre conserve plusieurs colonies conquises sur la France ; la Suède se voit reconnaître l'annexion de la Norvège, qui reçoit les duchés de Holstein et de Lauenburg. Quant à l'Italie, elle demeure divisée en sept États, sous l'influence prédominante de l'Autriche.

Ce réaménagement considérable de l'Europe qui s'effectue après la tourmente napoléonienne assure incontestablement un équilibre des puissances, dont témoigneront plusieurs décennies de stabilité. Mais il n'en néglige pas moins - c'est son principal point faible - les revendications nationales : l'aspiration des peuples aura raison de l'édifice diplomatique laborieusement construit.

Vienne (traité de),

traité signé le 2 mai 1738, mais daté du 18 novembre, qui met fin à la guerre de la Succession de Pologne.

Ouverte en 1733 pour soutenir l'élection du candidat de la France au trône de Pologne, Stanislas Leszczynski, beau-père de Louis XV, la guerre est quasiment achevée depuis 1735. Les Russes ont chassé Stanislas de Pologne au profit d'Auguste III ; les Français et les Espagnols ont occupé l'essentiel des possessions autrichiennes en Italie. Dès octobre 1735, des préliminaires de paix sont établis ; mais l'empereur Charles VI continue à finasser, espérant un retournement de situation, qui ne viendra pas. Après de longues tractations et le renvoi par le cardinal de Fleury du très anti-autrichien ministre des Affaires étrangères Chauvelin, l'accord est finalement signé en 1738. Il repose sur un vaste échange de royaumes. Pour dédommager Stanislas, on donne à ce dernier les duchés de Bar et de Lorraine, qui deviendront français à sa mort. Le duc François de Lorraine, qui a épousé Marie-Thérèse (1736), la fille de Charles VI, désignée par la pragmatique sanction de 1713 comme héritière du trône impérial, reçoit le grand-duché de Toscane, dont le souverain, le dernier Médicis, est mort en 1737. L'Autriche abandonne Parme et le royaume des Deux-Siciles à l'infant don Carlos, tandis que l'autre allié de la France, le roi de Sardaigne, agrandit le Piémont au détriment de la Lombardie, qui est restituée à l'Autriche. L'habileté de Fleury a donné sans drame la Lorraine à la France, et fait de celle-ci la bénéficiaire d'une guerre qu'elle n'avait pas souhaitée.