Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
G

Gaules (guerre des), (suite)

Le premier prétexte est, en 58 avant J.-C., la tentative des Helvètes de Suisse occidentale de quitter leur région, menacée par les Germains, pour s'installer dans les Charentes, avec l'accord des populations locales. Arguant des troubles que provoque leur migration, Jules César se rend à leur rencontre, les écrase à proximité de Bibracte, et les refoule jusque dans leur terre d'origine. Puis il repousse une incursion d'Arioviste, roi des Suèves, un peuple peut-être germanique.

Après ces deux campagnes « d'assistance », l'armée romaine ne quittera plus la Gaule. Elle y cantonne au cours de l'hiver suivant, et César prend aussitôt prétexte d'une « conspiration » des Belges, les peuples gaulois les plus septentrionaux, mécontents de cette occupation, pour les attaquer. Il défait leur coalition - réunissant 300 000 guerriers - sur l'Aisne, tandis que son lieutenant Crassus s'en va soumettre les peuples armoricains. En 56 avant J.-C., il doit à nouveau envoyer des corps d'armées dans différentes régions, à la fois chez les Belges, les Aquitains et les Armoricains. L'année suivante, il extermine, par un massacre de plus de 400 000 personnes, deux peuples germaniques « coupables » d'incursions, traverse le Rhin et, peu après, la Manche. Il se rend à nouveau en Grande-Bretagne en 54 avant J.-C., sans rencontrer beaucoup de succès, avant d'écraser impitoyablement une nouvelle révolte de peuples belges (Éburons, Trévires, Nerviens) en 53 avant J.-C. Enfin, en 52 avant J.-C., il doit affronter le soulèvement général conduit par Vercingétorix, qui se termine à Alésia. Quelques révoltes seront encore réprimées en 51 avant J.-C., par exemple lors du siège d'Uxellodunum (Lot), où les combattants auront tous, après leur reddition, la main droite tranchée.

On estime que la guerre des Gaules fit environ un million de morts du côté gaulois et 40 000 du côté romain ; au moins un demi-million de Gaulois furent réduits en esclavage.

Gaulle

(Charles de). Charles de Gaulle, militaire et homme d'État, domine le paysage historique français du XXe siècle, en raison de l'ampleur et de la multiplicité des services rendus à son pays aussi bien que d'une personnalité puissamment originale, mise en valeur avec un art de l'expression sans égal en son temps.

Sa carrière est l'exemple de ce que peut la volonté d'un homme face aux déterminismes ; elle rappelle l'importance du langage dans l'ordre politique. Tout grand destin est le fruit de la rencontre entre un personnage exceptionnel et des circonstances qui ne le sont pas moins. N'était le désastre où manque de s'abîmer la France en juin 1940, de Gaulle serait peut-être resté confiné dans les tâches - parfois considérables - réservées à ses pairs officiers. Mais, en 1940, la France est abattue, et il se présente hors de toute règle pour la relever et faire d'un pays en lambeaux l'un des vainqueurs de 1945. Treize ans plus tard, encore, alors que les développements de la guerre d'Algérie menacent l'État d'une subversion radicale, il sait, par des voies singulières, rétablir l'ordre et inventer des institutions suffisamment bien agencées pour survivre à diverses crises politiques et alternances idéologiques.

Une fois l'État restauré, non sans références à la tradition monarchique, Charles de Gaulle, après avoir présidé à l'émancipation d'un empire colonial dont le temps avait fait un fardeau et une entrave à sa liberté diplomatique, déploie ses talents, en vue de rendre à la France un rôle actif dans le débat international.

Racines, famille, carrière

Né à Lille le 9 novembre 1890, Charles de Gaulle appartient à une famille catholique mi-aristocratique, mi-bourgeoise, issue d'ancêtres bourguignons et irlandais (les Mac Cartan), et de cousins du pays de Bade. On trouve parmi ses ascendants des juristes, des militaires, des industriels et des érudits. La famille, installée à Paris, mène une vie étriquée : le père, Henri de Gaulle, est professeur de lettres, de philosophie et de mathématiques dans un établissement privé. Il contribue fortement à inculquer à son fils de solides connaissances historiques, et une bonne culture littéraire.

C'est peu après l'affaire Dreyfus, et bien que l'armée en soit sortie ébranlée, que le second fils d'Henri de Gaulle, Charles, choisit de préparer le concours de Saint-Cyr. Admis en 1910, il ne se signale pas par des résultats exceptionnels. Sorti de l'école au 13e rang - le « major » de la promotion 1912 étant le futur maréchal Juin -, il opte pour l'infanterie, parce qu'elle est, dit-il, l'arme « la plus militaire », et se voit affecté au régiment d'Arras, que commande le colonel Pétain : c'est le début d'une relation mouvementée.

Quand la guerre éclate, en août 1914, Charles de Gaulle vient d'être promu lieutenant. Il a lu tous les classiques militaires, de Jomini à Ardant du Picq, mais aussi Barrès et Bergson, et il est abonné aux Cahiers de la quinzaine, de Péguy. Il confie à des intimes qu'il se sent appelé à rendre à son pays « quelque service signalé ».

La guerre et les évasions

De Dinant à l'Argonne et à Verdun, le lieutenant puis capitaine de Gaulle montre son intrépidité face à l'épreuve du feu. Il est blessé à trois reprises - la troisième fois, gravement, à Douaumont, en mars 1916. Inanimé, il tombe aux mains de l'ennemi, entamant trente-deux mois d'une captivité qui le mène dans cinq camps d'internement, dont le dernier est l'oflag d'Ingolstadt, où sont détenus les récidivistes de l'évasion. Lui-même a fait trois tentatives, qui se sont soldées par trois échecs.

Cette longue captivité est pour lui une période essentielle de formation et de réflexion : il multiplie les lectures et les conférences aux codétenus, et étudie l'Allemagne de l'intérieur. Néanmoins, cette « demi-guerre » lui laisse un tel sentiment d'inaccomplissement que, à peine libéré, il s'engage pour la Pologne, où un détachement français aide Pilsudski à refouler les attaques de l'armée Rouge.

L'« officier de plume » et le Maréchal

Pendant près de vingt ans, c'est en tant qu'intellectuel militaire que le capitaine de Gaulle, promu commandant, puis colonel, va forger sa réputation, notamment dans l'ombre du maréchal Pétain. En effet, le vainqueur de Verdun, dernier survivant des grands chefs de la guerre de 1914-1918, qui règne sur l'armée française, l'appelle à son cabinet comme « officier de plume ». Le maréchal patronne lui-même des conférences prononcées à l'École de guerre (1927) par son protégé, qui, donnant des leçons de commandement à un parterre d'officiers plus gradés que lui, y gagne une réputation durable d'outrecuidance.