Dictionnaire de l'Histoire de France 2005Éd. 2005
C

colonies grecques, (suite)

C'est en 600 avant J.-C. qu'un groupe d'immigrants grecs de la ville de Phocée acquiert la calanque de Marseille, le Lacydon (le « Vieux-Port ») et ses abords, fondant Massalia. D'autres édifient Emporion (Ampurias) sur l'îlot San Marti, le long de la côte du Levant espagnol. Marseille devient la tête de pont pour la diffusion de marchandises grecques dans l'ensemble de la Gaule et au-delà. Elle est située à l'aboutissement d'une grande voie commerciale, qui, par les vallées du Rhône, de la Saône, puis de la Seine, permet à l'étain de Cornouailles, notamment, de parvenir jusqu'à la Méditerranée. Tandis que les Grecs s'approvisionnent en matières premières - métal, bois, salaisons, cuir... - et en esclaves, ils diffusent, en échange, des produits de luxe - vaisselle de bronze, vases peints, vin -, qui confortent le prestige des petits chefs gaulois. Dans un second temps, Marseille fonde elle-même ses propres colonies : au Ve siècle avant J.-C., Antipolis (Antibes), Agathè Tychè (Agde) et Rhodanousia (Espeyran ?) ; au IVe siècle, Olbia (Hyères), dont d'importantes fouilles ont révélé l'urbanisme strict et le rôle commercial ; enfin, Nikaia (Nice) et Tauroeis (Six-Fours), au IIIe siècle. Outre leurs marchandises, les Grecs exportent leurs techniques, voire un mode de vie qui influence rapidement les indigènes, aussi bien dans l'architecture que dans l'alimentation. Mais, à partir du IIe siècle avant J.-C., le rayonnement grec est concurrencé par celui de Rome. Les Romains, d'abord appelés en renfort par Marseille pour lutter contre les populations indigènes, s'emparent de tout le sud de la Gaule en 121 avant J.-C. Les cités grecques conserveront un temps leur autonomie, et tomberont à leur tour après la conquête de la Gaule par César.

colonisation.

En quatre siècles, la France a conquis, puis perdu, successivement, deux empires coloniaux : le premier, du début du XVIIe au début du XIXe siècle ; le second, de 1830 à 1962, pour l'essentiel.

Cette expansion outre-mer a procédé de facteurs multiples et d'importance variable : pression démographique - de moins en moins effective -, recherche de profits commerciaux ou financiers par les entrepreneurs privés, mission évangélisatrice ou « civilisatrice », volonté de rétablir la grandeur et la puissance de la France. La colonisation a permis d'ajouter 60 millions de personnes (sur 12 132 000 km2) aux 40 millions d'habitants (sur 551 000 km2) que compte la métropole en 1939. Mais la « mise en valeur » des colonies et la politique républicaine d'assimilation n'ont pas réussi à faire de la « plus grande France » une seule nation : la République et son empire sont restés distincts.

La formation de l'empire colonial français

La formation de l'empire colonial français se déroule sur une longue période, divisée en deux épisodes séparés par une brève interruption. La première expansion a pour origine le refus par les rois de France du partage du Nouveau Monde entre les couronnes d'Espagne et de Portugal par le pape Alexandre VI en 1493. François Ier obtient de Clément VII l'assurance que ce partage ne concerne pas les terres qui restent à découvrir, et il envoie, de 1534 à 1542, le Malouin Jacques Cartier rechercher au Canada une nouvelle voie d'accès aux richesses de l'Asie par le fleuve Saint-Laurent. La France tente à plusieurs reprises de s'établir, dans la baie de Rio de Janeiro, en 1560, et en Floride, entre 1562 et 1568. Mais l'opposition du Portugal et de l'Espagne, puis les guerres de Religion mettent fin à ces initiatives. Les expéditions lointaines et les fondations d'établissements permanents reprennent sous le règne d'Henri IV, et se développent de façon continue pendant un siècle et demi, sous l'impulsion, notamment, de Richelieu et de Colbert : colonies fondées en Amérique du Nord, aux Antilles et en Guyane, d'une part ; comptoirs sur les côtes de la Méditerranée (les « Échelles du Levant et de Barbarie »), de l'Afrique et de l'océan Indien, d'autre part. Malgré un premier recul territorial au profit de l'Angleterre en 1713 (baie d'Hudson, Terre-Neuve et Acadie), l'expansion française atteint son apogée au milieu du XVIIIe siècle. L'étendue des territoires alors contrôlés par la France en Amérique du Nord (du Canada à la Louisiane, par les Grands Lacs et les affluents du Mississippi) et en Inde (où Dupleix, directeur de la Compagnie française des Indes orientales, s'est constitué un domaine personnel et un réseau d'alliances dans le Dekkan) permettra de parler rétrospectivement d'un « premier Empire colonial français », non sans exagération. Cet « empire » est en effet réduit, puis détruit, par une série de conflits franco-britanniques. La Grande-Bretagne profite de la guerre de Sept Ans (1756-1763) pour conquérir le Canada (prise de Québec, 1759) et asseoir son hégémonie aux Indes. En 1763, le traité de Paris entérine la perte de l'Amérique du Nord (y compris de la Louisiane occidentale, à l'ouest du Mississippi, donnée à l'Espagne), de plusieurs îles des Antilles, des comptoirs du Sénégal, ainsi que la fin de la présence française en Inde. La France prend sa revanche, de 1778 à 1783, en intervenant pour soutenir les treize colonies britanniques révoltées, qui prennent le nom d'États-Unis d'Amérique en 1776. Mais, lors du traité de Versailles (1783), elle se contente de recouvrer les comptoirs du Sénégal, l'île de Tobago et les droits de pêche sur la côte sud de Terre-Neuve ; elle ne cherche pas à reprendre pied en Amérique du Nord. Réduit à un chapelet de comptoirs côtiers et de plantations insulaires, ce domaine colonial semble n'avoir pourtant rien perdu de sa rentabilité. Vingt ans vont suffire à l'effacer des cartes. La révolution de 1789 définit les colonies comme parties intégrantes du territoire national, mais la révolte des esclaves noirs de Saint-Domingue ruine la « perle des Antilles » en 1791, et la tentative de reconquête par l'armée du général Leclerc, envoyée par le Premier consul Napoléon Bonaparte en 1802, se solde par un échec. En guerre contre la France de 1793 à 1802, puis de 1803 à 1814, les Anglais conquièrent la plupart des colonies françaises au cours de la première période, et la totalité au cours de la seconde. L'épopée napoléonienne, marquée par des expéditions spectaculaires (occupation de l'Égypte de 1798 à 1801) et par des projets avortés (récupération de la Louisiane en 1802, revendue dès 1803 aux États-Unis), se traduit par la perte de toutes les possessions françaises d'outre-mer, trois ans avant la chute du grand empire continental. Toutefois, sous la Restauration, la France recouvre, à l'issue du congrès de Vienne, une partie de ses anciennes colonies et de ses comptoirs : Saint-Pierre-et-Miquelon, la Guadeloupe et la Martinique, la Guyane, les comptoirs du Sénégal et de l'Inde, et l'île de la Réunion (ex-île Bourbon). Cet ensemble de territoires, plus réduit que celui de 1763, compte moins de 500 000 habitants sur 7 000 kilomètres carrés, ce qui place la France au cinquième rang des puissances coloniales, derrière la Grande-Bretagne, les Pays-Bas, l'Espagne et le Portugal. Leur restitution est achevée en 1818.