Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
V

voies romaines.

Si routes et chemins existaient en nombre dans la Gaule celtique, la conquête romaine accéléra la création d'un réseau routier planifié.

La République avait fait construire une première voie du Rhône aux Pyrénées, la via Domitia, qui reliait ses possessions espagnoles à l'Italie. Après la conquête de la Gaule « chevelue », ce fut Agrippa, lieutenant d'Auguste, qui mit en place le tracé du réseau lors de son premier gouvernement en Gaule (38-37 avant J.-C.). Le géographe Strabon lui attribue le choix de Lyon comme carrefour central et la paternité des quatre grandes voies : route d'Aquitaine, qui reliait Saintes, capitale initiale de cette province, à Lyon ; route de l'Océan vers le Nord et route du Rhin, qui constituaient une voie unique jusqu'à Langres et se séparaient ensuite, la première se dirigeant vers la Manche, la seconde vers le Rhin ; route de Narbonnaise enfin, qui descendait le couloir rhodanien. Il existait aussi d'autres liaisons : les voies alpines, construites après les conquêtes de Drusus (25-15 avant J.-C.), trois routes augustéennes (de Bordeaux à Narbonne, de Chalon-sur-Saône à l'embouchure de la Seine, et de Roanne à l'Armorique), deux construites par Claude (41/54 après J.-C.) à travers le Massif central et de Boulogne à Cologne, et une ouverte par les Flaviens pour relier Strasbourg au haut Danube. Il faut y ajouter les chemins vicinaux qui desservaient les agglomérations secondaires des cités (vici) et dont l'Itinéraire d'Antonin et la Carte de Peutinger ont livré, à défaut d'un tracé géographique, un plan de desserte.

Les routes étaient composées de plusieurs couches de maçonnerie durcies et seuls les tronçons proches des villes et les sols fragiles étaient recouverts de pavés. Des bornes milliaires, gravées au nom des empereurs constructeurs ou réparateurs, rythmaient le voyage. De ce fait, les grandes périodes d'entretien sont bien connues : les règnes de Claude, d'Antonin (138/161), de Caracalla (211/217) et de Maximin (235/238), mais aussi des empereurs militaires du IIIe siècle et de Constantin (306/337). Si l'État s'occupait des constructions, qu'il confiait le plus souvent à la main-d'œuvre militaire, il transférait néanmoins aux cités la charge de leur entretien.

Le réseau gaulois indique bien la fonction première de la route, destinée au transport rapide des légions (du Rhin vers la Bretagne ou de Strasbourg vers le Danube), mais aussi aux déplacements des fonctionnaires, à l'acheminement du courrier officiel et aux recensements. Le choix de sites indigènes comme relais favorisa toutefois leur développement urbain et la route romaine fut un facteur essentiel d'urbanisation en Gaule.

vol de l'Aigle,

expression qui désigne la marche pacifique et victorieuse de Napoléon à travers la France et son retour à Paris après son premier exil à l'île d'Elbe.

Moins d'un an après sa première abdication (11 avril 1814), Napoléon cherche à tirer parti du discrédit dans lequel sont rapidement tombés les alliés et les Bourbons auprès de la population française. Tandis qu'à Vienne les tractations entre les princes européens révèlent la nature réactionnaire et impérialiste des puissances qui ont abattu l'Empire, Napoléon s'embarque le 26 février 1815 avec sa garde sur l'Inconstant, en direction des côtes françaises. Le 1er mars, il débarque à Antibes et rallie à lui les soldats venus l'arrêter. Il remonte dès lors de ville en ville, gagnant peu à peu habitants et garnisons à sa cause. Parvenu à Grenoble le 7, à Lyon de 10, il entre à Paris le 20, tandis que Louis XVIII, pourtant soutenu par le Congrès, s'enfuit aux Pays-Bas sans être parvenu à mettre un terme à la course de celui qu'il appelle l'« usurpateur ». Revenu au pouvoir, Napoléon règne sur un pays plus résigné qu'enthousiaste à l'idée de son retour. Diplomatiquement isolé, il retrouve bientôt le chemin des champs de bataille : son aventure prend fin à Waterloo, le 18 juin 1815.

Épisode héroïque de la légende napoléonienne, le vol de l'Aigle s'apparente au mythe d'Icare : pour avoir défié une condition et un destin qui n'étaient plus les siens, l'Empereur s'est brûlé les ailes au soleil qui avait été celui d'Austerlitz. La chute après l'ascension, sous forme d'un châtiment de l'histoire.

Volney (Constantin François de Chassebœuf, comte de),

philosophe et écrivain (Craon, Anjou, 1757 - Paris 1820).

Né dans une famille bourgeoise angevine, Constantin François étudie le droit, les langues orientales, la médecine et l'histoire. Il arrive à Paris en 1776 et se fait connaître sous le nom de Boisgirais dans les salons de Mme Helvétius et du baron d'Holbach. De 1782 à 1785, il voyage en Orient (peut-être à l'initiative du ministre Vergennes) et publie, sous le nom de Volney, deux ouvrages qui le rendent célèbre : le Voyage en Égypte et en Syrie (1787) et les Considérations sur la guerre des Turcs et de la Russie (1788). À la fin de 1788, il se lance dans la bataille politique pour les États généraux en faisant paraître un journal « patriote » : la Sentinelle du peuple. Il est élu député du tiers état de l'Anjou et joue un rôle important dans les premiers mois de la Constituante. Ainsi, il intervient dans le débat sur la Corse (novembre 1789) et dans celui sur le droit de paix et de guerre (mai 1790). En 1791, il publie son ouvrage majeur : les Ruines ou Méditation sur les révolutions des empires. Le texte est immédiatement traduit et exerce une grande influence sur des personnes aussi différentes que le poète William Blake ou Mme de Staël. À la fin de 1791, Volney se retire en Corse, où il possède une propriété agricole. Il se lie à la famille Bonaparte et s'oppose à Paoli. Selon certains historiens, il aurait même joué un rôle dans la mise hors la loi de ce dernier, en 1793. De retour à Paris, il publie la Loi naturelle ou le Catéchisme du citoyen français. Il est arrêté en novembre 1793, non comme il l'affirmera plus tard en raison de ses opinions, mais pour défaut de paiement des annuités de sa propriété ; il n'est libéré qu'en août 1794. En 1795, sa réputation lui vaut d'être nommé professeur d'histoire à l'École normale ; puis, après un voyage aux États-Unis de 1795 à 1798, il entre à l'Institut. Familier des Bonaparte, Volney appuie le coup d'État de 18 brumaire et devient sénateur, mais l'évolution autocratique du régime napoléonien le fait retourner à ses études : il est alors l'un des membres du groupe des Idéologues. Sous l'Empire, il publie notamment les Recherches nouvelles sur l'histoire ancienne (1813). En 1814, il se rallie à la Charte et devient pair de France.